Mimo, le jongleur de La Petite-Italie
À 33 ans, Gabriel Boileau, alias Mimo, n’est pas un jongleur comme les autres. Pas de scène, de grands rideaux rouges, ni de projecteurs pour cet artiste multidisciplinaire. Son terrain de jeu, c’est la rue, été comme hiver. Il se produit devant les automobilistes et les passants, le temps d’un feu rouge.
Coin Saint-Laurent et Dante, un homme se place au milieu de la traverse piétonnière.
Après un salue rapide, il commence à faire valser des balles. Une, deux, trois, quatre, puis cinq.
Le numéro ne dure que quelques secondes, car du coin de l’œil, le jongleur guette la fin de la lumière.
Tout juste avant que le feu tourne au vert, il se faufile rapidement entre les voitures dans l’espoir de récupérer un peu de monnaie. Ce scénario, Gabriel Boileau le répète depuis plus de quatre ans.
Certains automobilistes le récompensent, d’autres sourcillent et l’ignorent, mais il se fait rarement vilipender.
«C’est surtout des sourires. Il y en a qui baissent la fenêtre et qui me disent: « je n’ai rien à te donner, mais c’était fantastique, bravo ». Ou alors, on me dit souvent: « lâche pas, bon courage ».»
Il faut dire qu’à moins 15 degrés Celsius, difficile de jongler dehors, les mains se réchauffant mal sous les minces mitaines.
«Je veux égayer la journée des gens. C’est un travail plus spirituel que monétaire. Je veux apporter un peu de moi et de joie aux autres. Si c’était juste pour l’argent, j’aurais déjà arrêté ou je ne le ferais pas l’hiver», explique-t-il.
Gagne-pain
Sur le trottoir, plusieurs l’observent furtivement, parfois plus longuement. Une chose est sûre, Mimo ne passe pas inaperçu. «Je l’ai déjà vu quelques fois, indique Jérôme, un passant. C’est cool. Il faudrait qu’il y en ait plus pour égayer les coins de rue.»
Un point sur lequel s’accorde Élise, venue magasiner avec son fils. «Je trouve cela plutôt original», estime-t-elle.
M. Boileau se produit environ cinq heures par jour pour remplir son chapeau.
Les bonnes journées, il gagne en moyenne 40 dollars l’heure, sans toutefois de garanties.
«J’ai déjà récolté seulement sept dollars en une heure. Là par exemple, j’ai fait six cycles de feu de circulation et j’ai eu moins de quatre dollars», constate-t-il.
Tomber dans la marmite
Gabriel Boileau a commencé la magie à neuf ans à Val-David, son village natal. Un choix qui lui semblait naturel dans une famille où père et sœur sont photographes, et mère et frère, marionnettistes.
Jongleur autodidacte, il suit aussi des cours de mime à l’âge de 15 ans avec le célèbre Claude St-Denis.
Depuis, il continue de se perfectionner et donne des ateliers à l’école du cirque de Verdun.
S’il profite de l’instant présent, il aspire toutefois à entrer dans la famille des artistes professionnels.
Son rêve: monter un grand spectacle inspiré du célèbre mime Marceau où se mêleraient la magie et la jonglerie de cartes.
En attendant, il continuera à faire voler ses balles dans le ciel de La Petite-Italie.