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Dur temps pour les locataires de l’Est

Loyer
Dans les derniers jours, des appels à la grève du loyer se sont faits entendre. Photo: Messager Lachine & Dorval – Archives

Dans l’est de Montréal, la moitié des locataires vivent seuls, et plus du tiers des ménages doivent se débrouiller avec un revenu de moins de 30 000$. Le très bas taux d’inoccupation du parc locatif laisse de plus présager une « pénurie critique », selon plusieurs organismes de lutte pour le droit au logement.

Le profil du locataire type montréalais, tel que présenté dans la nouvelle étude de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) publiée le mercredi 3 avril, montre un portrait relativement semblable dans tous les secteurs de l’île.

La majorité des locataires de la grande région de Montréal sont des personnes vivant seules, et dans 60 % dans le cas, avec des revenus inférieurs à 50 000$, selon l’auteur de l’étude, Francis Cortellino.

« Ce qui a été surprenant, c’est de voir à quel point le portrait est homogène. Partout, on voit une majorité de gens seuls, à faible revenu. Aucun secteur ne se démarque. » – Francis Cortellino, auteur de l’étude de la SCHL

La pauvreté est toutefois un peu plus criante à Montréal-Nord, où plus de 40% des ménages vivent avec des revenus inférieurs à 30 000$, alors que la moyenne montréalaise avoisine 36%. Les autres arrondissements de l’Est se situent autour de la moyenne montréalaise.

Les données indiquent également que les ménages locataires ayant de faibles revenus déménagent un peu moins que les autres ménages. S’ils le font, 92 % des locataires de la ville de Montréal aux revenus inférieurs à 30 000 $ demeurent dans le même secteur.

Une situation qui confirme la volonté de ces ménages de demeurer dans leurs quartiers, mais que la gentrification, doublée de la pénurie actuelle rend de moins en moins possible, selon la porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), Véronique Laflamme.  « Cela exerce de la pression sur les quartiers moins chers », déplore-t-elle. Les locataires qui y sont déjà veulent rester, mais ils doivent rivaliser avec ceux qui ont un peu plus de moyens financiers et qui fuient les quartiers où les loyers sont devenus trop élevés. La tendance, déjà bien entamée à Hochelaga-Maisonneuve, se dessine ailleurs dans l’Est, ajoute-t-elle.

Une pénurie inquiétante
Le manque de logement, constaté lors de la publication des dernières données de la SCHL, en octobre dernier, inquiète également tous les organismes consultés.

À Montréal, le taux d’inoccupation des logements approche 2%, significativement sous le « taux d’équilibre » de 3%, en deçà duquel on considère qu’il y a pénurie. Moins de 1% des logements sont libres à Anjou, Mercier et Montréal-Est.

À Anjou et Saint-Léonard, le taux est encore plus bas pour les logements de trois chambres et plus, déplore Simon Dumais, organisateur communautaire chez Infologis. À Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, ce ne sont que 0,2% des logements familiaux qui sont libres.

Les données tendent à montrer un marché plus favorable à Montréal-Nord, seul arrondissement où le taux d’inoccupation est supérieur au taux d’équilibre. La SCHL souligne toutefois que les données relatives à cet arrondissement sont d’une fiabilité seulement « passable » et doivent être utilisées « avec prudence. »

Ce résultat étonne d’ailleurs Marie-Ève Lemire, organisatrice communautaire au Comité Logement Montréal-Nord. « Les années précédentes, les gens ici trouvaient des logements, mais pas cette année, affirme-t-elle. On voit le phénomène de repossession de logement prendre de l’ampleur; j’avais habituellement deux ou trois cas chaque année, cette année j’ai répondu au moins à 15 personnes à ce sujet. »

Mais logements à louer ne veut pas dire à prix abordable. Dans un rapport de décembre dernier, la SCHL souligne que les logements disponibles sont au moins 15% plus chers que la moyenne.

« On craint de voir des familles à la rue, et les locataires seuls sont pris à la gorge. On est loin de répondre aux plus de 3000 ménages de l’Est qui payent plus de 50% de leurs revenus pour se loger. »
– Simon Dumais, organisateur communautaire chez Infologis

Quelle solution?
La situation ouvre la porte à une augmentation de la discrimination, prévient Maxime Roy-Allard, porte-parole du Regroupement des Comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ).

« On remarque des annonces qui demandent sans enfants, par exemple, se désole-t-il. Souvent c’est insidieux, on visite et on ne se fait pas rappeler. C’est difficile de prouver qu’il y a eu réelle discrimination, les locataires ne veulent pas se lancer dans de telles démarches. »

Son organisme rencontre prochainement la Ville de Montréal pour lui demander de faire pression sur Québec afin qu’il mette en place un registre des loyers. Un tel mécanisme de contrôle serait simple à créer, selon lui, puisque Québec détient déjà les informations nécessaires grâce au relevé d’impôt 31.

L’importance d’investir en logement social fait l’unanimité chez les intervenants. S’ils se disent « soulagés » de l’investissement du gouvernement Legault inscrit au dernier budget, ils le jugent insuffisant.

« Ils ont annoncé 10 000 unités de logement social pour les sept prochaines années, mais ce n’est que du rattrapage sur les 15 000 déjà prévues et non livrées dans les budgets précédents », déplore M. Roy- Allard.

Tout comme le FRAPRU, le RCLALQ milite pour la construction de 50 000 unités supplémentaires.

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