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Les commissions scolaires se disent prêtes pour les cours d’éducation à la sexualité

Photo: Archives Métro

Les cours d’éducation à la sexualité sont désormais obligatoires pour tous les élèves du primaire et du secondaire de la province. Face aux craintes exprimées par les parents et les syndicats d’enseignement, la Commission Scolaire de Laval (CSDL), la Commission Scolaire de Montréal (CSDM) et la Commission Scolaire de la Pointe-de-l’Île (CSPÎ) se veulent rassurantes et ont tenu une conférence de presse conjointe pour faire connaître leurs différentes initiatives et se déclarer « prêts à aller de l’avant ».

Plusieurs centaines d’enseignants ont reçu leurs formations, un processus qui continuera pendant l’automne. Ceux qui ne sont pas à l’aise peuvent refuser d’enseigner la matière, mais les présidents assurent ne pas avoir reçu de demande en ce sens.

Pour les parents qui seraient toujours inquiets, un processus d’exemption existe, mais les 3 présidents affirment que de telles démarches n’ont pas eu lieu.

Rappelons que le Ministère de l’Éducation oblige 5 heures par année d’enseignement au primaire, et 15 heures par année au secondaire.

Un projet pilote qui « a connu du succès »

Un projet-pilote, le seul du genre à Montréal, s’est déroulé à l’École Jules-Vernes de Montréal-Nord, de l’automne 2015 au printemps 2018. « Nous sommes à même de constater que les contenus étaient adaptés à l’âge et au développement des élèves de chaque classe, aux situations de leur quotidien et aux questions qu’ils se posent », a déclaré Miville Boudreault, président de la CSPÎ.

Christian Urbain, qui fût directeur de l’école de 2016 à 2018, explique le succès du projet par 3 mots : « informer, accompagner, collaborer ». Il souligne que des rencontres ont eu lieu avec les parents afin de répondre à leurs questions, que les enseignants ont été accompagnés tout au long du processus, et que tout le personnel de l’école a collaboré.

Grâce à un partenariat avec le réseau de la santé, certains sujets plus délicats ont été pris en charge par des professionnels, par exemple lorsque l’on touchait aux agressions sexuelles. Des infirmières ont également été appelées à donner certains ateliers.

« Le projet a été tellement mobilisant, assure M. Urbain, que les enseignants ont commencé à développer des activités, et on les a accompagnés. On a largement dépassé les heures prévues, et les enseignants ont intégré les apprentissages transversalement dans différents cours. »

Il assure qu’il s’agit d’un projet « viable, possible, et qui peut connaître du succès. »

Du matériel pédagogique adapté

La présidente de la CSDM, Catherine Harel-Bourdon, assure que la matière est enseignée « avec une progression » entre le préscolaire et la fin du secondaire, en tenant compte du niveau de développement des élèves.

Au primaire, on abordera « les parties du corps, les stéréotypes sexuels, et on développera des habiletés préventives concernant les agressions sexuelles », cite-t-elle en exemple. Au secondaire, les enjeux liés aux relations amoureuses, au consentement et aux comportements sexuels sécuritaires sont au programme.

La CSDM a développé une série de 12 vidéos interactives de 20 minutes ou moins, appelées Les classes Sexo-Logiques, chacune accompagnée d’un cahier d’animation, et qui seront disponibles pour toutes les commissions scolaires.

« Les intervenants pourront, selon leur aisance avec le sujet, uniquement présenter la vidéo, la faire suivre d’un atelier de discussion, et nous proposons également pour chaque capsule des activités d’approfondissement », explique Sophie Bourque, conseillère pédagogique à la CSDM, et responsable du dossier de l’éducation à la sexualité.

Elle affirme que plus d’une vingtaine de personnes de tous les horizons ont travaillé à l’élaboration des capsules, dont les voix sont assurées par Denys Paris et Sarah-Jeanne Labrosse, qui joue Casse-tête, un personnage qui se pose des questions et « devient une figure connue rassurante » dans les vidéos destinées aux enfants du primaire.

Les capsules ont été financées par le Ministère la Condition féminine.

Une vidéo explicative destinée aux parents, sous-titrée en 5 langues, a également été réalisée par la CSDL.

Des craintes « légitimes mais pas nécessairement fondées »

Selon Francine Duquet, professeure au Département de sexologie de l’Université du Québec à Montréal, les craintes des parents « sont normales, légitimes et doivent être entendues »; mais qu’il fallait aller de l’avant.

« On arrivera jamais à aucune inquiétude. Mais les enfants, les adolescents, ne vivent pas sous une bulle. Les réseaux sociaux, internet, la télévision, leur donne déjà une perception, une représentation de la sexualité », souligne-t-elle, assurant que le traitement des thématiques sera fait en fonction du niveau de développement des enfants.

L’approche choisie par le ministère vise à « démystifier, relativiser la pression des pairs et l’influence des médias, et donner une tribune aux enfants », afin de lui permettre de mieux grandir, explique-t-elle.

La spécialiste de l’éducation à la sexualité en milieu scolaire, qui a participé en 2003 à la conception du document de référence sur lequel sont basées les nouvelles exigences ministérielles, affirme que « depuis plusieurs années, l’enseignement était très inégal dans le milieu. »

Elle juge donc positivement la formule combinant un cadre précis du ministère, avec un canevas pédagogique qui donne une marge de manœuvre aux commissions scolaires et aux écoles.

« Les assises sont là, il faut maintenant s’assurer que l’information circule bien. Mais on s’assure ainsi que chaque enfant a droit à un minimum. »

Le syndicat de l’enseignement de la Pointe-de-l’île (SEPÎ) satisfait

Serafino Fabrizi, président de la SEPÎ, se montre satisfait de travail effectué par la CSPÎ pour préparer les enseignants.

« Ils ont mis sur pied un plan de 5 ans, clé en main, avec des formations, des trousses d’outils complètes, avec des lettres pour les parents, des PowerPoint, et toutes les suggestions d’activités nécessaires », affirme-t-il.

M. Fabrizi assure que le cadre pédagogique est clair et « bien fait », et que les outils « sont là, prêts et utilisables. »

Les enseignants avaient établi une liste de 25 conditions gagnantes « qui ont majoritairement été retenues. »

Le président de la SEPÎ souligne que les enseignants peuvent de plus compter sur l’appui de deux conseillères pédagogiques qui s’occupent du dossier, dont l’une a une formation en sexologie, en plus d’avoir accès à des ressources au niveau du Centre de pédiatrie sociale de Montréal-Nord, et du Centre Marie-Vincent, un centre spécialisé en matière d’agression sexuelle envers les enfants.

Le seul problème, relève-t-il, c’est que « les professeurs doivent dégager du temps, et compresser un peu certaines matières, ce qui cause une surcharge de travail. »

De son côté, l’Alliance des professeures et professeurs de Montréal tiendra une rencontre ce soir afin de faire le point, et promet de commenter demain.

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