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La pénurie de main-d’œuvre nuit au 911 et aux ambulances

Photo: Josie Desmarais/Métro

En raison de la pénurie de main-d’œuvre qui sévit au Québec, certains citoyens en danger doivent attendre plus longtemps pour joindre le 911 ou obtenir une ambulance. Des travailleurs d’Urgences-santé déplorent un roulement de personnel important dû aux conditions de travail difficiles.

Mercredi, en avant-midi, un citoyen a contacté le 911 puisqu’il considérait qu’un homme à vélo représentait un danger. Le cycliste se serait immobilisé devant un automobiliste depuis déjà cinq minutes, lui obstruant le chemin. L’homme, qui semblait avoir le jugement altéré, criait que l’automobiliste en question avait essayé de le tuer.

Lorsque le témoin, nommé Maxime Truman, a appelé au 911, il a entendu un message automatisé. Il a ensuite dû attendre environ deux minutes. «En deux minutes, il peut se passer beaucoup de choses», souligne-t-il.

On s’attend à faire face à un message automatisé quand on appelle une compagnie aérienne, ou à l’Agence du revenu, mais pour une urgence, c’est inacceptable.

Maxime Truman, résident de Montréal

M. Truman est resté sur la scène des faits pendant encore quelques minutes, sans qu’un agent de la police se présente sur les lieux.

Métro a tenté d’obtenir un commentaire du Service de police de la Ville de Montréal. Au moment d’écrire ces lignes, nous n’avions pas obtenu de réponse.

Priorisation difficile

Si les appels d’urgence liés à la police ou aux services d’incendie peuvent être un peu plus lents qu’à l’habitude, la situation est pire pour l’arrivée d’une ambulance. En janvier 2020, 140 répartiteurs médicaux d’urgence (RMU) travaillaient à Montréal et à Laval, selon le syndicat qui les représente. Ce chiffre est passé à 115 en janvier 2022, puis à 90 au cours des dernières semaines.

Une répartitrice ayant quitté le domaine en mai en témoigne: les délais se sont allongés au cours des derniers mois, surtout pour les situations qui ne sont pas considérées comme extrêmement urgentes. «Si vous avez une douleur à la poitrine et que vous appelez pour une ambulance, les services arriveront rapidement. Mais, par exemple, une chute n’est pas nécessairement une priorité élevée au point d’avoir les sirènes et gyrophare. Il se peut donc qu’une personne attende deux heures», explique l’ex-répartitrice, qui a préféré garder l’anonymat par peur de représailles.

Conditions à améliorer

C’est en raison des heures supplémentaires obligatoires utilisées pour pallier le manque d’employés, d’horaires instables et du salaire «faible pour le travail demandé» que la répartitrice interrogée par Métro a choisi de quitter son emploi. Le salaire d’entrée dans le domaine est de 21,37 $ selon le syndicat en place.

«McDonald’s embauche au même salaire. Mais la charge émotionnelle n’est pas la même, et les heures demandées non plus. Une chance que les répartiteurs sont solidaires, sinon plusieurs seraient partis», déplore la présidente du syndicat des RMU à Montréal, Anick Bélanger.

Composer avec des citoyens en détresse peut être difficile mentalement pour les répartiteurs. Il y aurait une vague de démissions et d’arrêt de travail pour épuisement. «Former une nouvelle cohorte prend jusqu’à quatre mois. Et il n’y a pas assez d’effectifs pour les former, alors elle est souvent formée moins efficacement. Puisqu’ils sont nouveaux, ils font plus d’erreurs. Ce qui est normal, mais cela engendre une charge de travail supplémentaire», explique l’ex-répartitrice interrogée par Métro.

Problème étendu

À la fin du mois de juillet, un Montréalais est mort après avoir attendu l’arrivée des paramédicaux pendant 11 heures. Une enquête du coroner est en cours à ce sujet.

Constatant que ce type d’incident arrivait de plus en plus souvent, un ancien paramédical a lancé la page Facebook La dernière ambulance. Il y collige tous les témoignages anonymes de travailleurs de la santé qui témoignent d’événements troublants résultant du manque de personnel.

«Je reçois entre 35 à 50 textos d’ambulanciers et de répartiteurs qui se plaignent de la lenteur du service à cause des pénuries de personnel partout au Québec, rapporte le créateur de la page, Hal Newman. Et le problème ne touche pas seulement Montréal, mais tout le Québec.» Selon lui, neuf rapports du Bureau du coroner dénoncent des morts d’individus en attente d’une ambulance.

Une pénurie de personnel touche aussi les paramédicaux. Les heures supplémentaires y sont pour beaucoup, de même que les conditions de travail difficiles. «Au final, ce sont les citoyens qui écopent, qui reçoivent de moins bons services à cause du système», dénonce le président du Syndicat du préhospitalier de Montréal et de Laval, Claude Lamarche.

Parfois, les ambulanciers d’Urgences-santé doivent composer avec la moitié des effectifs généralement requis en raison du manque de personnel.

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