Les péages incontournables pour le Grand Montréal
Même si le ministre des Transports, Robert Poëti, refuse de l’envisager, le retour des péages est incontournable à Montréal afin de réduire la congestion routière et de financer les infrastructures, d’après l’expert en transport intelligent, Jean-François Barsoum.
«À long terme, c’est inévitable qu’on va se diriger vers un système de péage», a affirmé mardi le chef du groupe conseil Écologie et innovation de IBM en entrevue à Métro.
Les voitures devenant de plus en plus efficaces, les revenus de la taxe sur l’essence, qui servent notamment à l’entretien des infrastructures, sont appelés à diminuer. «C’est quelque chose qu’on voit partout», a dit M. Barsoum. Sans compter la Stratégie d’électrification des transports du gouvernement du Québec qui a comme objectif d’ajouter 100 000 véhicules électriques au cours des cinq prochaines années.
«Quand on ajoute des infrastructures, on les paye dans les décennies suivantes à l’aide des impôts et des taxes de la population en croissance, a ajouté Jean-François Barsoum. Sauf que la croissance n’est pas aussi grande qu’elle l’était quand on faisait des grands travaux d’infrastructures. Si on continue à ajouter des infrastructures, ça va coûter très cher.»
Qui plus est, les coûts économiques de la congestion automobile ne font qu’augmenter. Ils sont présentement évalués à près de 1,4G$. «Plus il y a de congestion, moins il y a d’emploi», a souligné l’expert du transport intelligent, en se basant sur des études universitaires selon lesquelles la congestion routière freine la création d’emplois.
«Le plus grand frein [qui incite] les gens à ne pas visiter le centre-ville, ce n’est pas le péage, ce n’est pas le coût du stationnement, c’est le trafic. Les gens ont peur de se faire prendre dans les embouteillages en entrant et sortant de la ville.» – Jean-François Barsoum, expert en transport intelligent et chef du groupe conseil Écologie et innovation d’IBM
Si les péages reviennent sur les routes du Grand Montréal, ils ne nécessiteraient pas l’installation de guérites où les automobilistes s’arrêteraient pour lancer leur monnaie comme c’était le cas jusqu’en 1990 sur le pont Champlain ou même de l’implantation de transpondeur, comme sur les autoroutes 25 et 30. À Stockholm, de simples caméras pourraient capter les plaques d’immatriculation afin de facturer le passage.
Ces caméras pourraient être disposées sur les ponts où les tarifs du péage seraient modulés selon les heures de la journée. Elles pourraient aussi se retrouver le long des autoroutes. Jean-François Barsoum suggère que sur certaines autoroutes, une voie soit réservée au co-voiturage, mais aussi à l’auto-solo si le propriétaire est prêt à ouvrir son portefeuille. Les autres voies seraient ouvertes à tous, mais elles seraient sujettes à la congestion automobile. «Ça donnerait le choix aux gens», a dit M. Barsoum.
Une autre option serait la taxe kilométrique. Plutôt que de facturer les automobilistes pour leur passage sur un tronçon de route précis, ces derniers devraient payer pour leur utilisation de leur réseau routier.
«On regarderait durant le renouvellement des immatriculations le kilométrage qui a été fait, a mentionné l’expert en transport intelligent. Mais si on veut varier selon l’heure et le type d’utilisation, il faudrait mettre un dispositif dans la voiture. Les voitures qui seront vendues à partir de l’an prochain auront ce dispositif.»
Avant d’implanter un nouveau système de péage sur l’ensemble du territoire du Grand Montréal, il faudrait d’abord réaliser un projet pilote, d’après M. Barsoum, et peut-être organiser un référendum par la suite pour valider l’adhésion de la population. En 2006, les citoyens de Stockholm ont approuvé la mise en place permanente des péages après les avoir rejetés l’année précédente.
«Statu quo intenable»
L’Alliance Transit, qui réclame de nouveaux moyens de financement des transports en commun, réclame au plus vite l’implantation de péages dans la région de Montréal.
- «Le statu quo n’est pas tenable», a dit le responsable des campagnes de transport, GES, aménagement urbain du Conseil régional de l’environnement de Montréal, Félix Gravel. Ce dernier a déploré la réaction du ministre Poëti, qui a rejeté cette semaine le retour des péages.
- La taxe kilométrique est préconisée par l’Alliance transit, qui a préféré ne pas se prononcer sur les modalités de son implantation.