Vieux-Montréal: un organisme craint pour la protection du patrimoine
Deux organismes craignent que la construction d’un immeuble résidentiel nuise à la préservation du patrimoine dans le Vieux-Montréal. La hauteur de l’édifice serait deux fois supérieure à la limite permise dans ce secteur.
Mardi, les élus de Ville-Marie ont adopté une résolution concernant la construction d’un bâtiment résidentiel de 13 étages sur la rue Saint-Paul Ouest, en plein coeur du site patrimonial déclaré du Vieux-Montréal. Ce terrain, qui sert actuellement de stationnement, est vacant depuis «plusieurs décennies», mentionnent des documents décisionnels de l’arrondissement.
En 2012, ce projet immobilier, qui comptait alors 12 étages, avait déjà fait l’objet d’une demande de dérogation. Aucune autorisation n’avait alors été accordée.
«Un précédent»
La hauteur prévue de l’immeuble, qui comprendrait 89 unités d’habitation, serait de plus de 42 mètres. Or, les hauteurs maximales permises sur ce site varient de 16 à 23 mètres. La densité prévue du projet est également plus grande que celle autorisée sur ce site patrimonial.
Ces deux dérogations au règlement d’urbanisme de l’arrondissement inquiètent le directeur général d’Héritage Montréal, Dinu Bumbaru. Ce dernier réclame une «évaluation des impacts patrimoniaux» de ce projet immobilier.
«Notre crainte, c’est que ça serve de précédent. On sait qu’il y a de la pression pour la densification. C’est une densification qui se comprend dans une certaine mesure avec la question de la crise environnementale et les modèles de développement urbain qui se veulent moins éparpillés. Mais le Vieux-Montréal, c’est un cas d’exception», estime-t-il.
«Il faut faire attention, le Vieux-Montréal, il n’y en pas 36, il y en a juste un.» -Dinu Bumbaru, directeur général d’Héritage Montréal
Un constat que partage la directrice générale de l’organisme Action patrimoine, Renée Genest.
«Le fait d’octroyer des dérogations, ça peut créer des précédents qui peuvent être utilisés par les promoteurs par la suite», craint-elle.
Selon Mme Genest, l’aménagement de bâtiments trop hauts risque de «débalancer» le paysage de ce site patrimonial.
Avis favorable
À la mi-juin, le comité consultatif d’urbanisme de l’arrondissement a émis un avis favorable au projet, à condition que celui-ci remplisse certaines conditions, dont l’inclusion de zones de végétation et l’ajout d’unités de stationnement pour les vélos.
Le projet prévoit donc maintenant l’aménagement de plantes grimpantes sur une des façades de l’immeuble, de même que 32 unités de stationnement dédiées aux cyclistes.
«La presque totalité des conditions ont été remplies», souligne les documents de l’arrondissement. Ceux-ci précisent d’ailleurs que l’architecture de l’immeuble mettra «en valeur les éléments architecturaux des bâtiments adjacents».
Consultation publique
Bien que la Ville dispose depuis l’an dernier de certains pouvoirs en matière de protection du patrimoine, la construction de ce bâtiment devra toutefois recevoir l’aval de Québec avant d’être enclenchée.
«Le conseil [d’arrondissement] va enclencher le processus d’assemblée publique de consultation. Ensuite, comme c’est dans le Vieux-Montréal, ça doit aussi recevoir l’approbation du ministère de la Culture», a confirmé l’attachée de presse du comité exécutif, Laurence Houde-Roy.
Les documents décisionnels de l’arrondissement mentionnent d’ailleurs que le ministère a déjà accordé «un avis préliminaire favorable à ce projet.
Contacté par Métro, le ministère de la Culture et des Communications a toutefois précisé n’avoir donné aucune autorisation formelle. Sa porte-parole, Annie LeGruiec, assure d’ailleurs que ce projet sera «évalué en fonction de son impact sur le site patrimonial de Montréal».