Un pas de plus vers des condos au parc Oxygène
Le propriétaire actuel du terrain situé sur la rue Hutchison, entre l’avenue des Pins et la rue Prince-Arthur, veut construire un bâtiment résidentiel de trois étages avec sous-sol et mezzanines, comptant cinq logements.
« Les élus ont le pouvoir de dire oui ou non, mais ils n’ont pas eu le courage, l’imagination ou la vision pour faire autre chose avec cet endroit, déplore Norman Nawrocki, du comité ad hoc Milton-Parc pour la sauvegarde du parc Oxygène. Pourquoi se rangent-ils derrière un promoteur immobilier plutôt que d’appuyer des citoyens qui veulent un espace vert? »
Une oasis au milieu du béton
Le parc Oxygène a été créé en 1989, sur une ruelle privée adjacente à l’une des coopératives d’habitation de la Communauté Milton-Parc (CMP). L’initiative citoyenne avait comme premier objectif d’y stopper la circulation des taxis, jugée dangereuse pour les enfants du voisinage.
Même si le terrain ne leur appartient pas, les riverains entretiennent bénévolement ce parc informel en y plantant arbres, fleurs et gazon.
« Tout le monde dans le coin profite du parc. C’est un lieu de socialisation ouvert à tous. Les gens s’y rencontrent, y mangent leur diner. On y a même fait des festivals de musique, de poésie et de théâtre », raconte M. Nawrocki.
Depuis sa création, le petit parc, situé à l’ombre des tours à logement La Cité, est menacé par des projets de développement immobilier. Toutefois, jusqu’en 2009, le zonage ne permettait que la construction en hauteur, chose impossible sur un lot étroit comme celui-ci.
Mais au désarroi des citoyens, l’administration Fotopoulos a changé la réglementation, permettant ainsi d’ériger un immeuble de quelques paliers seulement.
« Nous sommes pris avec l’asphalte, les grandes tours, le bruit, la pollution et les îlots de chaleur. Notre parc, c’est une oasis au centre de la ville. L’air est frais. Ça devrait être à nous de décider si ça reste vert ou s’il y a des condos », soutient M. Nawrocki.
Permis de construction
Le permis de construction n’a pas encore été émis par l’arrondissement. Mais l’autorisation finale risque de n’être qu’une formalité.
« Nous n’avons pas le droit légal d’empêcher la construction. Pour dire non, il faudrait que le projet contrevienne à nos règlements. On ne peut pas utiliser nos pouvoirs pour atteindre un but qui n’est pas prévu par la réglementation d’urbanisme, aussi louable soit-il », souligne Alex Norris, conseiller de la Ville du district Jeanne-Mance.
Il ajoute qu’une modification du zonage pourrait être contestée par le promoteur puisque le projet était conforme aux politiques au moment où il a été soumis.
Un dernier espoir
À défaut de pouvoir bloquer l’émission du permis, les opposants au projet demandent à l’arrondissement et à la Ville-centre d’acheter le terrain pour en faire un parc officiel.
Pour le moment, c’est une voie que les autorités ne veulent pas envisager.
« Idéalement, nous voudrions que ce parc soit sauvé, mais on veut le faire de manière financièrement responsable », plaide M. Norris.
Selon lui, l’achat serait trop onéreux, d’autant plus que les résidents du quartier n’ont pas encore épuisé tous les moyens légaux à leur disposition.
C’est que la CMP détiendrait une servitude sur le lot en question, une notion légale qui confère à un propriétaire certains droits sur un terrain voisin. Celui qui la subit doit accepter les contraintes quant à ses propres droits sur sa propriété.
Mais pour faire valoir sa servitude, la CMP devra s’adresser à la Cour.
« C’est un litige entre deux partis civils. Il faut que la coopérative amène le promoteur devant le tribunal pour obtenir une injonction. Ça serait le moyen le moins coûteux pour protéger cet espace vert », explique le conseiller de la Ville.
Les opposants comptent bien se tourner vers les tribunaux et travaillent sur leur dossier juridique. Ils espèrent seulement pouvoir le faire à temps, avant le début des travaux. Ils se préparent toutefois au pire des scénarios.
« Notre objectif, c’est de sauvegarder le parc, coûte que coûte et avec nos moyens. Si le monde est prêt à bloquer les bulldozers, c’est ce qu’il fera », affirme M. Nawrocki.