Profilage racial: toujours autant d’interpellations policières, déplorent des organismes montréalais
Les policiers montréalais effectuent toujours autant d’interpellations policières qui visent des minorités visibles, déplorent des organismes. Ces derniers réclament que les données sur la race des personnes visées soient colligées systématiquement.
Le 18 novembre, les élus du conseil municipal ont adopté à l’unanimité une motion du conseiller indépendant Marvin Rotrand. La Ville s’est ainsi engagée à demander au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) de cesser «immédiatement» les interpellations policières «sans fondement».
Cette motion faisait suite à un un rapport accablant concernant les interpellations policières dévoilé le 7 octobre. Les groupes racisés, notamment les personnes noires ou autochtones, sont surreprésentés dans les données sur les interpellations de routine.
«Tous les élus ont dit clairement qu’ils ne veulent pas que des policiers interpellent des personnes sans une raison valable de sécurité publique», a évoqué jeudi M. Rotrand en conférence de presse à l’hôtel de ville. L’élu a allié pas moins d’une trentaine d’organismes à sa cause au cours des dernières semaines.
Des groupes autochtones dénoncent
Malgré la pression grandissante contre les interpellations policières basées sur la race, rien ne change sur le terrain, déplorent des organismes membres de cette coalition.
Un constat que partage la directrice générale du Foyer pour femmes autochtones de Montréal, Nakuset. Celle qui est derrière la création du centre de jour Résilience Montréal, près du square Cabot, a raconté voir régulièrement des Autochtones être appelés à s’identifier sans raison apparente auprès d’agents du SPVM.
«C’est la Ville de Montréal qui gère la police. Elle devrait s’assurer qu’elle soit imputable de ses actes.» – Nakuset
«Je pense que la motion était un symbole clair que la communauté veut que quelque chose change, mais la situation dans les rues est bien différente. De notre expérience avec des citoyens, nous avons constaté que la situation est encore pire qu’elle était avant l’adoption de cette motion]», ajoute le conseiller du Centre de recherche-action sur les relations raciales, Alain Babineau. Selon lui, les policiers «ne prennent pas au sérieux» l’enjeu du profilage racial au sein de leurs rangs.
«Il y a une volonté politique. Il y a une volonté du SPVM. Ça ne peut pas changer du jour au lendemain quand on parle de problèmes systémiques, mais je crois que l’on est dans la bonne voie», réplique Rosannie Filato, responsable de la sécurité publique à la Ville de Montréal.
Collecte de données
Depuis 2017, les interpellations policières arbitraires ou basées sur la race sont interdites en Ontario. La Commission des services policiers de Toronto a par ailleurs approuvé en septembre une nouvelle politique de collecte de données relatives à la race.
La coalition d’organismes demande donc à Montréal d’emboîter le pas à la Ville-Reine en obligeant les agents du SPVM de «recueillir des données relatives à la race chaque fois qu’ils interpellent quelqu’un pour effectuer un contrôle de routine». Les organismes réclament par ailleurs que cette collecte de données s’applique aussi aux contrôles de l’identité reliés à des infractions au Code de la sécurité routière.
«Quand on fait des contrôles routiers, on n’a pas encore ces données-là parce que ça revient à Québec», a indiqué à Métro la responsable de la sécurité publique à la Ville de Montréal, Rosannie Filato.
Interpellé par Métro, le cabinet de la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, a souligné que le dépôt du livre vert sur la modernisation de la police aura lieu en décembre. Des consultations publiques auront ensuite lieu dans les mois suivants. Les groupes qui le souhaitent pourront alors déposer des mémoires pour faire valoir leurs demandes auprès de Québec.