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Docteur Canadien et Mister Hyde

MONTREAL, QC - FEBRUARY 22: Karl Alzner #22 of the Montreal Canadiens skates against the New York Rangers during the NHL game at the Bell Centre on February 22, 2018 in Montreal, Quebec, Canada. The Montreal Canadiens defeated the New York Rangers 3-1. (Photo by Minas Panagiotakis/Getty Images) Photo: Getty Images

Une des choses que j’ai le plus entendues cette année de la part des partisans, c’est celle-ci: on ne sait jamais quel Canadien va se présenter. Le bon Canadien, inspiré par Brendan Gallagher, qui fait croire à ses partisans le temps d’un match que ça y est, que c’est reparti pour de bon? Ou le pas bon Canadien, qui fait se demander à Michel – un employé de bureau qui joue à la défense dans une ligue de garage aux 4 glaces de Brossard le jeudi à minuit – s’il ne ferait pas mieux que Karl Alzner si Marc Bergevin daignait lui offrir un contrat à l’essai le temps de quelques matchs?

Je serai le premier à vous dire que je trouve ça frustrant moi aussi. Or, en considérant le tout avec philosophie, il est bien normal que Canadien soit si différent d’un match à l’autre. Comme le disait le philosophe grec Héraclite à la fin du VIe siècle avant Jésus-Christ, «on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve», car l’eau n’est jamais la même. C’est aussi vrai de Canadien. Pensez-y: l’alignement a-t-il été similaire au cours de deux matchs depuis le début de la saison? En fait, faudrait vérifier – je m’excuse, je n’avais pas le temps de le faire avant l’heure de tombée de l’article. Y a peu de chance, toutefois.

Or, même si on parvenait à démontrer que ce fut le cas, est-ce qu’on pourrait parler du même Canadien? Du même en tant que même? Non. C’est que le monde est transformation constante – mieux, la vie est devenir. Le philosophe français François Jullien, dans son essai Les transformations silencieuses, rappelle avec justesse que nous, Occidentaux, ne voyons rien de ce qui se passe sous nos yeux, car nous sommes épais. Prenons comme exemple une simple période de jeu au hockey, période au cours de laquelle un joueur peut très bien se péter la tête dans la bande à la suite d’un double-échec violent. Or, ce joueur sera-t-il le même à la fin de la période, même si on l’a laissé la terminer sous prétexte qu’il avait l’air ben correct?

On aime à penser que oui, mais non.

En ce sens, François Jullien invite les lecteurs à prendre exemple sur la société chinoise, qui a une autre manière de voir le monde. Les Chinois portent en effet davantage attention aux multiples transformations qui font que la vie est vie, plutôt qu’aux événements marquants de l’existence. Par exemple, si les Chinois observaient ce qui se passe actuellement chez Canadien, ils s’efforceraient d’apprécier la reconstruction en train de se faire plutôt que l’événement marquant que sera peut-être un jour la conquête d’une
25e Coupe Stanley.

J’espère, pour lui, que Claude Julien pense comme François Jullien. Sinon, comme le chantait Mitsou: «Regarde les Chinois!» mon Claude.

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