Consultez immédiatement un médecin si…
Dans les publicités américaines sur les médicaments contre le dysfonctionnement érectile, Viagra et Cialis annoncent : «Pour prévenir les lésions à long terme, consultez immédiatement un médecin si l’érection dure plus de quatre heures.»
Au Québec, le problème est qu’il faut au moins huit heures avant d’être examiné par un urgentologue. Cela signifie que la meilleure stratégie serait d’aller à l’urgence, attendre quatre heures, puis prendre le Viagra. Après, c’est une course contre la montre : l’érection se dissipera-t-elle avant que l’on appelle votre nom?
Espérons ne pas nous trouver dans cette situation, mais, un jour ou l’autre, on devra probablement se précipiter vers la salle d’urgence. Pour moi, «urgence» signifie «aide immédiate»… et non dans huit heures. Pourtant, malgré le tollé du public et les promesses des ministres de la Santé, il semble que l’attente ne cesse de s’allonger.
À moins que les politiciens ne puissent changer la nature humaine, je ne crois pas que notre système actuel puisse réduire l’attente dans les salles d’urgence. C’est d’ailleurs ce qui dissuade beaucoup de gens de s’y rendre.
Qui peut s’élever contre un besoin fondamental comme la santé? Mais résoudre le problème de l’accès aux soins en les rendant gratuits pour tous crée un système qui est rapidement submergé par les émotions humaines. L’anxiété relative à la santé, parfois raisonnable, parfois excessive, nous pousse à consulter un médecin. Si l’attente était courte, combien d’entre nous aimeraient poser une question au médecin (juste une petite question, Docteur), pratiquement chaque jour?
À l’heure actuelle, le seul élément de dissuasion est le temps d’attente. Comme la nature humaine ne changera pas, comment raccourcir ce temps? Eh bien, on pourrait faire appel à un autre aspect de la nature humaine : la tendance à vouloir garder ce qui nous appartient. Nous n’avons aucune objection à dépenser l’argent des autres, mais lorsqu’il s’agit du nôtre, c’est une autre histoire : nous marchandons, nous remettons nos besoins en question.
Cela ne veut pas dire de faire payer tout le monde pour les soins médicaux. Je ne veux pas vivre dans une société où seuls les riches sont traités. Mais, idéalement, le système de soins de santé universel pourrait prévoir un peu de responsabilité personnelle, comme des coûts partagés. Il est important de préserver l’accès aux soins de santé, mais à moins de diminuer la demande, nous devrons bientôt apporter notre sac de couchage à la salle d’urgence.