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Y a-t-il trop de restaurateurs à Montréal?

Des restaurants ont commencé à imposer une «taxe covid».
Photo: Thinkstock
Giuseppe Valiante, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — David McMillan, copropriétaire du restaurant prisé à Montréal Joe Beef, déplore que pratiquement n’importe quelle personne intéressée, indépendamment de son expérience, puisse ouvrir un restaurant dans la métropole gastronomique.

«Je ne pourrais pas décider demain matin d’exercer la plomberie ou de m’improviser électricien, a-t-il fait valoir en entrevue avec La Presse canadienne. À Montréal, vous pouvez demander un permis de restaurant et l’obtenir immédiatement — c’est un problème, selon moi», a ajouté M. McMillan.

Son point de vue ne fait pas l’unanimité dans le secteur de la restauration, mais reflète en partie le débat qui a cours entre les chefs, les propriétaires de restaurants, les citoyens et les politiciens au Québec.

Avec une féroce concurrence et de minces marges de profits — environ 2,7 pour cent en moyenne —, le rôle que devrait jouer le gouvernement du Québec dans l’un des secteurs les plus dynamiques de la province demeure source de frictions.

Le débat n’est pas nouveau, et a été réalimenté plus tôt cette année par Carlos Ferreira, notamment à la tête du café Ferreira, qui affirme que Montréal devrait imposer des quotas dans certains quartiers pour restreindre la concurrence et aider des restaurants bien établis en difficulté à maintenir leurs activités.

«Je ne crois plus au libre-marché. Nous devons protéger les bons restaurants», a dit M. Ferreira à ce moment.

Le célèbre chef Daniel Vézina a soutenu récemment que la cessation des activités de bon nombre de restaurants quelques mois après leur ouverture montrait qu’il y avait trop d’adresses culinaires à Québec et à Montréal.

«Tout le monde veut ouvrir un restaurant, devenir chef — cela doit changer», a dit M. Vézina aux journalistes.

Montréal compte une proportion de restaurants par habitant parmi les plus élevées en Amérique du Nord, et la prolifération d’endroits pour manger inquiète certains politiciens.

La principale artère commerciale dans le quartier de Saint-Henri est devenue si populaire auprès des restaurateurs que les conseillers ont décidé d’adopter un règlement pour créer ce qu’ils ont qualifié de «meilleur équilibre» entre les détaillants, les autres entreprises de services et les restaurants.

Le règlement interdit l’ouverture d’un nouveau restaurant sur la rue Notre-Dame — où le Joe Beef est situé — à moins de 25 mètres d’un restaurant déjà existant.

M. McMillan estime que ce règlement est une bonne idée.

Selon lui, si tous les espaces commerciaux d’une rue sont occupés par des restaurants, il n’y a pratiquement personne qui s’y promène avant 18h, ce qui plomberait la vitalité d’un quartier.

Toutefois, sa principale récrimination est que des gens ayant des connaissances culinaires très limitées risquent de mettre la santé de clients en danger.

«À tout le moins, il devrait y avoir une forme de certification», a-t-il fait valoir.

Cela pourrait toutefois tourner au cauchemar bureaucratique à l’image du secteur de la construction au Québec, a affirmé François Meunier, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales de l’Association des restaurateurs du Québec.

Alors que les chefs et les propriétaires ne peuvent s’entendre sur des éléments tels que les quotas de restaurants et les certifications de chef, M. Meunier affirme que les profits de la plupart de ses membres sont menacés par les travaux sur les routes, les taxes foncières élevées et les coûts reliés au permis, ainsi que par la possibilité d’une hausse du salaire minimum à 15 $ l’heure.

«Ce ne sont que des restaurateurs qui se plaignent qu’il y a trop de restaurants. Demandez aux gens, aux citoyens, ils ont un choix complet, et de bons prix pour de la qualité comparativement à d’autres villes», a dit croire M. Meunier.

Et tandis que les appels à des quotas de restaurant reçoivent beaucoup d’attention, les politiciens sont restés tièdes à l’idée afin de ne pas se mêler à une industrie très importante à l’image de marque de Montréal. Car malgré ses mauvaises infrastructures et son économie qui pourrait avoir meilleure mine, la ville demeure une destination de choix pour les touristes à la recherche de bons restaurants.

David McMillan dit qu’il ne faut pas pour autant avoir peur de la compétition.

«J’ai travaillé dans les 10 meilleurs restaurants de Montréal il y a 25 ans – aucun d’entre eux n’est ici aujourd’hui», a-t-il déclaré. «Tous les 10 meilleurs restaurants de Montréal en ce moment – aucun d’eux n’existera dans 20 ans, c’est l’histoire, c’est cyclique. Qui dit que vous êtes bon? Vous êtes bon et soudainement vous ne l’êtes plus.»

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