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Nouveau chapitre à la Taverne Jarry

Photo: Arnaud Stopa TC Media

Des grandes victoires politiques aux lents changements sociaux du quartier, la taverne Jarry a toujours été au centre de la vie sociale de Villeray. Mais après 52 ans dans la famille de Jean Marcel Denis, le flambeau est passé à de nouveaux propriétaires.

«Lorsque mon père a repris la taverne, il n’y avait ni métro, ni métropolitaine, se souvient le récent retraité, accoté à son bar, bière à la main. Il n’y avait pas de grandes fenêtres, ni de toilettes pour femmes!»

Depuis son ouverture, le débit de boisson a vu évoluer Villeray et sa clientèle. Les travailleurs ont laissé place aux jeunes, les Labatt 50 ont été remplacées par une vingtaine de bières de microbrasserie.

«Le quartier a beaucoup changé, c’est comme si le Plateau se déversait chez nous. Les bars branchés se sont installés, mais ici, on est un bar débranché», a indiqué avec humour l’ancien patron, assis sur une chaise datant de l’époque de la reprise du commerce.

Sports et télé
Le cœur de la Taverne, c’est peut-être le câble, celui qui permet de diffuser le le hockey. «Il y a un peu plus de soccer et à une époque, c’était beaucoup le baseball. Mais les Canadiens, avec le popcorn qu’on offre gratuitement, ont toujours eu leur place ici» a soutenu le natif et toujours résident de l’Ile-Bizard.

Mais le sport n’est pas tout. Dans les années 1980, Jean Marcel Denis a lancé le Labo, qui permettait à de jeunes artistes de faire leurs premières scènes.

«C’est ce que j’aimais de la Taverne, a dit Pierre Gélinas, un client de longue date. Un soir, c’était le hockey, puis le lendemain, j’avais de la musique.»

Aujourd’hui encore, la Taverne ouvre ses portes aux jeunes artistes, dont les humoristes. «Nous avons toujours été ouverts à tous ceux qui voulaient faire une activité, ici» a soutenu l’ancien propriétaire.

Un incontournable
Le local, aussi bien fréquenté par René Lévesque lorsqu’il fut député libéral de Laurier que par Justin Trudeau lorsque son bureau de comté se trouvait en face, a aussi une notoriété auprès des milieux politiques.

«C’est un passage obligé pour les politiciens lors des élections. Gilles Duceppe, Pauline Marois ou encore les Trudeau sont venus ici. Nous avions même fêté la victoire d’Elsie Lefebvre comme députée péquiste. C’était inimaginable, à l’époque, que le Parti québécois prenne la circonscription quand on regarde le profil démographique», a analysé l’ingénieur de formation concernant ce bastion libéral.

Si Jean Marcel Denis a des projets pour sa retraite, il reste cependant proche de la nouvelle direction, reprise par des Villerois, à qui il donne un coup de main dans la gestion. Mais la Taverne ne risque pas de se métamorphoser, selon l’un des partenaires d’affaires, Marco Arnaldo. «On a apprécié l’esprit et le potentiel de la place. On souhaite faire évoluer avec quelques idées.»


Une lente évolution
Jusqu’en 1979, année où la loi permait enfin aux taverniers de servir de l’alcool aux femmes, les tavernes étaient des sanctuaires pour hommes. Celle au coin de Jarry et Lajeunesse a d’ailleurs longtemps résisté a ce changement des mœurs québécoises, comme beaucoup d’autres lieux de boisson à l’époque. Elle ne s’est conformée qu’en 1986. Quant à sa première serveuse, Rosanne Nadeau, elle n’a été embauchée qu’il y a trois ans.

«Ici, c’était des travailleurs de l’aristocratie ouvrière, des gens du quartier qui venaient boire leur grosse 50 pour sociabiliser et dépenser une partie de leur paie du jeudi.»

La loi interdisant les femmes dans les tavernes a d’autant plus pris d’importance pour la famille Denis lorsque le patriarche décède quatre ans après la reprise du commerce. «J’ai repris l’affaire avec ma mère. Mais j’avais 16 ans à l’époque et ni moi ni ma mère ne pouvions rentrer légalement dans notre commerce.»

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