Des parents à bout de souffle
Entre les tests de dépistage de COVID-19 à répétition pour ses enfants et ses absences répétées au travail, Audrey, mère de deux jeunes enfants, est constamment sur la corde raide. Non seulement elle craint de perdre son emploi, mais elle a aussi peur pour sa santé mentale, qui s’est détériorée au cours de la dernière année.
Depuis le début de l’année 2021, Audrey s’est fait appeler treize fois par le centre de la petite enfance (CPE) pour se faire dire qu’un de ses enfants avait des symptômes s’apparentant à ceux de la COVID-19. Chaque fois, elle doit se présenter au CPE dans la prochaine heure pour venir récupérer son enfant. «Je suis en plein milieu d’une réunion et je dois dire à tout le monde que je dois quitter là, là…», raconte Audrey. «Je viens tout juste d’avoir un nouvel employeur et je n’arrête pas de manquer des journées de travail. Je doute que ma patronne va vouloir renouveler mon contrat.»
Ma santé mentale n’en peut plus. Je fais des crises d’anxiété et je vis continuellement avec la peur de décevoir tout le monde.
Audrey, mère de deux jeunes enfants
Le conjoint d’Audrey, qui est conseiller pédagogique, vit sensiblement la même situation dans son milieu de travail. «Mon chum manque au moins une journée chaque deux semaines. Il était censé avoir une promotion, mais finalement il ne l’aura probablement pas: “il n’est pas fiable!”». Son conjoint a également épuisé toute sa banque de congés de maladie et prend depuis longtemps des congés à ses frais.
Afin de diminuer les conséquences financières de la situation, le couple a décidé d’engager une gardienne pour leurs enfants.
Ça nous coûte moins cher d’engager une nounou que de perdre trois jours de travail à chaque fois.
Audrey
«Une épée de Damoclès au-dessus de la tête»
Simon et sa conjointe vivent eux aussi les multiples conséquences de la pandémie sur leur organisation familiale. Leur fille est à la garderie, alors que leur garçon fréquente l’école primaire Louis-Colin, dans le quartier Ahuntsic à Montréal. Certaines écoles primaires font partie du projet pilote mis en place par le gouvernement pour offrir des tests de dépistages rapides aux élèves. Ce n’est malheureusement pas le cas pour l’école Louis-Colin.
Depuis le début de l’année, les enfants de Simon ont passé environ six tests de dépistage chacun. Chaque test représente environ quatre jours que lui et sa conjointe doivent passer à la maison. Pour minimiser les impacts sur leur travail, ils ont commencé à faire tester leurs enfants «au privé». Les tests express coûtent 260$ environ, mais assurent une réponse dans la journée même. «Parfois, j’ai juste pas le choix. Si je commence un contrat dans les jours suivants, je peux juste pas me permettre de devoir annuler mon contrat.» En effet, comme travailleur autonome, laisser tomber un contrat veut aussi dire laisser tomber une somme considérable de revenus.
Si je dois manquer une journée de travail, je risque de perdre mon contrat au complet. Et dans ce cas-là, je risque de perdre des milliers de dollars.
Simon, père de deux enfants
Au-delà de la peur de perdre son revenu, Simon vit surtout avec le stress de ne jamais être en mesure de prévoir quoi que ce soit. «On est à la merci de tout, c’est comme si on avait une épée de Damoclès au-dessus de la tête. On ne sait jamais quand on va être obligé de tout annuler du jour au lendemain.»
Du stress pour les enfants aussi
Alexandra est chargée de cours à l’Université du Québec à Montréal. Son fils de 2 ans et demi s’est fait dépister huit fois dans la dernière année. Chaque fois, la situation est insoutenable autant pour elle que pour lui.
Il est traumatisé par les tests de dépistage, dès qu’on rentre à l’hôpital Hôtel-Dieu, il reconnaît l’endroit et se met automatiquement à pleurer.
Alexandra, mère d’un garçon de deux ans
Comme pour Audrey et Simon, un test de dépistage de la COVID-19 pour son enfant représente environ trois jours à la maison. Pour pallier le temps qu’elle consacre à la gestion des tests et des confinements obligés, Alexandra doit reprendre ses heures de travail la fin de semaine.
«Encore combien de temps va-t-on devoir vivre cette situation-là?» se demande-t-elle.
Tests de dépistage à la maison
Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) et le ministère de la Famille (MFA) ont annoncé vendredi que, dès le 6 décembre, des tests de dépistage seront fournis par les services de garde aux parents. Cette nouvelle mesure permettra aux parents d’enfants âgés de plus d’un an de réaliser les tests de dépistage à la maison et donc de simplifier leur quotidien. C’est seulement dans le cas d’un résultat positif que les parents devront se rendre avec leur enfant dans un centre de dépistage.