Heureux au travail grâce à la reconnaissance de ses compétences
Alors que le Canada augmente ses seuils d’immigration pour combler ses besoins de main-d’œuvre dans les années à venir, François Legault souhaite limiter le nombre de nouveaux arrivants au Québec à 50 000 par année «pour mieux les intégrer».
La reconnaissance des acquis et des compétences des personnes immigrantes joue donc un rôle clé dans la stratégie pour remédier à la pénurie de main-d’œuvre au pays, leur permettant de s’intégrer plus facilement au marché du travail et d’occuper un emploi à la hauteur de leurs compétences.
«C’est une situation gagnant-gagnant», lance Andrés Rubiano, diplômé en mécanique de motocyclettes au SENA (Service national d’apprentissage) en Colombie, qui a réussi à obtenir une certification de qualification professionnelle à titre de technicien de véhicules de loisir, quatorze mois après son arrivée dans la Belle Province.
«Quand on peut exercer le métier qui nous rend heureux, on travaille avec passion, tandis que, si on est obligé de changer de domaine et de travailler dans n’importe quoi à défaut d’obtenir ses équivalences, ça devient lourd», renchérit l’homme de 46 ans, qui rêvait «d’être mécano de Harley Davidson» lorsqu’il travaillait dans son Bogota natal.
À son arrivée au Québec au printemps 2015, M. Rubiano a appris qu’il devait détenir un diplôme d’études professionnelles (DEP) en mécanique automobile et un DEP en mécanique de véhicules de loisir et d’équipement léger pour pouvoir exercer au Québec le métier qu’il pratiquait depuis 2011.
Accompagnement précoce
Ne cédant pas au découragement, M. Rubiano s’est tourné vers l’organisme Qualifications Montréal (devenu Qualifications Québec en 2017), qui l’a accompagné au fil de ses démarches pour percer sur le marché du travail.
Mis sur pied par le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration du Québec, ce portail unique et gratuit vise à aider les personnes candidates à l’immigration ainsi que les personnes immigrantes à faire reconnaître leurs compétences au Québec, quel que soit le lieu où elles les ont acquises.
Le portail permet de connaître les démarches de reconnaissance de compétences requises pour toutes les professions répertoriées par la Classification nationale des professions. Il permet également de savoir s’il y a des démarches à faire pour faire partie d’un ordre professionnel ou pour obtenir un certificat de compétences, tout dépendant si une profession est règlementée ou pas.
On accompagne les gens qui ont reçu leur Certificat de sélection du Québec ou leur Certificat d’acceptation du Québec lorsqu’ils sont encore à l’étranger, parce que le processus de reconnaissance de compétences est souvent long.
Lawrence Brisebois, conseiller en reconnaissance des compétences à Qualifications Québec
«Notre objectif est de démêler le processus et d’aiguiller les personnes vers les différentes possibilités en reconnaissance de diplômes ou en reconnaissance de compétences (RAC), pour qu’elles puissent exercer le métier ou la profession de leur choix», ajoute M. Brisebois.
«J’ai dû remplir d’abord un questionnaire d’une trentaine de pages pour faire évaluer mes connaissances en mécanique de motocyclettes et une fois l’évaluation complétée, j’ai été référé à un garage à Châteauguay, où j’ai pu démontrer pendant un quart de travail que j’étais bel et bien capable de faire mon métier», raconte M. Rubiano.
Barrière de langue
S’il se voyait de plus en plus près de son emploi de rêve, il savait qu’il devait encore franchir la barrière de la langue.
«C’est toute une “job” de réussir à faire ses équivalences pour intégrer le marché du travail, mais c’est encore plus difficile quand tu ne parles pas la langue», dit le Colombien, qui a terminé sa francisation au Centre d’éducation des adultes Champlain à Verdun, parallèlement à ses démarches de reconnaissance d’acquis.
«Ça m’a pris au moins un an pour avoir un niveau acceptable [de français]», précise-t-il.
Les gens francophones qui viennent de sortir de l’école sont embauchés tout de suite même s’ils n’ont pas d’expérience en mécanique, mais lorsque tu ne maîtrises pas la langue, c’est difficile de prouver tes compétences.
Andrés Rubiano
Soutien pour trouver un emploi
La certification de qualification professionnelle que M. Rubiano a pu obtenir grâce au soutien de l’équipe de Qualifications Québec atteste que son expérience et ses qualifications répondent aux exigences de la norme professionnelle établie par le Comité sectoriel de main-d’œuvre des services automobiles du Québec (CSMO-AUTO).
«Ils ont même envoyé mon CV à un réseau d’employeurs potentiels dans la grande région de Montréal, ce qui m’a aussi permis de trouver rapidement un emploi», se réjouit M. Rubiano, employé chez Léo Harley-Davidson à Brossard depuis 2016.
«Pouvoir travailler dans ce qui nous passionne fait toute la différence dans notre vie.»
Trop d’exigences
Si M. Rubiano se dit ravi de son parcours, il constate que le chemin n’est pas aussi droit pour tous les immigrants qui arrivent au Québec avec de l’expérience acquise outre-mer, notamment ceux qui ne peuvent pas percer sur le marché du travail en raison des exigences trop élevées dans leur domaine.
«En construction, par exemple, les gens choisissent souvent de travailler au noir parce qu’on demande trop de certifications, même pour faire de la peinture résidentielle.»
Pour lui, alors que le Québec et le Canada offrent beaucoup de perspectives d’avenir et promeuvent l’équité, il reste encore beaucoup de chemin à faire «pour changer les contraintes qui poussent les immigrants à rentrer chez eux lorsqu’ils ne réussissent pas à trouver leur chemin ici».
Selon son rapport annuel 2021-2022, Qualifications Québec a accompagné 2113 particuliers. Un peu plus du tiers (38%) de ces accompagnements ont été réalisés dans le cadre du programme PRÉDÉPART.
Le guichet a reçu 104 126 visites et plus de 16 000 demandes d’information durant cette période.
Nombre de professions mises à jour en continu: 550
Ce texte a été produit dans le cadre de L’Initiative de journalisme local.