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Paul-André Linteau: écrire pour épargner l’histoire de l’oubli

Paul-André Linteau, spécialiste de l'histoire de Montréal
Paul-André Linteau a écrit entre autres Une histoire de Montréal, un ouvrage réédité et enrichi depuis 2007. Photo: Amine Esseghir

Paul-André Linteau est connu pour être le plus grand spécialiste de l’histoire de Montréal. Il a été nommé récemment officier de l’Ordre de Montréal, une reconnaissance pour ce résident d’Ahuntsic qui a consacré sa vie à raconter le passé de sa ville.

Après autant de livres sur la métropole, est-ce que cette distinction était attendue?

C’est d’une certaine façon un hommage à tous les autres historiens qui travaillent sur le passé de Montréal et il y en a plusieurs. Mais moi, comme j’ai fait des ouvrages de synthèse entre autres, je me suis trouvé à intégrer toutes les recherches qui avaient été faites par les autres historiens, tout autant que des géographes ou des sociologues qui avaient travaillé sur la ville en les identifiant et en leur rendant justice. Dans le fond à travers ma candidature, c’est la reconnaissance des gens qui font l’histoire de Montréal.

À quoi cela sert-il de synthétiser les autres ouvrages?

Je rends les choses plus accessibles aux lecteurs. Le livre que je suis en train d’écrire en ce moment par exemple, est sur l’histoire de l’immigration au Québec, qui est beaucoup à Montréal. Il existe des centaines d’ouvrages sur le sujet, mais en silos. Il y a l’histoire des Juifs, des Italiens, des Haïtiens, etc. Très souvent, ce sont des personnes issues de ces communautés qui écrivent. Ils ont l’avantage de connaître la langue et ont accès à une documentation. Ce que j’essaye de faire, c’est d’aller au-delà des silos. Ça prend un esprit un peu particulier pour essayer de mettre ensemble des travaux très divers, mais qui montrent des tendances quand même.

Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire sur l’histoire de cette ville ?

J’aime Montréal. J’aime son côté un peu anarchique et disparate. Il n’y a pas une unité architecturale comme ou dans d’autres villes. Il y a une diversité qui témoigne de moments différents de construction. Quand je me promène dans le quartier, il est facile de voir les maisons de l’entre-deux-guerres et celles des années 1950 ou 1960. Elles se côtoient. Elles ont leur signature que j’ai appris à lire. Montréal, ce sont des millions d’histoires individuelles qui se sont traduites dans le bâti.

Quand je donnais le cours d’histoire à l’université, j’emmenais les étudiants sur le terrain en excursion pour voir les artefacts urbains et voir ce qu’ils nous disent. Dans des lieux comme le Vieux-Montréal, l’usage des artefacts aujourd’hui n’est pas du tout ce qui était à l’origine.

Est-ce qu’on préserve suffisamment cette mémoire inscrite dans la pierre ?

Préserver, c’est un combat très difficile. Il y a constamment des transformations des immeubles et ce n’est pas possible de tout conserver en état. Je pense qu’il faut investir beaucoup plus dans l’interprétation, dans la mise en valeur de ce qui est là, avec des panneaux explicatifs qu’on peut lire en se promenant.

Est-ce qu’on pose assez de panneaux en ville ?

Il y a ici et là des petits panneaux, mais je trouve qu’à Montréal il n’y en a pas suffisamment. Quand on compare avec Paris, il y a régulièrement des panneaux historiques devant des édifices. Beaucoup de ceux qui existent à Montréal sont faits par des organisations privées. Il y a quand même une vingtaine d’années, on a réussi à obtenir pour les parcs des panneaux qui donnent des renseignements sur le personnage qui est honoré. On peut raconter l’histoire à travers la toponymie. Mais pour les rues on ne l’a pas. Il n’y a pas ce réflexe de raconter l’histoire du milieu dans lequel on se trouve.

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