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Le Quartier latin: Berri mal en point, Saint-Denis se relève

La fermeture du mythique magasin de musique Archambault est prévue ce 30 juin. Photo: Robert Dolbec, Métro

Depuis les récentes annonces de la fermeture du magasin Archambault et du café-bar Le Saint-Sulpice, l’avenir du Quartier latin, haut lieu de la culture francophone de Montréal, s’annonce sombre. Y a-t-il lieu de s’inquiéter?

Métro s’est rendu sur place en début de semaine pour tenter d’y voir plus clair. Une quinzaine de piétons et une demi-douzaine de commerçants ont bien voulu s’exprimer sur le sujet.

Sur la rue Saint-Denis, entre Sherbrooke et Sainte-Catherine, le Quartier latin comporte de nombreux pôles d’attraction. La Grande Bibliothèque, l’UQAM, l’Espace St-Denis, la Cinémathèque québécoise, le cégep du Vieux Montréal et le CHUM. Ils attirent en moyenne 120 000 personnes par semaine, selon les données de la Société de développement commercial (SDC) du Quartier latin.

En revanche, plus à l’est, sur la rue Berri, de Sainte-Catherine à Ontario, et malgré la présence de la magnifique Grande Bibliothèque, les parages ont un aspect plus lugubre.

Une rue Berri amochée

Le conseiller municipal du district Saint-Jacques, Robert Beaudry, connaît bien le quartier. Il résume en quelques phrases les principaux obstacles à surmonter: «Le secteur du parc Émilie-Gamelin est situé à la jonction des pôles commerciaux du Village et du Quartier latin. Nous devons composer avec des enjeux complexes, comme l’itinérance, la toxicomanie et la santé mentale.»

De plus, Robert Beaudry confirme que les nombreux bâtiments vacants, jumelés aux chantiers de construction de la Société de transport en commun (STM) dans le secteur, contribuent à créer un sentiment d’insécurité. «Ces travaux dureront jusqu’en 2025. Nous prenons tous les moyens possibles pour en diminuer les impacts», assure-t-il.

Les bâtiments vacants contribuent au sentiment d’insécurité. Photo: Robert Dolbec, Metro Média

Mario Papineau a vécu dans le quartier pendant 35 ans. Il y revient régulièrement pour des rendez-vous médicaux au CHUM ou pour assister à des spectacles au Théâtre St-Denis. «Je ne reconnais plus mon quartier. Dans le secteur de la Place Dupuis, c’est désolant. Le célèbre Da Giovanni a déménagé avec trois ou quatre autres commerces pour faire place à un projet immobilier qui ne fonctionne pas. Et là, juste à côté, on apprend que Archambault va fermer. Je préfère maintenant aller dans le Quartier des spectacles, un peu plus à l’ouest, où tout est propre et bien organisé.»

Mario Papineau Photo: Robert Dolbec Métro Média

Marc Charbonneau a fréquenté le Quartier latin pendant 15 ans. Il revient à l’occasion pour se remémorer de bons souvenirs. Cette semaine, il a tenu à se rendre chez Archambault avant que le commerce ferme définitivement. «C’est vraiment dommage. Je suis un peu nostalgique. C’est la dernière fois que je viens dans ce secteur, car j’irai maintenant acheter mes livres ailleurs.»

Pour sa part, Lucien Desrosiers, un employé de l’UQAM rencontré à proximité de la Grande Bibliothèque, ne se montre pas plus optimiste. «Juste ici, on voit un terminus d’autobus très mal entretenu et l’îlot Voyageur, ce vaste projet immobilier qui n’a jamais levé et qui reste placardé depuis des années.»

Lucien Desrochers Photo: Robert Dolbec Métro Média

La rue Saint-Denis respire mieux

Haut lieu de la culture francophone de Montréal, le Quartier latin est le cœur commercial d’un pôle étudiant majeur. Des milliers d’étudiants de l’UQAM ou du cégep du Vieux Montréal ont fréquenté ses bars et profité du côté ludique du secteur.

Dans ce contexte, l’annonce de la fermeture du café-bar Le Saint-Sulpice après 43 années d’activités a été accueillie avec tristesse par d’anciens habitués nostalgiques de leurs soirées mémorables. Sur le site Facebook du café-bar, 605 personnes ont réagi et 296 personnes ont commenté la publication annonçant la nouvelle.

Néanmoins, la fermeture du Saint-Sulpice ne freinera pas l’essor que prend la rue Saint-Denis depuis la fin de la pandémie, assurent des commerçants du secteur.

Selon Dominique A., gérante du resto VEGO, tout est revenu à la normale depuis la fin de la pandémie. «Nous avons la chance d’avoir une clientèle régulière composée d’étudiants, d’enseignants de l’UQAM ou du cégep du Vieux Montréal et des employés de la Grande Bibliothèque. Et mis à part la pénurie de main-d’œuvre, j’entrevois l’avenir avec optimisme.»

Dominique A., gérante du resto Vego Photo: Robert Dolbec, Métro Média

Pour sa part, le propriétaire du pub L’Île Noire, Michel Lavallée, est encore plus optimiste. Ayant tenu son commerce durant 20 ans sur la rue Ontario et depuis maintenant 13 ans sur la rue Saint-Denis, il pose un regard historique qui lui permet d’amener certaines nuances. «Il y a toujours eu une différence entre le Quartier latin et la place Émilie-Gamelin. Ici, il n’y a plus de violence pas plus que de vendeurs de drogues comme dans les années 1970 à 1990», soutient-il.

Michel Lavallée croit également que la fermeture du Saint-Sulpice était prévisible et qu’elle ne nuira pas à l’avenir du Quartier latin. «Le Saint-Sulpice est fermé depuis plus 18 mois et il est à vendre depuis plus de 10 ans. Le seul et unique problème se résume au prix exorbitant demandé par son propriétaire», tranche-t-il.

Michel Lavallée, propriétaire du pub L’Île Noire Photo: Robert Dolbec, Metro Média

Michel Lavallée affirme également que la vie culturelle est plus que jamais présente sur la rue Saint-Denis. «L’arrivée de la bibliothèque Saint-Sulpice et la Maison de la chanson et de la musique du Québec amènent un vent de fraîcheur. De plus, de nouveaux restaurants ouvrent et il n’y a pratiquement plus de bâtiments vacants.»

Le conseiller municipal Robert Beaudry ne contredira certainement pas les propos du propriétaire du pub L’Île Noire. «L’an dernier, nous avons piétonnisé la rue et ce fut un succès. De plus, plusieurs activités d’animation sont instaurées, par exemple la grande glissade entre les rues Sherbrooke et Ontario qui attirera des milliers de personnes à la fin de février.»

Robert Beaudry est également fier de constater l’arrivée de plusieurs microbrasseries dans le secteur comme le Saint-Bock, le Saint-Ciboire et les 3 Brasseurs, établissements venant préserver le cachet si particulier du Quartier latin.

Finalement, les étudiants qui fréquentent actuellement l’UQAM ou le cégep du Vieux Montréal ne se préoccupent vraiment pas des doléances des étudiants nostalgiques qui les ont précédés. Les commentaires de Ludovic Pellan et de Gérard Lussier le confirment.

Ludovic Pellan, étudiant au cégep du Vieux Montréal Photo: Robert Dolbec, Métro Média

«Je suis arrivé au mois d’avril l’an dernier et j’ai fait à peu près tous les restos et les bars du Quartier latin. C’est drôlement agréable de vivre dans ce coin de la ville», mentionne le premier.

«Je sors dans les bars avec d’autres étudiants et j’invite souvent des amis qui sont à l’extérieur du quartier à venir découvrir les lieux avec moi. C’est certain que l’on ne peut pas s’ennuyer avec un environnement comme ça», indique le second.

Gérard Lussier, étudiant Photo: Robert Dolbec, Métro Média

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