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Peindre un nouveau système de santé

Photo: Gracieuseté

Le système de santé québécois tel qu’on le connaît, réformé il y a plus de 40 ans par Claude Castonguay, a mal vieilli.  Le résident de L’Île-des-Sœurs depuis 20 ans qualifié de «père de l’assurance-maladie», juge qu’on devrait s’inspirer des pays scandinaves en révisant le rôle et la rémunération des médecins, notamment.

Dans un contexte où la population est vieillissante et que les histoires d’horreur sont légion dans les CHSLD, M. Castonguay croit que le réseau, un des plus complexes au pays, n’a su s’adapter aux changements.

«À l’époque, on avait fait beaucoup d’innovations. Des gens de l’étranger venaient observer ce qu’on avait fait. Mais c’est devenu une espèce de fierté, une vache sacrée. C’est difficile maintenant d’y toucher, les gens y tiennent, c’est un symbole», indique cet acteur de premier plan de la Révolution tranquille.

La santé représente la plus grande portion du budget du gouvernement, mais des modifications doivent être apportées pour éviter de toucher aux services à la population d’après M. Castonguay.

«Il y a eu de l’exagération par rapport à l’augmentation des salaires des médecins. Alors qu’on serre la vis de tout le monde dans le système de santé avec des augmentations de 1% par année. En plus, ils sont payés à l’acte, c’est le vieux système qui existait avant l’assurance-maladie qui a persisté et aujourd’hui, dans bien des cas, les actes médicaux, ça ne tient plus», soutient l’actuaire à la retraite.

Selon lui, la médecine est maintenant multidisciplinaire contrairement aux années 1970, les médicaments ont pris beaucoup plus d’importance et les technologies, plus dispendieuses, sont disponibles souvent que dans des centres spécialisés.

Solutions
Le Québec aurait avantage à s’inspirer des pays comme la Norvège, la Suède ou la Finlande pour le mode de rémunération mixte des médecins, qui deviendraient des salariés avec des bonus à l’acte plutôt que des travailleurs autonomes.

Parmi les autres pistes de solutions qu’avance Claude Castonguay, on retrouve des horaires de travail variables selon les charges d’enseignement, une révision en profondeur de la Loi canadienne sur la santé ainsi qu’une baisse de la consommation de médicaments.

«Les élus ont peur de toucher aux médecins. Ils sont partout, ils peuvent rencontrer tout le monde et les influencer. Il y a eu un manque terrible de la part des gouvernements à cet égard», prétend M. Castonguay.

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Visionnaire
La courte carrière politique de 4 ans de Claude Castonguay comme député de Louis-Hébert à Québec au début des années 70 lui aura permis de réformer bien plus que le système de santé. Dans la foulée, on lui doit aussi le Code des professions du Québec pour faciliter la gestion et les négociations avec les différents corps de métier.

Après ses études en économie, il se rend au Manitoba pour étudier l’actuariat, un des seuls endroits où se donnait la formation. À son retour, en 1951, il crée le premier cours dans le domaine au Québec à l’Université Laval. Claude Castonguay n’a alors que 21 ans.

«L’actuariat c’est l’analyse de risques dans plusieurs domaines et particulièrement en assurances. Pendant mes études, la question des assurances sociales m’intéressait beaucoup.»

Il fondera ensuite avec des associés le premier bureau d’actuaire-conseil à Montréal qu’il quittera pour aider à mettre sur pied la Caisse de dépôt.

«Au début des années 60, l’idée avait été lancée, mais on ne disposait pas de fonds. J’ai proposé au premier ministre de l’époque, Jean Lesage, de créer un régime de rentes pour les travailleurs. L’argent accumulé pourrait être placé par la Caisse de dépôt et ça permettrait de la démarrer», raconte M. Castonguay.

Plus tard, il est désigné par un premier ministre Daniel Johnson débordé par l’organisation d’Expo 67 pour présider la commission Castonguay-Nepveu sur la santé. Les demandes étaient alors nombreuses pour ouvrir des hôpitaux et rendre plus accessibles les services à l’ensemble de la population.

Tel qu’il l’avait promis à sa famille, il n’a fait qu’un seul mandat en politique. Il a occupé successivement les postes de ministre de la Santé et des Affaires sociales. Il devient ensuite président de la Banque Laurentienne avant d’être nommé sénateur en 1990 pour rapatrier la constitution avec l’accord du Lac Meech.

Vers un meilleur Québec
«Il en reste beaucoup à faire au Québec, mais quand on regarde d’où on est parti, on a fait énormément de progrès. Il ne faut pas perdre confiance», explique le grand-père de cinq petits-enfants.

À 87 ans, il écrit toujours des chroniques dans La Presse. Il croit que l’avenir de sa nation passe par la valorisation de l’éducation et de la jeunesse.

«Les jeunes ont un rôle important à jouer dans l’évolution. Je donne encore des conférences dans les universités et je suis toujours impressionné par ceux que je rencontre. Ils sont rendus partout, ils voyagent, c’est très sain.»

Malgré ses critiques, Claude Castonguay croit que sa carte-soleil, ou comme on l’appelait à l’époque sa «castonguette», a encore sa place tout comme le modèle de soins universel.

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