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Des migrants demandent au fédéral la suspension des expulsions et la reouverture de Roxham

Des migrants à statut précaire et des membres du Centre de travailleuses et travailleurs immigrants à Montréal se sont rassemblés devant le bureau de Justin Trudeau le 3 avril pour revendiquer l'arrêt des détentions et des menaces d'expulsions du pays, ainsi que l'abolition de l'Entente sur les tiers pays sûrs. Photo: Karla Meza

Des personnes migrantes à statut précaire et des membres du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI) de Montréal ont déposé lundi, au bureau de Justin Trudeau, des lettres demandant la suspension immédiate des détentions et des expulsions de migrants, l’implantation d’un programme fédéral de régularisation des personnes sans statut et la réouverture immédiate du chemin Roxham.

Les lettres destinées au premier ministre ont été signées par près d’une centaine de citoyens et organismes qui soutiennent les revendications de la délégation.  

Cinq personnes migrantes, incluant deux adolescentes à risque de perdre leur statut migratoire, ont exprimé leurs craintes face au risque de renvoi vers le pays qu’ils ont fui et au récent élargissement de l’Entente sur les tiers pays sûrs, dont ils demandent l’abolition immédiate.

Leur avenir sur la corde raide

«La vie des enfants et des adolescents [demandeurs d’asile] est liée à celle de nos parents. On ressent le même stress en lien avec l’immigration», lance Nandini Gupta, 17 ans, qui craint d’être renvoyée au pays que ses parents ont fui il y a cinq ans avec elle et sa sœur cadette.

«On peut développer des problèmes de santé mentale en raison de l’incertitude et de la peur de recevoir une réponse négative de notre demande d’asile qui détruirait nos rêves», ajoute l’élève de 5e secondaire.

Si la situation de sa famille n’est pas régularisée dans les prochains mois, Nandini pourrait ne pas être en mesure de poursuivre ses études postsecondaires au cégep, faute de moyens pour payer les frais de scolarité demandés aux non-résidents du Québec.

C’était dur de s’adapter à un nouvel environnement et d’apprendre une nouvelle langue. Je ne voudrais pas recommencer ma vie dans un pays qui n’est pas le mien.

Nandini Gupta, 17 ans
Nandika et Nandini Gupta Photo: Karla Meza, Métro

La jeune femme déplore le risque renvoi en Inde qu’elle et sa famille courent si l’appel au refus de leur demande d’asile est rebuté, ce qui ferait fi de leur intégration et leur contribution à l’économie et à la société du Québec depuis cinq ans, rappelle-t-elle.

Nandini souligne son implication bénévole dans plusieurs projets communautaires aux cotés de sa sœur cadette Nandika, pour venir en aide à autrui. Malgré son jeune âge, elle a aussi travaillé en faisant de l’accompagnement de personnes aînées et d’enfants avec besoins spéciaux dans un camp d’été.

En outre, les sœurs soutiennent avoir «perdu» des connaissances de leur langues maternelles, le punjabi et le hindi, depuis leur arrivée.

«On s’est bien intégrées à la société, on parle bien le français. J’ai déjà oublié tout sur mon pays d’origine», dit Nandika Gupta, 14 ans, qui redoute elle aussi un retour forcé en Inde.

Ce n’est pas un pays sécuritaire pour les femmes. Quand j’étais plus jeune, je faisais de l’anxiété lorsque j’étais entourée de gens, mais je n’en fais plus aujourd’hui, car je me sens en sécurité ici.

Nandika Gupta, 14 ans

La régularisation du statut des sœurs Gupta et de leur parents est indispensable pour qu’ils puissent «continuer à jouir des droits fondamentaux, à vivre en dignité et à contribuer à notre société», a énoncé le CTI dans un communiqué.

Gulzar Almad, Sukhjinder Singh et Gaurav Sharma Photo : Karla Meza, Métro

Crainte pour leur vie

Des centaines de milliers de personnes vivent sans statut migratoire au Canada et dans la peur d’être renvoyées dans leur pays d’origine, ce qui «mettrait leur vie en danger», soutient le CTI.

Faisant partie des Sikhs qui ont fui la persécution en Inde, Sukhjinder Singh craint la détention et le renvoi au bercail depuis que sa demande d’asile a été refusée au Québec.

«La peur que moi et ma femme ressentons commence à se traduire en dépression», dit le sexagénaire.

«Nous demandons au gouvernement de considérer la souffrance de toutes les personnes qui vivent dans une situation de précarité extrême, dont le niveau d’anxiété est très élevé», dit Gaurav Sharma, membre et porte-parole du CTI, organisme qui réclame au fédéral la mise en œuvre immédiate d’un programme de régulation inclusif et permanent.

Impact des politiques migratoires

Le 16 décembre 2021, Justin Trudeau demandait au ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, Sean Fraser, d’étudier les moyens pour régulariser les personnes sans papiers au pays et actualiser l’Entente sur les tiers pays sûrs.

Alors que l’inaction du gouvernement prolonge la précarité d’un nombre estimé de 500 000 personnes sans statut au Canada, la récente décision de fermer le chemin Roxham et d’élargir l’Entente sur les tiers pays surs entrave l’accueil des demandeurs d’asile et «illustre à quel point le gouvernement sous-estime les effets collatéraux des politiques anti-migratoires», selon le CTI.

Myriam Bourgeois, porte-parole de l’organisme, soutient que «les nouvelles mesures poussent vers une situation encore plus périlleuse un plus grand nombre de personnes migrantes qui franchissent la frontière en fuyant des problèmes insoutenables dans leur pays».

Ce texte a été produit dans le cadre de L’Initiative de journalisme local.

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