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Le verdissement de Montréal est ralenti malgré les efforts

Vue aérienne de l'est de Montréal.
Vue aérienne de l'est de Montréal. Photo: iStock

Montréal fait la guerre aux îlots de chaleur urbains, ces zones où les températures sont nettement plus élevées que dans les environs. La lutte contre cette hausse de température causée par l’urbanisation nécessite des mesures de verdissement ambitieuses. Or, les effets de ces dernières ont été ralentis ces dernières années.

Sur la carte ci-dessous, on peut visualiser les îlots de chaleur tels qu’ils étaient en 2021, lors du dernier recensement des températures:

Les couleurs ne représentent pas des températures absolues, mais des températures relatives entre chaque secteur. En violet foncé, donc, on retrouve les zones les plus fraîches de Montréal, et en jaune clair, les plus chaudes. La carte représente les températures d’un niveau de 1 à 5 selon l’écart observé.

Comment se fait-il que les îlots de chaleur ne semblent pas disparaître, malgré la plantation d’arbres?

D’après Maxime Faubert, chercheur en verdissement urbain à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et à la Fondation David Suzuki, la situation est complexe. «C’est difficile à calculer pour l’instant, parce qu’il faut prendre tous les efforts de verdissement dans le contexte général. Entre 2012 et 2022, il y a eu 100 000 arbres plantés sur des terrains privés», a-t-il expliqué en entrevue avec Métro.

Cependant, l’agrile du frêne, un insecte ravageur, a entraîné l’abattage de milliers d’arbres matures. «Entre 2012 et 2020, c’est autour de 47 000 frênes qui ont été coupés à Montréal. Ces frênes étaient de gros arbres matures pour la majorité», ajoute M. Faubert.

Ainsi, s’il y a beaucoup plus d’arbres, l’espace qu’ils occupent a diminué ces dernières années.

De plus en plus d’arbres, mais de moins en moins de canopée

L’indice de canopée mesure le pourcentage de couverture de la canopée ou des arbres par rapport à l’ensemble du territoire. Il permet de suivre l’évolution du couvert forestier urbain. Selon la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), cet indice a augmenté de 2011 à 2017, puis a chuté jusqu’en 2021.

Le chercheur note que cela est dû en partie à l’abattage des frênes, mais aussi à l’étalement urbain et au développement dans des zones auparavant boisées.

On remarque d’ailleurs que la superficie de canopée a augmenté jusqu’en 2017, où elle a atteint 8069 hectares (ha). Quatre ans plus tard, en 2021, elle était réduite à 7488 ha, alors que dans la même période, la Ville de Montréal avait planté 70 895 arbres, pour 49 543 abattages.

Pourtant, la diminution de l’indice de canopée ne signifie pas l’échec du verdissement, selon le chercheur. «Les arbres, ce sont des infrastructures qui prennent de la valeur avec le temps. Au fil des années, les arbres de petite taille vont grandir et contribuer davantage à réduire les îlots de chaleur, en faisant de l’ombrage et par l’évaporation de l’eau, qui rafraîchit beaucoup.»

Selon l’Institut national de santé publique du Québec, le verdissement urbain, qui inclut la plantation d’arbres, mais aussi d’autres structures végétalisées comme les toits et les murs végétalisés, est une des mesures clés pour combattre les îlots de chaleur urbains.

«En allant planter des arbres, on réduit les températures ambiantes dans les moments de canicule, donc on va protéger les citoyens et citoyennes dans ces zones-là. Et il n’y a pas juste les plantations d’arbres qui sont importantes, mais aussi tout type de structures végétalisées», rappelle Maxime Faubert.

Un record de plantations en 2022

Dans un courriel, envoyé à Métro suite à la publication de cet article, la Ville de Montréal souligne avoir planté 241 000 arbres dans les zones aménagées* et 65 524 arbres dans les zones boisées* pour un total de 307 339 arbres depuis 2012. Plus de 53 000 arbres ont été plantés à Montréal en 2022, un record absolu depuis la création du programme de forêt urbaine.

La Ville indique pour sa part un indice de canopée de 25,3% en 2019, indiquant que l’objectif de 25% d’ici à 2025 pour l’agglomération a été atteint 6 ans plus tôt que prévu. Au-delà des limites terrestres de la Ville de Montréal, ce chiffre prend également en compte d’autres villes liées de l’île de Montréal, comme Beaconsfield (indice de canopée à 40,84 %), Senneville (56,39%) ou Westmount (34,86%).

Précisons que Montréal s’est doté d’un plan ambitieux pour son verdissement. Il est d’ailleurs précisé dans celui-ci qu’il est proposé «aux villes liées [telles que celles citées ci-dessus] de planter 22 000 arbres (en sus du remplacement des arbres abattus) sur leur territoire», soit «7 % de l’objectif total» du plan. Des plantations évaluées à 20 M$, «montant qui sera assumé par ces dernières».

Notons également que la Ville de Montréal utilise une méthodologie différente de celle de la CMM – dont les données sont les plus récentes. Les données disponibles de la Ville concernant l’indice de canopée couvraient seulement les années 2007, 2017 et 2019. La méthodologie et les sources utilisées pour le calcul fait par Montréal ont également changé au fil du temps.

Un changement qui prendra du temps

Il explique que la diversification des espèces plantées est également un élément crucial pour prévenir des ravages semblables à ceux causés par l’agrile du frêne. «Maintenant, on essaie de diversifier beaucoup plus les espèces qui sont plantées pour justement éviter qu’il y ait des ravages comme ça, c’est la diversité fonctionnelle.»

Un agrile du frêne, l’insecte responsable de milliers de coupes d’arbres à Montréal. Photo: iStock

Même si les petits arbres plantés ne peuvent pas compenser immédiatement la perte de grands arbres matures, ils vont croître et fournir plus d’ombrage, ce qui permettra d’atténuer les températures avec le temps.

M. Faubert insiste sur la nécessité de la patience: «C’est sûr que ça va être difficile d’avoir un différentiel moins grand quand on compare des quartiers où les arbres sont matures et couvrent la rue entièrement. C’est difficile d’avoir un équivalent instantané avec de nouveaux arbres, de petits arbres plantés.»

Mais comme le note le chercheur en verdissement, ces efforts nécessitent du temps pour porter leurs fruits. «C’est pour l’instant difficile de voir les effets concrets des plantations, c’est en prévision, souligne-t-il. Ces arbres vont croître et fournir plus d’ombrage. Ils vont officier davantage au fil des années.» Une note d’espoir contre le réchauffement urbain.

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