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Allergies: premier pas vers l'immunothérapie orale

Children's Hand Holding Peanuts, isolated on a white background Photo: Getty Images/iStockphoto
Vicky Fragasso-Marquis, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Au cours des prochains mois, plusieurs dizaines d’enfants atteints d’allergies alimentaires seront reçus à la nouvelle clinique d’immunothérapie orale du CHU Sainte-Justine, à Montréal, pour les désensibiliser à leur allergène. Et les instigateurs de cette initiative espèrent que ce projet-pilote de trois ans fasse des petits ailleurs au Québec.

L’immunothérapie consiste à consommer chaque jour des portions de l’allergène, dont les doses grimpent graduellement. Le traitement vise d’abord à améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de plusieurs allergies qui stressent à l’idée d’ingérer des aliments allergènes.

L’immunothérapie orale peut permettre aux patients d’éviter les réactions allergiques lorsqu’ils consomment accidentellement les aliments problématiques. Le taux de succès se situe entre 70 et 80 pour cent.

«Quand tu sors au restaurant, tu t’en vas des amis, à l’école. Admettons que ta dose de sensibilisation est de quatre peanuts par jour, tu n’auras pas un accident, par hasard, avec des traces ou avec une arachide», a illustré le docteur Philippe Bégin, un allergologue-immunologue et spécialiste en immunothérapie orale.

Dans certains cas, après plusieurs années, la désensibilisation peut même devenir permanente.

«Il y en a qui sont capables d’arrêter de prendre le traitement et la réactivité ne revient pas. C’est super, quand ça arrive, mais à l’heure actuelle, on ne sait pas qui va avoir ce bénéfice-là», a nuancé l’expert en marge d’une conférence à l’hôpital pour enfants qui visait à informer les parents de ce traitement.

«Une première étape»

L’objectif de la clinique de Sainte-Justine n’est pas de faire de la recherche, a indiqué le docteur Bégin. Il s’agit en fait d’offrir ces traitements à de jeunes patients pour éventuellement transférer l’expertise à d’autres futurs centres. À terme, ils espèrent traiter environ 775 patients.

«C’est un premier pas vers une implémentation éventuellement à plus grande échelle», a-t-il résumé en marge d’une conférence sur le sujet qui avait lieu dimanche après-midi à l’hôpital pour enfants.

Aux États-Unis, l’immunothérapie orale est beaucoup plus répandue dans les cliniques privées. Mais au Québec, le système public de santé fait face à plusieurs défis et n’a pas nécessairement beaucoup de fonds pour ces traitements.

«Il faut avoir cette vision-là pour savoir comment on pourra faire à échéance pour offrir ce traitement à tous ceux qui le demandent», a-t-il soutenu.

L’organisme Bye Bye Allergie, l’un des instigateurs du projet, a amassé 780 000 $ pour ouvrir le centre de Sainte-Justine. Le gouvernement du Québec a investi lui-même plus de 782 000 $ dans l’initiative.

«Le prochain volet de notre mission, c’est d’amener maintenant le traitement ailleurs au Québec. Donc, que ce projet du CHU Sainte-Justine se propage ailleurs», a affirmé Sophie Beugnot, présidente de Bye Bye Allergie.

«Il y a 60 000 enfants allergiques au Québec, ce n’est pas forcément toutes les familles qui auront accès au traitement, mais on peut imaginer qu’il y en a plus de 775 qui en veulent. Et ils se trouvent dans toutes les régions du Québec, pas seulement dans la grande région de Montréal.»

Bye Bye Allergie a pour objectif de recueillir au moins de 300 000 $ cette année pour aider le centre de Sainte-Justine.

Dans un document de recherche signé par le docteur Bégin et le docteur François Graham, ces spécialistes incitent le gouvernement à aller au-delà des coûts.

«La justification d’offrir ou non l’immunothérapie orale chez les patients avec allergie alimentaire dans notre système public ne devrait pas reposer uniquement sur des désirs de rentabilité mais également sur un souci d’améliorer la qualité de vie de la population desservie», concluent-ils.

En annonçant l’ouverture du centre à la fin du mois d’août, le ministre de la Santé Gaétan Barrette avait déclaré qu’il s’agissait là d’une première étape «pour développer des nouveaux traitements d’ITO à travers le Québec».

Un traitement rigoureux

Le docteur Bégin ne recommande pas à toutes les personnes souffrant d’allergies de suivre ce traitement. Ce sont seulement celles dont la qualité de vie est affectée qui devraient s’y intéresser.

«Quelqu’un qui vit très bien avec ces allergies depuis 10 ans qui dit: « Bien moi, je n’ai pas de problème et je me suis bien adapté », ce n’est pas vraiment ceux à qui ça s’adresse, parce que c’est beaucoup de travail», a-t-il précisé.

Car l’immunothérapie est très exigeante pour le patient. Il doit visiter régulièrement l’hôpital pour augmenter les doses, prendre ses portions chaque jour à la maison et le traitement peut parfois occasionner des réactions allergiques.

Dans la grande majorité des cas, ce sont toutefois des réactions allergiques mineures — démangeaisons à la bouche ou à la gorge et inconfort gastrique.

«Ça prend des gens très, très motivés et très, très assidus», a-t-il affirmé.

Pour l’instant, l’initiative s’adresse d’abord aux enfants parce que ce sont pour eux que le traitement s’annonce plus prometteur, selon le docteur.

D’autres recherches devront être effectuées pour déterminer s’il peut être administré aux adultes, a-t-il ajouté.

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