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Elisapie à la croisée des chemins

Photo: Raphael Ouellet

Inspirée depuis toujours par la poésie de Leonard Cohen, Elisapie Isaac parle d’amour et de relations humaines dans les chansons de Travelling Love, son troisième album – le deuxième en solo. Un opus aux sonorités très pop, créé avec la précieuse aide de gens chers à la chanteuse inuk.

Il s’en est passé des choses dans la vie d’Elisapie depuis quelques années. Un premier album solo après la fin du groupe Taïma, son premier enfant, la rupture avec son conjoint de longue date, le comédien Patrice Robitaille… Autant de moments déterminants et, l’artiste l’admet volontiers, inspirants.

«J’ai accumulé du vécu depuis quelques années, et après ma rupture, j’ai retrouvé mes amies de filles, j’ai passé beaucoup de temps avec elles, à faire des soupers de filles, et je me suis rendu compte à quel point j’étais fascinée par le point de vue des femmes par rapport à l’amour. Pour mon disque, j’avais le goût d’aller là-dedans, que ce soit direct, cru. Et c’est un peu thérapeutique aussi, puisqu’il y a beaucoup de moi dedans, mais aussi beaucoup des femmes qui m’entourent.»

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Ce nouvel opus, Travelling Love, son deuxième en solo, parle donc d’une femme qui se pose des questions sur sa vie : «Une femme dans la trentaine, précise Elisapie. Je pense que c’est là qu’on est à la croisée des chemins. On n’est plus des petites jeunes de 20 ans, on n’a pas 50 ans non plus, on commence à se définir tranquillement, à s’assumer un peu plus, mais on est encore très motivées, on rencontre nos futurs partenaires de vie ou ça casse…»

Par conséquent, cet «amour nomade» du titre teinte la grande majorité des textes : «J’ai toujours été très inspirée par des gens comme Leonard Cohen, qui est en constant questionnement par rapport à l’amour, à la passion, à la spiritualité, à la connexion entre les humains, énumère la chanteuse. Écrire ce disque, c’était comme une quête pour mieux me situer par rapport à l’amour.

L’amour, c’est quelque chose de compliqué, pas nécessairement toujours beau, mais constamment en mouvement, et quelque chose sur quoi on peut compter. Il faut juste continuer à croire que l’amour est fait pour la liberté, ce qui est très dur parce qu’on veut le maîtriser, le posséder… L’amour est pur et beau, et à partir du moment où on veut le posséder, le rendre statique, ça meurt, je pense.»

Le défi, par contre, a été de refléter cette sérénité dans les mélodies de l’album, qu’elle a commencé à travailler, un peu au hasard, avec ses comparses musiciens Manuel Gasse et Gabriel Gratton.

«D’habitude, j’ai besoin de vivre seule mon processus de création, de réfléchir, d’attendre que l’inspiration me tombe du ciel, rigole-t-elle. Mais cette fois-ci, j’ai proposé à Manuel et à Gabriel de commencer à coécrire deux ou trois chansons un peu plus up beat – ce que je trouve plus dur à faire. C’est facile d’écrire une chanson très mélo, mais quand c’est le temps de faire groover une mélodie accrocheuse, c’est une autre paire de manches.»

En plus de son travail avec Gasse et Gratton, Elisapie a confié la réalisation du disque à Éloi Painchaud et à François Lafontaine (Karkwa), chante avec Brad Barr des Barr Brothers sur une des chansons et a demandé la collaboration de Jim Corcoran pour apporter la touche finale à ses textes. Il n’y a pas à dire, la demoiselle sait s’entourer.

«Je pense que je m’emmerderais à faire un album solo complètement seule, avoue-t-elle. Peut-être que ça va arriver un jour, mais j’ai trop besoin de partager pour le moment, on apprend beaucoup en ayant le point de vue des autres.»

Du reste, la chanteuse choisit ses collaborateurs avec soin : «J’ai travaillé avec des belles personnes, des gens sensibles, généreux, s’émerveille-t-elle. C’était important pour moi qu’ils embarquent dans le projet à fond, qu’ils connectent avec moi, qu’ils tripent, sinon il n’y a pas d’émotivité.»

Le résultat : un album aux sonorités très pop, assez éloigné du folk de Taïma. Et un album presque entièrement anglophone, hormis une pièce et quelques passages en inuktitut. «J’aurais pu faire un album inuktitut avec juste des bouts en anglais, j’aurais pu faire un album en français coécrit avec des francophones et juste un bout en inuktitut… Mais là, j’avais envie d’aller dans la poésie anglophone», explique-t-elle.

Vivant dans un univers trilingue, Elisapie ajoute que la langue choisie est souvent inspirée par le public à qui elle pense en écrivant : «Si c’est quelque chose d’universel, ça sera en anglais, par exemple. Si je pense à mes amis artistes, en français; si ça traite de questionnements identitaires, si je parle aux jeunes ou si je pense à mes petites cousines, j’aurai tendance à écrire en inuktitut.»

L’artiste assure qu’elle flirte toujours avec les trois langues et qu’elle n’a pas l’intention d’en abandonner une au profit des autres. «Travelling Love, il est comme ça, et peut-être que pour le prochain, ce sera complètement autre chose, suggère-t-elle. On ne sait jamais d’avance quelle direction ça prendra… et je pense que j’en ai beaucoup encore à faire, des albums!»

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