Itinérance: les organismes du Centre-Sud sont au bout du rouleau
Plus de 500 000 interventions par année: voilà l’effort herculéen déployé par les organismes luttant contre l’itinérance dans le Centre-Sud, démontre un rapport dévoilé aujourd’hui. Mais malgré l’augmentation des ressources, l’aggravation de la crise du logement est telle qu’ils peinent à répondre à la demande de services.
Le rapport publié aujourd’hui par l’Observatoire québécois des inégalités et la Corporation de développement communautaire du Centre-Sud dresse un portrait sombre. Comme d’autres, il souligne l’augmentation fulgurante du nombre de personnes en situation d’itinérance ou à risque de le devenir.
Et le profil des personnes qui se présentent aux différentes ressources est de plus en plus varié. En plus des hommes adultes, qui forment la majorité de la population itinérante, les organismes notent une présence accrue des femmes, des jeunes, des aînés, des membres de la communauté LGBTQ+, des étudiants du cégep ou de l’université, des familles, des réfugiés, des Autochtones et des travailleurs. Les personnes n’ayant jamais eu de problèmes de santé mentale ou de consommation sont aussi plus présentes.
«Depuis le retour de la pandémie, tous les problèmes s’accélèrent», note François Bergeron, directeur de la CDC Centre-Sud.
Toujours en situation d’urgence
«Ce que les organismes nous disent, c’est qu’ils sont toujours à 100%», ajoute M. Bergeron. «Avant, ils étaient généralement à 75 ou 80% de capacité. Ça leur laissait une marge de manœuvre. Maintenant, cette marge a disparu et ils sont constamment en train de répondre aux urgences.»
En plus du manque d’espace pour loger les personnes dans le besoin, les organismes font face à d’autres problèmes qui complexifient leurs interventions. Par exemple, la crise des surdoses. Ou encore la montée de l’intolérance à l’égard des minorités de genre, de sexe et d’orientation sexuelle.
Malgré ces obstacles importants, les organismes du Centre-Sud font preuve de résilience en poursuivant leurs efforts pour maintenir, pour adapter et pour bonifier leurs services afin de répondre à des besoins toujours plus criants et en évolution. Au fil du temps, leur travail soutenu a permis de tisser un filet de sécurité sociale formant un réseau complémentaire et interdépendant fondé sur une étroite collaboration.
Extrait du rapport Portrait de l’itinérance dans Centre-Sud : des chiffres sur une crise humaine sans précédent
Adopter toutes les promesses pour contrer l’itinérance
La plupart des partis qui se battent pour la mairie de Montréal promettent d’augmenter les ressources dédiées au logement et à la lutte à l’itinérance. En plus de construire des unités, Projet Montréal promet de doubler le financement des organismes communautaires et de le garantir pour trois ans. Ensemble Montréal et Transition Montréal proposent de le tripler.
M. Bergeron ne s’avance pas sur le parti qui offre le meilleur programme pour lutter contre l’itinérance.
«Les promesses, on les prendrait toutes», dit-il. «On peut doubler le budget ou le tripler, mais ce qui importe le plus, c’est d’avoir de la prévisibilité.»
Collaboration avec Québec et Ottawa
M. Bergeron souhaite surtout voir les trois paliers de gouvernement travailler de concert pour régler la crise.
«Peu importe qui est élu à Montréal, ça va prendre un engagement du fédéral et du provincial. Et un engagement à faciliter le transfert des sommes entre tous ces paliers.»
On est dans une situation d’urgence nationale.
François Bergeron, directeur de la CDC Centre-Sud
Cet été, la Ville de Montréal a installé ses premières unités modulaires sur le site de l’ancien hippodrome Blue Bonnets grâce, entre autres, à du financement du ministère de la Santé et des Services sociaux et de la Société d’habitation du Québec. Montréal a aussi obtenu 128 M$ du gouvernement fédéral pour préparer les infrastructures qui desserviront les futurs logements à construire dans ce secteur.
M. Bergeron aimerait toutefois voir une collaboration avec une stratégie commune plutôt que des mesures annoncées à la pièce.
La CDC du Centre-Sud regroupe les organismes desservant le territoire situé entre le boulevard Saint-Laurent, la rue Sherbrooke, la rue Lespérance et la rue Notre-Dame, excluant le Vieux-Montréal.