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Tendre la main sur deux roues

Un sourire. C’est de cette façon que Daniel remercie la passante qui vient de lui donner une pièce de 2 $.

L’homme de 50 ans à la barbiche blanche et à la casquette passe une
bonne partie de la journée dans la station de métro McGill à quêter.
Petit détail : il est handicapé physique et mental et est en chaise
roulante.

Les personnes handicapées qui mendient ne sont pas monnaie courante. Il
est d’ailleurs difficile de brosser un portrait de cette population.
Certains vivent dans la rue et d’autres ont un toit.

C’est le cas de Daniel qui vit avec son père de 70 ans. C’est lui qui
vient le porter en métro et par les escaliers roulants sur son «lieu de
travail».


Plus dépendants, mais plus réceptifs

Même si Daniel a un toit sur la tête, il répond parfois aux questions
des travailleurs de rue qui s’assurent de son confort. «Ils me
demandent si j’ai un endroit où coucher», explique-t-il en pointant les
lettres sur son tableau qui l’aide à communiquer.

Les personnes comme lui dépendent de l’aide des gens autour. Théo, un
homme de 37 ans en chaise roulante qui quête presque chaque jour sur
Sainte-Catherine, le confirme : «Ce sont des gens de la rue qui
m’aident à me déplacer.» Particulièrement cet hiver, le déplacement en
chaise roulante est ardu.

«Les personnes handicapées sont plus réceptives parce qu’elles ont
souvent moins le courage de se battre. Elles ont besoin d’une main pour
les aider», avance Éric Cusson, intervenant à la Maison du Père. Il
souligne toutefois le manque de ressources. «Par exemple, l’Institut de
réadaptation de Montréal s’occupe de la réparation des chaises
roulantes. L’autre jour, j’ai fait un appel parce qu’un gars avait un
flat sur sa chaise. Ça a pris trois jours avant qu’on vienne la
réparer. C’est inacceptable.»


Les refuges, pas pour tout le monde

Les personnes handicapées sont exclues de la clientèle de plusieurs centres. À la Maison du Père, on tend la main aux handicapés, qui reçoivent les mêmes
services que les autres. Mais ceux-ci doivent être autonomes, sinon ils
se butent à une porte close. «Ça m’est déjà arrivé de refuser du monde.
Il y en a qui ne sont pas autonomes. Moi-même je ne sais pas qu’elle
est leur alternative.

À l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal, on est au
fait du phénomène. «Nous sommes conscients que tous les refuges ne sont
pas en mesure d’accueillir les personnes handicapées», explique Mathieu
Leroux, porte-parole de l’Agence.

Pour l’instant, l’Agence étudie la situation avec son Plan d’action
intersectoriel 2007-2012 qui regroupe des intervenants du domaine de la
santé, de la Ville et des organismes communautaires. «On tente
d’identifier un ou deux centres qui pourraient accueillir ces
personnes. Nous avons reçu le son de cloche des organismes», conclut M.
Leroux.


Un choix monétaire

Pour les handicapés itinérants, plusieurs raisons peuvent expliquer
pourquoi ils se retrouvent dans la rue, explique Éric Cusson. Un
problème de toxicomanie ou le refus de travailler figurent parmi
celles-ci. «Entre travailler au salaire minimum et mendier, plusieurs
vont faire le choix de ne pas travailler», lance Éric Cusson.

Il existe des programmes d’insertion au travail sur des plateaux
adaptés. Mais avec l’argent qu’ils gagnent en quêtant et le chèque de
bien-être social assorti d’une prime pour leur handicap, le choix est
souvent facile.

«Le commun des mortels va entraider davantage une personne handicapée», reconnaît M. Cusson.
Impossible de connaître le salaire de Daniel. «C’est privé»,
insiste-t-il. M. Cusson parle toutefois de journée de 50 à 100 $. Théo avoue aussi qu’on lui donne plus que d’autres parce qu’il est en chaise roulante.

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