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L'État s'est désengagé de la lutte contre le VIH

blood drop for blood testing.Nurses collect blood from blood donor for blood donation Photo: Getty Images/iStockphoto
Magdaline Boutros, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Face au désengagement de l’État dans la lutte contre l’épidémie de VIH-sida, des organismes communautaires doivent prendre le relais du gouvernement et mener eux-mêmes des campagnes de prévention, déplore Dr Réjean Thomas.

La première Journée nationale de dépistage du VIH était organisée mercredi par la Société canadienne du sida, de concert avec des organismes communautaires oeuvrant aux quatre coins du pays.

Une quarantaine de sites offraient la possibilité de passer un test rapide, permettant la détection du virus en moins de 60 secondes.

L’objectif de cette journée était notamment de «réduire la stigmatisation associée au fait de se faire dépister», explique Gary Lacasse, directeur général de la Société canadienne du sida.

Mais selon Dr Réjean Thomas, président et fondateur de la clinique médicale L’Actuel, il est clair que de telles campagnes devraient être prises en charge par le gouvernement.

«Ça démontre à quel point le VIH est un peu un problème de santé publique oublié», déplore-t-il en entrevue à La Presse canadienne.

De telles campagnes devraient cibler non seulement le VIH-sida mais également l’ensemble des infections transmises sexuellement (ITS). «Il n’y a plus de campagne de prévention depuis des années. Il n’y a même plus de campagne de prévention du sida le 1er décembre, la Journée mondiale du sida», s’indigne Dr Thomas, soulignant que de telles campagnes ne doivent pas se limiter «à un « poster » sur le mur».

L’abandon des cours d’éducation sexuelle dans les écoles s’est accompagné d’une réelle explosion des ITS, nommément la gonorrhée, la syphilis et la chlamydia. «En 1998, il y a avait trois cas de syphilis au Québec, expose Dr Thomas. Dans les dernières années, on est à 1000 cas par an.»

Des cas de syphilis congénitale ont également été détectés. «Il y a des enfants qui sont nés avec la syphilis et qui sont morts… au Québec», laisse-t-il tomber.

Pendant ce temps, le financement gouvernemental pour soutenir la recherche sur le VIH-sida et pour appuyer les organismes communautaires oeuvrant auprès des personnes vivant avec le VIH-sida s’est effrité, rapporte Dr Thomas.

Dépistage précoce

Et pourtant, les efforts de dépistage sont névralgiques. Actuellement, le cinquième des personnes vivant avec le VIH au Canada ne savent pas qu’elles sont séropositives.

C’est donc 20 pour cent de la population infectée qui ne reçoit pas le traitement approprié pour contrôler la maladie et qui contribue à propager l’épidémie. «Le 20 pour cent des gens qui ne connaissent pas leur statut VIH sont responsables de 50 pour cent des nouvelles infections», mentionne Dr Thomas.

Si le diagnostic est établi de manière précoce, le traitement peut aujourd’hui réduire la charge virale à un niveau indétectable, ce qui diminue le risque de transmission du virus à un niveau extrêmement faible.

Selon Dr Thomas, 25 pour cent des personnes qui ont reçu un diagnostic l’an dernier avaient déjà un système immunitaire très détérioré, ce qui laisse croire qu’elles étaient infectées depuis probablement cinq à dix ans.

Et 50 pour cent de ceux qui ont été diagnostiqués l’an dernier n’avaient jamais passé de test antérieurement.

Alors pourquoi tant de personnes tardent encore aujourd’hui au Canada à obtenir un diagnostic?

Selon Dr Thomas, la réponse se trouve au niveau de la stigmatisation. «C’est peut-être là où on a le moins évolué dans notre société», note-t-il.

«On connaît bien la maladie, on a de bons traitements, on rend les gens indétectables. En même temps, on a toujours 300 nouveaux cas de VIH par année au Québec, c’est trop.»

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