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Trudeau veut confirmer la réforme du Sénat

Sean Kilpatrick / La Presse Canadienne Photo: Sean Kilpatrick / La Presse Canadienne

OTTAWA — Le premier ministre Justin Trudeau a révélé que son gouvernement espérait effectuer des modifications législatives afin de confirmer la transformation du Sénat en une chambre plus indépendante et moins partisane, et de rendre difficile tout effort pour revenir en arrière.

M. Trudeau a indiqué que les libéraux amenderaient la Loi sur le Parlement du Canada, qui détaille les pouvoirs et les privilèges des députés et des sénateurs, afin qu’elle reflète mieux la nouvelle réalité du Sénat, dont la plupart des membres siègent maintenant comme indépendants et ne sont affiliés à aucun parti politique.

«Nous allons essayer de rendre cela juste, a déclaré le premier ministre dans une entrevue de fin d’année avec le bureau de La Presse canadienne à Ottawa. Nous allons essayer de le faire avant les élections.»

Réaliser ce projet avant le scrutin de l’automne prochain est crucial pour les sénateurs indépendants, qui craignent que les réformes de Justin Trudeau soient abolies si les libéraux ne réussissent pas à se faire réélire.

Le chef du Parti conservateur du Canada, Andrew Scheer, a déjà prévenu que s’il devenait premier ministre, il reviendrait aux nominations partisanes et n’accorderait des sièges de sénateurs qu’à des conservateurs.

M. Trudeau avait chassé les sénateurs du caucus libéral en 2014. Depuis son arrivée au pouvoir en 2015, il n’a nommé que des sénateurs recommandés par un comité consultatif indépendant dans un effort pour redonner au Sénat son rôle de chambre indépendante centrée sur la réflexion.

Sur les 105 sénateurs, 54 sont désormais des indépendants qui se sont réunis au sein du Groupe des sénateurs indépendants (GSI) afin d’avoir plus de poids. Le reste de la chambre est constituée de 31 conservateurs, 10 libéraux et 10 non affiliés. Les conservateurs forment le seul groupe ouvertement partisan du Sénat.

La Loi sur le Parlement du Canada n’admet toutefois l’existence que de deux groupes partisans au sein de la chambre haute: celui du parti au pouvoir et celui de l’opposition. Les deux entités ont droit à des fonds de recherche, à du temps pour débattre des projets de loi, à des sièges au sein des différents comités et à un rôle dans la gestion des activités quotidiennes du Sénat, comme décider du moment d’ajourner les débats.

Les sénateurs ont accepté au pied levé certains accommodements pour le nombre grandissant d’indépendants dans leurs rangs, leur octroyant quelques fonds de recherche et leur permettant de participer à des comités. Mais les leaders du GSI aimeraient que ces avantages soient détaillés de manière explicite dans la Loi sur le Parlement du Canada et garantis par cette dernière. Et puisque ces changements impliqueraient l’allocation de ressources financières, ils estiment qu’ils ne peuvent pas être réalisés par le Sénat, seulement par le gouvernement à la Chambre des communes.

La sénatrice Raymonde Saint-Germain, la facilitatrice adjointe du GSI, a déclaré que modifier la loi est la seule façon de donner aux sénateurs indépendants une «voix permanente» et de «préserver cette réforme essentielle pour un Sénat indépendant et non partisan».

«La réforme que le premier ministre Trudeau a très courageusement annoncée et implantée doit être complétée, a-t-elle soutenu en entrevue. Cela ne viendra pas du Sénat. La seule façon de la compléter, de la terminer, c’est de modifier la Loi sur le Parlement du Canada.»

Justin Trudeau a confié être enchanté de la manière dont la chambre haute fonctionne depuis la réforme, et ce, même si les sénateurs indépendants sont plus enclins à amender les projets de loi du gouvernement, ce qui a ralenti le processus législatif et occasionnellement suscité des craintes, qui se sont avérées jusqu’à maintenant non fondées, que le Sénat puisse carrément rejeter une législation.

«Je pense que supprimer une bonne partie de la partisanerie au Sénat a été bénéfique pour notre démocratie et nos institutions», a indiqué M. Trudeau.

Quant à M. Scheer, le premier ministre a ajouté: «S’il veut vraiment revenir à la partisanerie et au trafic d’influence dont nous avons réussi à nous débarrasser, je pense qu’il devra s’expliquer à ce sujet.»

Cette semaine, Justin Trudeau a nommé deux nouveaux sénateurs fortement liés au Parti libéral du Canada: Pat Duncan, un ancien premier ministre libéral du Yukon, et Stanley Kutcher, un spécialiste de la santé mentale qui s’était présenté en Nouvelle-Écosse sous la bannière libérale aux élections de 2011, mais avait été défait.

Les conservateurs ont maintes fois soulevé des questions sur les limites de l’indépendance des sénateurs, soulignant que la plupart semblaient avoir les mêmes valeurs que le premier ministre, un reproche que ce dernier n’a pas démenti.

«Je ne vais pas choisir des gens qui ont des valeurs complètement opposées aux miennes ou à celles de nombreux Canadiens, a-t-il expliqué. Un futur premier ministre issu d’un autre parti politique sera certainement capable de nommer des gens qui pourraient avoir des opinions légèrement différentes. Je crois que cela va se produire naturellement au sein de notre système.»

Il a toutefois maintenu que l’institution était meilleure depuis que la plupart des sénateurs n’avaient plus à répondre de leurs actions au premier ministre et ne siégeaient plus au sein de caucus partisans occupés à «concocter des stratégies politiques».

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