Le commissaire à la protection de la vie privée se méfie des mégadonnées
OTTAWA — Le commissaire à la protection de la vie privée craint que les droits des Canadiens soient rognés alors que des entreprises, mais aussi des agences publiques, se précipitent pour engranger et exploiter des mégadonnées numériques.
Dans une lettre au ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique, Navdeep Bains, le commissaire à la protection de la vie privée du Canada, Daniel Therrien, estime que le gouvernement doit prendre des mesures plus rigoureuses pour protéger la vie privée numérique des Canadiens face à l’évolution extrêmement rapide des moyens de colliger des informations confidentielles sur les citoyens et les clients.
Le commissaire soutient que «la puissance des technologies numériques et des mégadonnées et leur capacité anticipée à stimuler la productivité, la croissance et la compétitivité et à améliorer nos vies de différentes façons font l’objet de grandes ambitions». Mais en même temps, écrit-il, «nous avons atteint un moment critique où les droits à la vie privée et les valeurs démocratiques sont en jeu».
Selon M. Therrien, le gouvernement a mis du temps à implanter un cadre juridique garantissant le maintien de la confiance des Canadiens dans l’économie numérique, ce qui le préoccupe de plus en plus.
Le commissaire ajoute que même «des géants de la haute technologie deviennent de fervents partisans d’une réglementation crédible» sur l’utilisation de l’extraction de données, afin de conserver la confiance de la population, notamment dans la foulée de l’affaire Cambridge Analytica-Facebook plus tôt cette année.
M. Therrien estime que les Canadiens ont besoin de lois plus strictes, et non le contraire, en matière de protection de la vie privée. Il presse le gouvernement libéral de créer une nouvelle loi pour protéger les données privées des Canadiens — et donner à son bureau plus de pouvoirs d’enquête et d’exécution.
Le commissaire Therrien écrit au ministre dans le cadre des consultations nationales sur le numérique et les données, lancées par le gouvernement libéral l’été dernier.
«Je vous transmets ces commentaires dans le but de promouvoir une approche plus équilibrée au Canada et de veiller à ce que la valorisation des données et le développement de l’économie numérique ne l’emportent pas sur la protection de la vie privée comme valeur importante dans notre société», conclut M. Therrien dans sa lettre datée du 23 novembre et publiée mercredi sur le site du bureau du commissaire à la protection de la vie privée.