«Jusqu’à ce que ça fasse bang»: le grand amour… toxique
Jusqu’à ce que ça fasse bang, nouveau roman d’Alexandra Larochelle, qui a beaucoup écrit pour les adolescent.e.s dans les dernières années (Trucs de peur, Troisième étoile), aborde de front une problématique bien réelle : l’amour toxique et cette violence psychologique sournoise, subtile, mais bien destructrice, qui s’infiltre dans beaucoup de relations de couple.
Maélia, 17 ans, file le parfait amour avec Oli, nouvel étudiant de sa classe arrivé de la Gaspésie. Le garçon provoque un vrai Big Bang dans le cœur de sa dulcinée, qui voit en lui son infini, l’expansion de son univers.
Oh, Oli ose peut-être une cachotterie par-ci, est en proie à une saute d’humeur par-là. Mais il est si gentil, si tendre. Il convainc sa «Maélou» d’écouter son cœur et son talent pour le dessin et de quitter son Charlevoix natal pour s’inscrire en graphisme au cégep à Québec, alors qu’elle prévoyait demeurer sagement dans sa région et suivre le chemin rationnel de la science et des maths, qu’elle n’aime pas plus qu’il ne le faut. Il est d’une aide précieuse sur la ferme des parents de Maélia, qui considèrent le jeune homme comme leur propre fils.
C’est simple, tout le monde adore Oli.
Trou béant
Pourquoi, alors, une fois exilée en ville – où elle fait l’apprentissage à la dure de la vie en solo en appartement, punaises de lit incluses! –, Maélia sent un trou béant s’installer en elle et s’agrandir, s’agrandir, au fil des visites d’Oli et de leurs conversations téléphoniques?
Après tout, Oli est toujours si avenant. C’est elle qui l’agace, avec ses réactions démesurées, ses questions inappropriées, ses promesses non tenues… Si lui a envie d’une relation sexuelle, Maélia peut bien se forcer pour lui faire plaisir ; lui ne multiplie-t-il pas toutes les attentions pour rendre sa douce heureuse?
Tout à sa passion sincère pour son amoureux, Maélia se tait, encaisse à chaque tempête, espérant seulement que son Oli redevienne de bonne humeur et que ne se remettent à voler les papillons autour d’eux. Jusqu’à ce que… ça fasse réellement bang?
Hélas, si notre compassion pour Maélia grandit au gré de l’intrigue de Jusqu’à ce que ça fasse bang, au même rythme que croît notre aversion pour le «parfait» Oli, ce n’est pas tout de suite qu’on aura droit à la conclusion de cette histoire très prenante (peu importe l’âge du lecteur ou de la lectrice), dont on prend connaissance le cœur un peu plus tordu à chaque page. Alexandra Larochelle a conclu son nouvel opus d’un fâchant «À suivre», qui laisse présager que la jeune héroïne devra peut-être encore galérer avant de s’affranchir de l’emprise de son Roméo… On bout déjà d’impatience de connaître la conclusion!
Écrit dans la langue des jeunes de 17 ans, teinté de leurs préoccupations, avec une savoureuse touche d’humour léger, Jusqu’à ce que ça fasse bang explore aussi un pan de l’existence rarement traité dans la littérature adolescente québécoise, celui du départ de la maison familiale, du déménagement en appartement, de l’apprivoisement du cégep, des premiers aléas avec un proprio.
À faire lire à vos adultes en devenir… qui pourront vous le prêter par la suite, parce que l’amour peut faire bang à n’importe quel âge.
Jusqu’à ce que ça fasse bang, d’Alexandra Larochelle. En vente maintenant, aux Éditions de la Bagnole.