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Le juge militaire en chef sera jugé par son adjoint

Photo: Lars Hagberg / La Presse Canadienne
Lee Berthiaume, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Le juge militaire en chef du Canada doit subir son procès ce printemps devant une cour martiale qui sera présidée par son propre adjoint.

Le colonel Mario Dutil a été accusé l’année dernière de deux chefs de fraude, deux chefs de fausse déclaration ou inscription, et quatre chefs de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline militaire. Aucune des huit accusations n’a encore été examinée par un tribunal.

La poursuite croit que le colonel Dutil aurait eu une relation consensuelle mais inappropriée avec une personne subordonnée, et qu’il aurait sciemment signé une demande de remboursement de frais de voyage contenant de fausses informations. L’acte d’accusation indique que la réclamation s’élève à 927,60 $.

On croit que M. Dutil est le premier juge en chef des forces armées à faire l’objet d’accusations. Compte tenu de la nature sans précédent de l’affaire, on ignorait d’ailleurs précisément comment la cause procéderait en cour martiale. On ne savait pas, par exemple, si ce serait l’un des trois autres juges militaires, sous l’autorité du colonel Dutil, qui instruirait le procès contre son supérieur immédiat.

Or, le porte-parole de l’armée, le major Doug Keirstead, a confirmé cette semaine que c’est le lieutenant-colonel Louis-Vincent d’Auteuil, juge militaire en chef adjoint, qui avait été appelé à présider le procès. Les motions préalables au procès commenceront en avril, avant l’ouverture du procès proprement dit début juin.

La nomination de M. D’Auteuil contraste avec la décision du procureur en chef de l’armée, qui avait nommé l’an dernier un procureur spécial afin d’examiner en toute impartialité l’enquête menée par la police militaire dans cette affaire, et de décider ensuite de recommander ou non le dépôt d’accusations. Dans un communiqué, le directeur des poursuites militaires, le colonel Bruce MacGregor, se disait alors «persuadé que l’affaire continuerait de se dérouler de manière ouverte et équitable tout au long du processus judiciaire».

La police militaire avait ouvert son enquête en novembre 2015 après avoir reçu une plainte selon laquelle le colonel Dutil entretenait une «liaison inappropriée» avec une personne subordonnée. Cette relation présumée, qui aurait duré près d’un an — de novembre 2014 à octobre 2015 —, contrevenait aux règles militaires. C’est au cours de leur enquête sur cette relation que la police militaire a découvert des éléments de preuve suggérant que M. Dutil aurait sciemment signé une demande de remboursement de frais de voyage contenant de fausses informations, en septembre 2015.

Seul le cabinet fédéral peut nommer ou révoquer un juge militaire en chef; un responsable militaire a confirmé que M. Dutil demeurait à son poste, mais n’avait pas encore instruit de cause depuis le dépôt des accusations, en janvier dernier.

Ce n’est pas la première fois que le juge en chef, nommé en 2006, est accusé d’avoir enfreint les règles de l’armée en matière de relations personnelles. Toutefois, un comité extraordinaire composé de trois juges avait rejeté une plainte en avril 2016, au motif que sa conduite n’avait eu aucune incidence sur ses fonctions de juge. La police militaire n’a ensuite porté aucune accusation. Les responsables n’ont pas précisé si cette plainte avait trait à la même relation présumée qui fait l’objet aujourd’hui d’accusations.

Une condamnation pour un acte frauduleux entraîne une peine maximale de deux ans moins un jour d’emprisonnement, tandis qu’une inscription ou une fausse déclaration falsifiée sur un document officiel entraîne une peine de trois ans moins un jour. La peine maximale pour conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline militaire est la «destitution ignominieuse» de l’armée.

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