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Un moratoire pour les déportations en Guinée

Des militants pour les droits humains ont demandés au gouvernement canadien de reconnaître la dangerosité de la situation politique en Guinée et d’instaurer un moratoire sur les déportations vers ce pays de l’Afrique de l’Ouest lors d’une conférence de presse dimanche matin au Centre des travailleurs migrants.

«Ce qui nous pose à demander un moratoire, c’est les tensions politiques liées aux élections qui viennent, et que les cas des demandeurs d’asile, il faut analyser ce qui se passe à la lumière des souffrances que les gens vivent» a dit le professeur de philosophie du Cégep Sainte-Hycacinthe, Amadou Sadjo Barry.

Le demandeur d’asile et porte-parole des Guinéens unis pour le statut, Mohammed Barry estime que le gouvernement fédéral n’est pas assez à l’écoute des souffrances que vivent les Guinéens qui demandent refuge au Canada. Il dit se rendre au moins une fois par semaine au centre de détention de Laval, où sont détenus de nombreux demandeurs d’asile guinéens.

«Le Canada refuse en bloc nos demandes d’asile politique. Je suis fatigué de me présenter au centre de détention de Laval et de voir que des membres de la communauté y sont toujours détenus » a-t-il ajouté. Même si le pays n’est pas en guerre, M. Barry estime qu’il n’y a pas de paix en Guinée. «C’est un pays sans État», martèle-t-il à Métro.

Un constat que partage un rapport du mois de novembre d’Amnistie International. Depuis 2015, l’organisme a recueilli des témoignages de plus d’une centaine de victimes et témoins de violations des droits humains. D’après le rapport la situation demeure fragile 10 ans après la manifestation de 2009 à Conakry, où 100 femmes ont été violées, 150 personnes ont été tuées et 1500 personnes ont été blessées.

L’organisme croit que la situation politique risque de se détériorer avec la recrudescence des tensions politiques à l’approche des élections présidentielles de 2020.  «Les autorités du président Alpha Condé continuent de réprimer la contestation, notamment en ayant recours à un usage arbitraire et excessif de la force contre les manifestants » affirme Andréanne Pâquet, directrice de mobilisation et impact à d’Amnistie Internationale Canada.

Le porte-parole de Québec Solidaire en matière d’immigration, Andres Fontecilla a appelé ses collègues provinciaux et fédéraux à intervenir. Il estime que la déportation des demandeurs d’asile guinéens est inadmissible. «Le  gouvernement du Canada n’hésite pas à soutenir les activités commerciales de nos entreprises en Guinée, dont celles de SNC-Lavalin et Rio-Tinto Alcan et ce, malgré le climat de terreur instauré par l’actuel gouvernement. En même temps, bon nombre de guinéens se voient refuser le statut de refugié au Canada, ou refuser toute possibilité d’obtention d’un statut permanent» a indiqué son attaché politique Léonardo Cardoso.

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Démythifier l’immigration: rencontre avec Victor Piché

Victor Piché, expert en immigration et ancien chroniqueur à Métro vient de publier un recueil de ses chroniques «Parlons immigration» dans la dernière publication de l’Association d’études canadiennes, Diversité canadienne. Le numéro «Parlons immigration: au-delà des mythes» déboulonne plusieurs idées reçues sur les questions migratoires. Pendant 40 ans, ce chercheur associé à la Chaire sur le droit international à l’Université de McGill s’est penché sur le sujet le plus épineux de l’heure. Rencontré aux bureaux de Métro, il fait le point pour nous sur quelques mythes.

Victor Piché
Victor Piché (Photo: Courtoisie)

L’immigration terroriste

D’après Victor Piché, l’immigration terroriste est l’un des plus grands mythes portant sur l’immigration. «Les grands mouvements terroristes qu’on a vus dans le passé, dans beaucoup de cas, c’était des gens nés sur place qui étaient responsables de ces attentats», note-t-il. Les ressortissants nationaux se sont souvent radicalisés sur place, ajoute-t-il.

Selon le chercheur, la menace est plutôt interne et provient de la radicalisation. «Malgré l’absence démontrée de liens, le discours «sécuritaire» domine largement les discussions politiques autour de l’immigration», écrit-il dans sa chronique sur le mythe de la crise migratoire. Il estime qu’on fait souvent peur aux gens avec les discours portant sur la sécurité nationale.

Moins d’immigrants pour une meilleure intégration économique

Au cours de la dernière campagne électorale, les discours laissant entendre qu’il faut moins d’immigrants pour mieux en prendre soin circulaient abondamment dans les partis politiques, remarque M.Piché. Mais d’après plusieurs études, ce n’est pas le nombre d’immigrants qui est un facteur de «non-intégration».

Cela serait davantage lié à des facteurs structurels, en particulier l’évolution du marché du travail et la discrimination, explique-t-il.

Les voleurs de «jobs»

«Ça fait 35 ans qu’on étudie ça. L’effet sur les emplois des natifs, il n’y en a pas. Au contraire, il y a même des études qui démontrent que ça permet même à des natifs d’améliorer leur situation. La main-d’œuvre immigrante est souvent complémentaire, il n’y a pas d’effet de substitution», dit le chercheur.

Selon Victor Piché les immigrants ont plus tendance que les natifs à créer leur propre emploi. «Non seulement les immigrants ne sont pas des voleurs de jobs, mais ils créent souvent leur propre emploi et créent même de nouveaux emplois pour les natifs et viennent combler des pénuries dans des secteurs où il est difficile de trouver des travailleurs nationaux», fait-il valoir dans l’une de ses chroniques.

La menace identitaire

D’après M.Piché, le français n’est pas menacé au Québec. «Évidemment, il y a beaucoup de bilinguisme à Montréal. Mais les francophones qui viennent ici et qui sont unilingues, ils n’ont pas de difficulté à se trouver un emploi», plaide-t-il. Le chercheur considère que nous sommes loin du déclin de la langue française au Québec.

Les mythes difficiles à détruire

«Les mythes sont très difficiles à détruire. J’ai déjà eu des débats avec des gens où je présente des chiffres et ils disent qu’ils n’y accordent pas d’importance, c’est alarmant», déplore l’ancien chroniqueur de Métro. Il faudrait donc que le travail des chercheurs portant sur ces questions soit beaucoup plus à la portée de la population, conclut M.Piché.

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