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Fin d’une époque : une congrégation religieuse quitte Cartierville après 90 ans

Père Jean Louis Nvougbia au milieux de trois membres de la congrégation religieuse des soeurs de miséricorde
Le curé Jean-Louis Nvougbia au centre avec à sa gauche sœur Monique Lallier, mère supérieure des sœurs de miséricorde et sœurs Huguette Lavoie et Huguette Beauchamp, membres du conseil de la congrégation religieuse. Photo: Amine Esseghir/Courrier Ahuntsic

Les membres de la congrégation religieuse des sœurs de miséricorde comptaient finir leurs jours à Cartierville, dans le bâtiment qui abritait leur mission depuis près d’un siècle. Malheureusement, les 40 dernières religieuses déménageront fin mars dans une résidence pour personnes âgées.

Les sœurs de miséricorde avaient cédé leur couvent pour 7 M$ à une société à numéro, en 2018. La congrégation religieuse devenait locataire du bâtiment. Le nouveau propriétaire avait lancé des travaux de rénovation pour mettre la bâtisse aux normes. Le but était d’héberger d’autres religieux âgés.

L’opération n’a pu être menée à bien. Les sœurs vivaient au milieu du chantier qui s’éternisait. Le nouveau propriétaire a déclaré faillite. Depuis, le syndic BLT Lapointe & Associés Inc. tente de vendre le bâtiment. Les membres de la congrégation religieuse doivent quitter les lieux. Elles partiront d’ici le 31 mars.

Le père Jean-Louis Nvougbia, curé de la paroisse de la Sainte Famille de Bordeaux-Cartierville a voulu leur dire un au revoir marqué lors d’une célébration religieuse. Devant plus de 250 paroissiens réunis à l’église Notre-Dame-des-Anges de Cartierville pour la messe du dimanche 23 février il déclare : «je sens le départ d’un de mes enfants qui va commencer une nouvelle étape dans sa vie. Je suis content aussi parce que sa mission est accomplie.»

Monique Lallier, mère supérieure des sœurs de miséricorde.
Monique Lallier, mère supérieure des sœurs de miséricorde. Photo : Amine Esseghir/Courrier Ahuntsic

Mission spéciale

La congrégation des sœurs de miséricorde a été fondée en 1846 par l’évêque de Montréal de l’époque Monseigneur Ignace Bourget et Rosalie Cadron-Jetté. La mission spécifique des sœurs consistait à accueillir des mères célibataires en difficultés et leurs enfants nés hors mariage.

Des femmes rejetées au nom de la religion par la société à l’époque, recueillies par des religieuses. «Leur vie communautaire est basée, tout comme les Jésuites, sur la spiritualité de Saint Ignace de Loyola, le discernement, l’élévation de la conscience, la prière contemplative et l’action concrète (…) contre le préjugé et le rejet», a signalé Sam Loutfi, membre de la famille internationale de miséricorde, un organisme laïc censé poursuivre l’œuvre des sœurs.

«La communauté ne meurt pas, assure sœur Monique Lallier, mère supérieure des sœurs de miséricorde. On déménage, mais notre œuvre continue.» Le déménagement a officialisé la transmission de l’œuvre à une corporation laïque.

Pour perpétuer la mémoire de Rosalie Cadron-Jette, un musée avait été créé et on pouvait visiter à la maison mère des sœurs.

«Le musée est défait depuis un an, mentionne sœur Monique Lallier. Les choses sont dans un entrepôt. Beaucoup d’objets iront au diocèse.» Elle est sûre que le musée sera repris. «Je ne sais pas par qui», admet-elle.

L’autre action entreprise par les sœurs a été le procès en canonisation de leur fondatrice. Sœur Monique assure attendre la suite des choses. Rosalie Cadron-Jetté a été déclarée vénérable en 2013 par le pape François. La procédure se poursuit.

Fin d’une époque

L’extinction d’une mission religieuse catholique n’a rien d’exceptionnel, croit Alain Crevier, journaliste à Radio Canada et spécialiste des questions religieuses. «C’est d’une tristesse infinie de voir ces grandes congrégations religieuses qui ont construit la fibre de la société québécoise disparaitre dans la totale ignorance et indifférence.»

Il soutient toutefois que des exemples de missions religieuses qui ont gardé leur empreinte existent. Il cite le cas des augustines à Québec. «C’est le plus bel exemple. Elles ont tout légué à la population à la seule condition que jusqu’à la dernière religieuse dans le monastère on maintienne l’action en santé et en bien-être.»

La multiplication des propriétés des organisations religieuses et l’importance de leurs biens font qu’il est difficile de préserver tout leur patrimoine bâti. «On voudrait convertir tous ces bâtiments en bibliothèques qu’il n’y aurait pas assez de livre pour les remplir», souligne M. Crevier.

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