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«Créer des ponts»: des commerces vides pour les artistes

Dana Edmonds à côté de son œuvre, Zero Tinder, dans la galerie au centre commercial Alexis Nihon. Photo: Lila Maitre/Métro Media

L’art peut être partout. C’est bien ce qu’a voulu démontrer l’organisme Art Souterrain avec son nouveau projet Créer des ponts. Jusqu’au 15 octobre, une soixantaine d’artistes émergents investissent des locaux commerciaux vacants répartis majoritairement dans le centre-ville de Montréal. Ces locaux leur donnent un lieu d’atelier et aussi d’exposition

Passerelle

Il est de ces endroits où l’on ne s’attendrait pas à voir des œuvres d’art. Mais les artistes d’Art Souterrain n’ont pas peur de créer la surprise. Que cela soit au milieu d’un centre commercial ou à l’entrée d’une tour de bureau, ils arborent fièrement leurs œuvres. De l’installation vidéo à la peinture en passant par la sculpture et l’art imprimé, tous les médiums sont acceptés.

Ce projet est né du désir d’exporter l’art vers de nouvelles places. Depuis sa création, Art Souterrain cherche à afficher des œuvres d’art dans l’espace public. Avec Créer des ponts, une nouvelle étape est franchie. L’organisme a choisi de sélectionner des locaux situés dans des endroits populaires, mais qui ne disposent pas forcément d’une grande offre artistique. « On a travaillé à l’intérieur [du centre-ville] mais en concentrant nos efforts dans des lieux qui sont souvent un peu boudés […], on a identifié des commerces du côté d’Atwater, sur la rue Crescent, du côté du Vieux-Montréal. », indique le fondateur et directeur général d’Art Souterrain, Frédéric Loury.

La peintre et graphiste Dana Edmonds remarque bien que des personnes qui n’ont pas l’habitude des galeries d’art viennent découvrir ses œuvres. Son commerce-atelier est situé au milieu du centre commercial Alexis Nihon, elle partage l’espace avec une autre artiste, Florence Gagnon. Paradoxalement, ses peintures abordent des thèmes sur la société de consommation. Dans ses compositions, on retrouve une multitude de déchets, assemblés telle une nature morte. Dans ses plus récentes œuvres, une figure humaine, la sienne, apparaît. Elle se penche également sur les sujets autour de la santé mentale, et son lien avec les déchets.

L’œuvre de Myriam Simard-Parent, dans un cube installé devant le complexe Desjardins. Métro Media – Lila Maitre

La plupart des visiteurs viennent jeter un coup d’œil à son travail entre deux sessions magasinages. «Ils entrent souvent dans la galerie et me disent qu’ils adorent quelque chose, ou me demandent ce que veut dire une autre chose, et je leur explique. Je deviens l’interprète de mon propre travail.».

Pourtant elle remarque encore une certaine timidité chez les visiteurs. «J’ai l’impression que certaines personnes sont intimidées par l’art ou ne le comprennent pas forcément […] mais le fait d’être dans la galerie pour l’expliquer donne un aspect plus personnel.».

Des cubes ont aussi été installés à divers endroits de la ville. Il s’agit d’œuvres disposées dans un cube en verre, ce qui permet aux passants de tourner autour. Celle de Myriam Simard-Parent, par exemple, devant le Complexe Desjardins, est une sculpture en bois, Nature Morte. En s’approchant, on remarque des végétaux, champignons et autres éléments récurrents dans la nature morte classique. Mais l’artiste a fait le choix de les sculpter dans une taille disproportionnée.

Ateliers

En plus de faire office de galeries d’art pour l’exposition Créer des ponts, les locaux alloués aux artistes leur servent aussi d’atelier. L’artiste Michelle Lasalle, dont la galerie se situe dans l’édifice Viger, connaît moins d’achalandage qu’à Alexis Nihon.

Le calme et l’immensité de l’espace, qu’elle partage avec un duo d’artistes, Catherine Lejeune et Marie Atcheba, lui permettent alors de se concentrer sur son travail artistique et universitaire. «J’ai vraiment ce moment-là pour être dans une bulle et sans distraction».

En utilisant l’estampe, elle développe sa réflexion autour de la mémoire. Elle se sert de photographies d’archives, les siennes ou celles de sa famille, qu’elle dérive avec l’art imprimé.

Même si l’atelier de l’avenue Viger ne dispose pas du matériel pour faire de l’estampe, l’artiste utilise son studio pour le travail de couture dans le cadre d’un livre d’artiste, et pour préparer sa thèse universitaire en art.

Selon Frédéric Loury, il était important de soutenir les artistes émergents dans l’accès à des ateliers, alors qu’il devient difficile d’en trouver des abordables à Montréal. Face à la difficulté de se procurer un espace de travail pour les jeunes artistes, reprendre un local vacant est devenu pour Art Souterrain une alternative.

De plus, utiliser des commerces vides à des fins artistiques aide à la relance du centre-ville. «Les gens vont découvrir des œuvres d’art à défaut de voir simplement un panneau à louer, donc il y a un effet d’embellissement qui est très porteur pour les commerces avoisinants.», indique le directeur d’Art Souterrain. Il espère qu’avec ce projet pilote, les propriétaires montréalais et québécois encourageront les artistes à reprendre les locaux commerciaux.

Chaque artiste ouvrira son espace une fois par semaine, il est possible de retrouver les horaires et la carte sur le site Internet d’Art Souterrain.

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