Gestion inadéquate du personnel d’agence au CHSLD Herron
Employés non formés, présences falsifiées et erreurs dans les factures: l’agence de placement avec laquelle faisait affaire le CHSLD Herron pour trouver du personnel soignant durant la première vague de COVID-19 faisait une gestion inadéquate.
C’est ce qui est ressorti lundi matin à l’enquête publique du coroner portant sur les 47 décès de résidents survenus à Herron. La sixième journée d’audience a débuté avec la suite du contre interrogatoire de la responsable de l’agence en question, dont le nom est protégé par une ordonnance de non publication.
À partir du 29 mars 2020, le CHSLD Herron, situé à Dorval, a connu un bris de services alors que les employés avaient déserté la place à la suite d’une recommandation d’Info-Santé.
Dépêchés à l’établissement privé pour évaluer l’état des lieux, des cadres du CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal ont découvert une «situation critique». Le 30 mars, la gestion du CHSLD Herron est confiée au CIUSSS et la propriétaire du centre, Samantha Choweiri, est avisée par courriel.
Devant le manque criant de main-d’œuvre, Mme Chowieri demande à la responsable de l’agence de placement de trouver «n’importe qui» pour travailler. «Elle m’a dit de trouver même dans la rue des gens pour changer des culottes et travailler», a déclaré lundi la témoin qui est infirmière auxiliaire de formation.
Jeudi dernier, l’infirmière et chef de service ambulatoire nommée responsable de site, Stéphanie Larose, a témoigné du fait que plusieurs membres du personnel n’étaient pas formés. Comme plusieurs avant elle, Mme Larose a raconté les horreurs qu’elles avaient découvertes à son arrivée le 29 mars.
Présences falsifiées
Interrogée par l’avocat représentant le CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal, la responsable de l’agence a confié qu’elle avait suggéré à une de ses employées de signer le registre sous le nom d’un autre employé qui ne pouvait se présenter pour travailler.
«C’est un petit peu tout croche… On falsifie le nom de quelqu’un», a réagi la coroner qui préside l’enquête publique, Me Géhane Kamel.
Lorsque les responsables du CIUSSS se sont rendu compte du fait que les signatures étaient différentes pour un même préposé, ils ont demandé à la réceptionniste du CHSLD Herron d’exiger des pièces d’identité.
À partir du 23 avril, les employés de l’agence se voyaient refuser l’entrée. «C’est à cette étape-là qu’il y a eu des problèmes», a souligné la témoin.
En mai 2020, le CIUSSS en charge du CHSLD Herron a recruté une nouvelle agence. L’agence de placement dont est responsable l’infirmière auxiliaire protégée par une ordonnance de non publication est toujours en service en ce moment et dessert plusieurs CHSLD.
Erreurs dans les factures
Par ailleurs, il y a beaucoup de confusion quant aux employés d’agence qui ont été payés et ceux qui ont réellement travaillé durant cette «période chaotique». «On aurait pu payer des gens qui n’étaient pas présents?», s’est interrogé la coroner Kamel.
Selon le témoignage de la responsable d’agence, c’est l’exigence de présenter des pièces d’identité et le refus d’admettre certains employés à l’entrée du CHSLD Herron qui est en cause. «C’est quand on a chassé les gens après le 23 avril. Avant, il n’y avait pas de problèmes», a-t-elle indiqué.
À la barre, elle a aussi admis qu’il y avait «toujours des erreurs» dans les factures. Devant ce flou, la coroner a tenu à donner un «conseil d’amie» à la témoin : «Ou j’engagerais un nouveau comptable, ou je reverrais ma reddition de compte quand je travaille avec mon agence».