La méthadone plus accessible par prescription
OTTAWA — Les médecins n’auront plus à demander une exemption au gouvernement fédéral pour prescrire de la méthadone et de l’héroïne pharmaceutique. Une barrière qui limitait l’accès au traitement pour la dépendance aux opioïdes, selon la ministre de la Santé, Ginette Petitpas Taylor.
Celle-ci a annoncé lundi des modifications au Règlement sur les stupéfiants qui entreront en vigueur le 19 mai. Seuls les médecins oeuvrant en milieu hospitalier pouvaient prescrire de la méthadone et de l’héroïne, ce qui était perçu comme un obstacle et pouvait empêcher les gens qui en ont besoin d’obtenir de l’aide.
«Chez nous, il y a quelques cliniques de méthadone dans mon comté de Moncton—Riverview—Dieppe et on a trois médecins dans notre région qui prescrivent ce médicament-là, mais c’est limité à trois, a-t-elle cité en exemple. Souvent, les gens pourraient avoir cette consultation avec leur médecin de famille et ce serait peut-être une option de traitement qu’ils choisiraient.»
Les médecins qui désiraient prescrire de la méthadone devaient remplir un formulaire de trois pages dans lequel ils détaillaient la raison de leur demande d’exemption et la formation pertinente qu’ils avaient suivie. Un autre obstacle qui empêche les gens souffrant de dépendance de se faire soigner.
«Dans l’équilibre des avantages et des inconvénients, je pense que les avantages sont beaucoup plus grands que les quelques inconvénients qui peuvent arriver», a réagi le président-directeur général du Collège des médecins, Dr Charles Bernard.
La formation qui dure une journée ne sera plus obligatoire au Québec, mais le Collège des médecins encouragera ses membres qui s’intéressent à ce champ de pratique à la suivre.
«Il y a un danger que des gens qui font des prescriptions sans avoir de formation ou sans trop connaître ses médicaments-là peuvent entraîner des problèmes de dépendance eux-mêmes. Donc, il faut être prudents», a dit Dr Bernard.
Au Québec, seulement 1026 médecins sur un total de 21 000 détiennent cette exemption pour la prescription de méthadone. Pour l’instant, seule la Colombie-Britannique autorise l’usage de l’héroïne pharmaceutique.
231 millions $
La ministre Petitpas Taylor a également détaillé où iront les 231 millions $ sur cinq ans inscrits dans le dernier budget fédéral pour contrer la crise des opioïdes.
Les provinces et les territoires recevront 150 millions $, l’Agence des services frontaliers aura 31,6 millions $ pour intercepter des opioïdes comme le fentanyl à la frontière et 18,7 millions $ serviront à une campagne nationale pour lutter contre la stigmatisation des personnes qui souffrent de dépendances.
Le reste de l’argent servira à financer de la recherche pour améliorer les façons de lutter contre la crise des opioïdes et à améliorer les traitements qui sont disponibles.
La ministre espère que la recherche permettra éventuellement de décentraliser l’accessibilité aux traitements. «Je regarde, par exemple, le centre (d’injection supervisée) Insite à Vancouver, a expliqué Mme Petitpas Taylor. Ça fait plusieurs années qu’ils offrent le traitement d’héroïne à leurs patients. Maintenant, à travers ces expériences-là nous pouvons développer d’autres politiques pour nous assurer que d’autres Canadiens puissent avoir accès à ces services-là.»
Le ministère fédéral de la Santé estime que la crise des opioïdes a fait plus de 4000 morts dans l’ensemble du pays en 2017. Au Québec, au moins 199 personnes auraient perdu la vie en raison d’une surdose en 2016, selon les plus récents chiffres de l’Institut national de santé publique du Québec.