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Immigration: des groupes dénoncent une «prison» pour migrants à Laval

Des représentants de groupes communautaires s'opposent au projet de construction d'un centre de détention pour migrants à Laval. La conférence de presse avait lieu près du Centre de détention Leclerc de Laval. Photo: Josie Desmarais/Métro

L’opposition à la construction d’un nouveau centre fédéral de détention des migrants à Laval se poursuit. L’annonce du nouvel entrepreneur en charge du projet a poussé plusieurs organismes à se rassembler sur le site du futur bâtiment, lundi, pour pousser un cri du cœur. Leur message: «il n’y aura pas de prison de plus à Laval».

Rassemblés à la montée Saint-François, sur l’Île Jésus, les membres des différents groupes, dont Solidarité sans frontière, ont tenu à faire part des potentiels impacts psychologiques et physiques sur les immigrants irréguliers que pourrait avoir la construction de ce Centre de surveillance de l’immigration (CSI).

La membre de l’organisme Solidarité sans frontières Amy Darwish accuse l’entrepreneur qui sera en charge de l’érection du centre de «profiter de l’emprisonnement des migrants et de la séparation des familles».

«Nous allons mettre de la pression sur eux pour qu’ils abandonnent le projet et que la construction s’arrête, a-t-elle affirmé. Nous sommes en train de générer plus de momentum, bien que la construction pourrait commencer n’importe quand.»

Ce n’est pas la première fois que des groupes s’opposent avec verve à ce nouvel espace de détention. En mai, lors d’une conférence de presse commune, différents organismes ont fait part de leur désir de tenir une «mobilisation importante» contre le CSI.

Le nouveau projet s’inscrit dans un investissement de 138M$ du gouvernement fédéral, dont 56M$ – selon les premières estimations – pour mettre en place ce nouvel édifice à Laval.

L’actuel centre de détention est situé à quelques pas du terrain vague où sera construite la nouvelle bâtisse et peut héberger 109 personnes, selon le site Web de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC). Il avait été qualifiée en 2016 de «vétuste» par le ministre de la Sécurité publique Ralph Goodale.

«Le système de détention protège la sécurité des Canadiens et l’intégrité de notre système d’immigration, a affirmé le porte-parole du ministère, Scott Bardsley. La détention est seulement permise quand quelqu’un est un danger public, qu’il y a une question d’identité ou qu’il ne se présente pas devant le système.»

«Les officiers doivent toujours considérer des alternatives», a-t-il ajouté.

Protéger les familles
Présent au rassemblement de lundi, le porte-parole du groupe des Mexicain-es uni-es pour la régularisation, Carmelo Monge, lui-même un ex-migrant d’origine mexicaine, a tenu à faire part de son expérience difficile en centre de détention.

«Dans ces centres, il y a vraiment de la souffrance. […] C’est un impact psychologique. Je raconte ça parce que j’ai vécu cette situation», a-t-il dénoncé.

«Les enfants surtout souffrent, a-t-il poursuivi. Vous savez, les enfants absorbent tout dans cette période. Ils absorbent la colère, la tristesse…»

Amy Darwish s’est insurgée contre la «décision impossible» que doivent prendre les familles de sans papiers qui se réfugient au Canada. «Soit vous emmenez les enfants en prison avec vous, soit vous risquez d’être déportés sans eux», a-t-elle observé.

L’impact d’un tel centre est particulièrement insupportables pour les femmes et les enfants, d’après la vice-présidente de la Fédération des femmes du Québec (FFQ), Marlihan Lopez.

«Souvent, les femmes vont quitter leur pays en fuyant des contextes de violence. Le fait d’arriver dans ce pays avec la crainte d’être détenues ou déportées, ça les maintient dans des situations de vulnérabilité accrues», a-t-elle confié à Métro.

Le ministère de la Sécurité publique avance que la construction de centres détention «permet de réduire l’utilisation de services correctionnels» pour les personnes migrantes. «Ça va nous permettre de détenir ces personnes dans une place plus humaine», a soutenu Scott Bardsley.

«Des prisons plus jolies»
Le gouvernement canadien possède trois centres de surveillance sur son territoire, incluant l’actuel centre lavallois. Le nouveau centre de détention, comme le dernier, offrira des locaux destinés à l’enseignement pour les enfants et des aires de jeux par exemple.

«Le gouvernement veut que ça ait l’air d’une garderie à l’extérieur, mais d’une prison à l’intérieur.» – Amy Darwish, membre de Solidarité sans frontières

Appelée à comparer le système canadien et le système américain – où les conditions dans des centres de migrants à la frontière créent la controverse –, Marlihan Lopez n’a relevé que très peu de différences notables.

«On a des prisons plus jolies, a illustré la membre de la FFQ. Mais le fait de criminaliser la migration, ce n’est pas acceptable.»

Initialement prévue sur le terrain vague où sera prochainement érigé l’établissement, la conférence de presse a dû être déplacée car les autorités empêchaient aux journalistes de prendre des images dans le secteur. Le reste de l’événement s’est tenu sous présence policière, mais aucune arrestation n’a été effectuée.

Quelques chiffres sur la détention de migrants sans papiers:

  • Au Canada, le nombre de personnes migrantes détenues a augmenté de 6268 en 2016-17 à 8355 en 2017-18.
  • 71% de ces personnes ont passé leur séjour dans un CSI
  • Les migrants détenus ont passé en moyenne 14,3 jours dans ces établissements en 2017-18.
  • Dans les trois premiers trimestres (sur quatre) de 2018-19, plus de 7400 migrants ont été hébergés dans des centres de détention fédéraux. Si la tendance se maintient, près de 10 000 personnes passeront par les CSI pour la période complète.

– Ces statistiques proviennent de l’ASFC

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