Quand L'OMS prend Facebook en grippe
Cette fois, le bouc émissaire est numérique. C’est la faute à l’internet si l’on a sombré dans le confusionnisme en pleine saga de la grippe A (H1N1). Accusée d’avoir dramatisé la menace de pandémie sous l’influence de laboratoires pharmaceutiques, l’Organisation mondiale de la santé a trouvé ses coupables : les réseaux sociaux.
Twitter, Facebook et compagnie auraient jeté de l’huile sur le feu en faisant courir toutes sortes de rumeurs. Il faudra en tenir compte lorsque surviendront les prochaines crises sanitaires, a soutenu l’OMS la semaine dernière. Peut-être, mais la rumeur n’est-elle pas le plus vieux média du monde? Les pandémies des siècles passés n’ont-elles pas toujours cohabité avec cet immortel «virus»?
Certes, rappelle Michel Dumais, «on ne peut oublier qu’il y a eu, par les tenants de la théorie du complot et les « pseudo-scientifiques » de salon amplement présents sur les médias sociaux, orchestration et amplification de la panique.» Mais, précise le journaliste spécialisé en nouvelles technologies et animateur de l’émission Citoyen numérique de CIBL-FM, «l’OMS, les responsables de la santé et des services publics ont sonné haut et fort l’alarme en utilisant principalement les médias traditionnels. Ils ont négligé la mise en place d’une stratégie de communication numérique.»
Ils n’ont surtout pas compris ceci : avec le Net, la médiasphère est désormais décentralisée. Plus que jamais, l’information est horizontale. «Quand on connaît, souligne encore Michel Dumais, la réactivité des médias sociaux et de la vitesse à laquelle les informations, bonnes ou mauvaises, circulent au travers du réseau, nul ne peut se permettre de négliger ces nouveaux canaux de communication.»
Si l’OMS se veut vraiment le «phare sanitaire» de l’humanité, l’organisation onusienne basée à Genève devra apprendre à éclairer le cyberespace de ses messages. Sans aucune opacité. En attendant, sa gestion de la première pandémie du siècle a frisé la dramatisation. Ses nombreuses alertes ont eu l’effet d’un tsunami planétaire.
La Pologne a été l’un des rares pays à ne pas en tenir compte. Que faire à présent des millions de vaccins inutilisés? Certes, mieux vaut prévenir que guérir, mais le messager finit toujours par perdre toute crédibilité en criant trop au loup. La grande victime de la grippe H1N1 est nulle autre que l’OMS.