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Remboursement d’impôt : payer pour s’informer

Retour d'impot sur l'abonnement aux nouvelles
L'abonnement aux nouvelles numérique semblent bien fonctionner pour le Devoir. Photo: Capture d'écran

S’acheter un abonnement à des nouvelles numériques canadiennes permet d’obtenir un remboursement d’impôt. Cela peut être perçu comme un encouragement à consommer de l’information en ligne payante. Toutefois, la tendance à lire gratuitement les articles sur le Web se maintient.

La disposition a été mise en place cette année pour les paiements effectués en 2020. Elle est en vigueur jusqu’en 2024.

Un abonné aux nouvelles payantes en ligne peut demander un crédit d’impôt non remboursable. Toutefois seule une organisation journalistique canadienne qualifiée (OJCQ) émet des factures admissibles.

Ces entreprises doivent être mentionnées sur le site de l’Agence du revenu du Canada.

«Ils ont une liste, mais elle n’est pas à jour, prévient la spécialiste supérieure de l’impôt chez H&R Block, Josée Cabral. Il y a plusieurs médias qui ne sont pas dans la liste et qui se qualifient.»

Le contribuable peut présenter un total de facture pouvant atteindre 500$. Le remboursement d’impôt est de 15%, au même niveau que celui pour les dons de bienfaisance.

«Les reçus que j’ai aperçus jusqu’à maintenant sont très bas. J’ai vu des factures de 12$», confie Mme Cabral.

Il faut aussi distinguer dans les médias la partie digitale, qui est celle qui donne le droit au remboursement. «Les gens sont parfois abonnés à un journal papier et une version numérique. Il faut tenir compte de ce fait», souligne la spécialiste en fiscalité.

Bonne nouvelle?

Cependant, la disposition est bien accueillie, notamment par Patrick White, professeur à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal.

«C’est un pas dans la bonne direction. Cela fonctionne avec le Devoir, La Presse, La gazette de Montréal, ou les six journaux membres des coops de l’information», énumère-t-il.

Il émet toutefois un bémol. Les gens préfèrent toujours lire des nouvelles gratuites. «Les analyses nous montrent que 85% des Nord-Américains, incluant les Canadiens, ne sont pas prêt à payer pour s’informer en ligne», tempère-t-il.

C’est un choix qui a été fait à la naissance d’Internet et qui crée une habitude.

«Si bien que ceux qui ont essayé de faire des pay wall, lecture payante, ça n’a pas marché», convient le président de la Fédération des journalistes du Québec (FPJQ), Michaël Nguyen.

Par ailleurs, considérer cette disposition fiscale comme un incitatif à s’abonner aux médias numériques, cela ne change pas forcément un mode de consommation. S’informer n’est pas un investissement, estime la spécialiste des impôts, Josée Cabral.

«Les gens ne s’abonnent pas pour recevoir ce crédit d’impôt. On ne peut pas comparer cela à un REER dont la rentabilité est plus importante et c’est de l’argent pour notre futur.»

Mais lire les journaux n’est pas totalement inutile, rappelle le président de la FPJQ.

«Un citoyen qui vote c’est bien, un citoyen informé qui vote, c’est mieux.»

Il observe que les médias traditionnels qui diffusaient largement leurs contenus souffrent aujourd’hui des chutes des revenus publicitaires accaparés par les géants du Web (Google, Amazon, Facebook, etc). L’abonnement serait alors une voie de salut pour les journaux comme pour les citoyens.

Autre voie

«Le modèle basé sur la publicité est terminé. Il faut penser à l’extérieur de cela», martèle le professeur de journalisme, Patrick White. Il croit aussi que l’aide directe des gouvernements est plus efficace pour maintenir en vie les médias et leur permettre d’accomplir leur mission.

«Devant l’aide fédérale de 600 M$, ou provinciale de 250 M$, c’est une goutte dans l’océan, mais si ça peut aider les gens à s’abonner, c’est une bonne nouvelle.»

Voir apparaître dans la province de huit millions d’habitants un Médiapart québécois, un journal français en ligne qui offre un contenu exclusif et qui ne vit que des abonnements de ses lecteurs reste hypothétique.

«C’est toujours plaisant de voir des nouveaux médias qui naissent, mais en même temps, c’est une réalité difficile. Quelle est la proportion de population qui s’abonnerait pour faire vivre une salle de nouvelles?», s’interroge le président de la FPJQ.

Les médias québécois qui ont entamé leur virage numérique depuis quelques années peinent encore à trouver le modèle d’affaires efficace.

«Ici ou ailleurs, si on exclut le Wall Street Journal, le New York Times ou le Washington Post, tout le monde cherche encore ce modèle», remarque M. Nguyen.

Et si une entreprise trouve sa voie, il n’est pas dit qu’elle soit bonne à prendre pour tous.

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