Soutenez

Une arme de distraction massive

Des fioles du vaccin astrazeneca, qui pourrait être utilisé en troisième dose
Photo: solarseven/iStock

CHRONIQUE – Chaque époque possède ses boucs émissaires, particulièrement en temps de crise.

En considérant taxer les non-vaccinés contre la COVID-19 par le truchement d’une «contribution santé», le premier ministre du Québec, François Legault, cherche à diviser pour mieux régner. Plus encore, il détourne habilement l’attention, telle une arme de distraction des masses, des véritables enjeux qui devraient nous préoccuper en matière de santé et au-delà.

Les véritables coupables de la fragilité du système de santé québécois sont les compressions et les coupures ayant été orchestrées au cours des dernières décennies, et ce, par plusieurs gouvernements.

Un filet social fragilisé, bien avant la pandémie

Le modèle québécois tombe un peu partout, ici et là, non seulement en santé, mais en éducation et petite enfance, en services sociaux, dans le réseau communautaire et j’en passe. Il n’y a pas que la santé physique qui compte en période incertaine. Le gouvernement ne semble d’ailleurs pas avoir de plan solide en matière de santé mentale alors que le moral de la population est mis à rude épreuve.

Je peux dire pour avoir travaillé pendant plusieurs années en intervention, c’était déjà difficile avant la pandémie. Bon nombre d’entre nous avertissaient d’ailleurs déjà qu’il ne suffirait que d’une crise pour que tout s’écroule. Eh bien, nous y voici, nous y voilà. Non seulement les intervenants sur le terrain n’ont visiblement pas été écoutés, mais le pire semble à venir. Insidieusement, les domaines ayant le plus souffert sont ceux où les femmes se retrouvent majoritaires en tant que prestataires de services. Une analyse différenciée selon le genre et intersectionnelle serait donc de mise pour évaluer les différentes décisions du gouvernement et ses impacts sur les femmes ainsi qu’entre différents groupes de femmes. La pandémie confirme que ce sont les femmes qui tiennent notre filet social à bout de bras.

Une population à 100% vaccinée?

À vrai dire, je n’aime pas le mot «délestage». C’est un mot fancy qui cache en réalité de très grands drames humains. Par exemple, plusieurs personnes en attente de chirurgies pour des cancers voient leurs rendez-vous reportés en contexte de pandémie, alors que pour ces cancéreux, chaque minute compte. Même si cette situation est désolante, il serait mal avisé de détourner sa colère et son exaspération sur les non-vaccinés pour expliquer l’état actuel des choses.

En plus du fait que la contribution santé pose de nombreux enjeux éthiques et légaux, je me demande s’il est possible, voire même réaliste, d’aspirer à vacciner 100% de la population. Est-il également raisonnable de croire que même en ayant 100% de la population québécoise vaccinée nous vaincrons la pandémie? J’ai tendance à penser que ce n’est pas aussi simple, surtout dans un contexte où de nombreux pays n’ont pas accès aux vaccins aussi aisément que les pays riches.

Faut-il refuser des soins à toute personne qui adopte un comportement jugé «à risque» en matière de santé? Poser la question semble ouvrir une boîte de Pandore qui serait difficile à refermer. Il faudrait sans doute chercher à comprendre pourquoi ces personnes ne sont pas vaccinées. Au-delà de l’archétype de l’«anti-vax», le portrait risque d’être beaucoup plus complexe, surprenant et diversifié qu’on ne pourrait le penser au premier abord.

Inscrivez-vous à notre infolettre et recevez un résumé, dès 17h, de l’actualité de Montréal.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.