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Entre 300 et 1200 enfants sans papier n’ont pas d’assurance-maladie au Québec

Photo: Archives Métro

Des centaines d’enfants nés au Québec n’ont pas accès aux soins de santé couverts par l’assurance-maladie en raison de leur statut d’immigration ou de celui de leurs parents, s’inquiète l’Observatoire des tout-petits (OTP) dans une nouvelle étude parue lundi. Entre 300 et 1200 nourrissons seraient actuellement dans cette situation à l’échelle de la province.

Ce constat «préoccupant» mérite de faire l’objet de discussions, croit la directrice de l’OTP. «C’est possible d’agir sur le plan légal, a expliqué la directrice de l’organisme, Fanny Dagenais, en entrevue à Métro. En éducation, par exemple, on a modifié la Loi sur l’instruction publique pour que les enfants dont le titulaire demeure au Québec de façon habituelle puissent fréquenter nos établissements scolaires. De la même manière, on peut réfléchir à des solutions en santé.»

La Montréalaise estime qu’il revient à notre société d’aider des personnes «déjà au bord de la précarité» qui n’ont pas les moyens de payer pour des soins de santé.

«Pour des familles à faibles revenus, qui génèrent 1000$ par mois, faire face à des frais majorés à la hausse de 200% sans couverture d’assurance-maladie, c’est très problématique. Des petits problèmes peuvent devenir très grands en peu de temps.» -Fanny Dagenais

Elle mentionne le cas d’une jeune fille dont l’Observatoire a eu écho il y a quelques mois. Sans possibilité de recevoir des traitements abordables rapidement, son infection urinaire a mené à des complications rénales et son état de santé s’est rapidement détérioré. «Si pour certains parents, notre système fait en sorte qu’ils ne peuvent pas emmener leur enfant voir un médecin rapidement, ça menace évidemment tout le développement et la santé de la jeunesse», plaide Mme Dagenais.

En France, l’Élysée a déjà pris la décision de couvrir les soins de santé des femmes enceintes et des mineurs, peu importe leur statut migratoire. «C’est un choix de société qui peut se faire, illustre la directrice. On sait que la petite enfance et la grossesse, ce sont des périodes-clés de développement. C’est essentiel d’intervenir tôt.»

D’après des données avancées par l’Observatoire des tout-petits, 70% des Québécois ignorent l’existence du problème, mais près de 75% d’entre eux se disent favorables à une réforme après avoir pris connaissance de l’enjeu. «La majorité d’entre nous pense que tous les enfants ont accès aux soins de la Régie d’assurance-maladie du Québec (RAMQ), observe Fanny Dagenais. C’est un enjeu très peu connu pour de nombreux décideurs. C’est quand on connaît le défi qu’on peut imaginer des solutions.»

Sans être en mesure de chiffrer les investissements que représenterait une telle réforme dans le milieu de la santé, Fanny Dagenais assure que «les montants en jeu ne sont pas astronomiques». «Chaque année, on accueille environ 4700 tout-petits immigrants au Québec. Là-dessus, plusieurs sont déjà couverts par la RAMQ. On parle d’une fraction à aider, mais dès maintenant», plaide l’ancienne directrice générale d’ÉquiLibre.

La RAMQ veut contribuer
Jointe par Métro, une porte-parole de la RAMQ, Caroline Dupont, explique que la Régie «doit gérer l’admissibilité des personnes à l’assurance-maladie de manière équitable». «Quand on parle d’enfants, c’est sûr qu’on a toutefois une sensibilité particulière», reconnaît-elle.

«À partir du moment où une personne démontre qu’il y a un début de démarche auprès des autorités en immigration – d’avoir un reçu, quelque chose de bien anodin par exemple – on l’invite à communiquer avec nous. On va tout faire pour les rendre admissibles, pour admettre l’enfant.» -Caroline Dupont, parole-parole de la RAMQ

Elle ajoute que «si certaines personnes immigrantes ont une certaine méfiance envers les autorités, la RAMQ peut les accompagner dans leur démarche pour aller chercher le bout de papier nécessaire».

La porte-parole rappelle «que le fait d’avoir le statut de citoyen canadien, pour une personne mineure ou majeure, ne donne pas de facto le droit à la couverture par le régime d’assurance maladie». «Bien que né sur le territoire canadien, le parent ou le tuteur doit démontrer la présence au Québec de l’enfant et l’intention de s’y établir», renchérit-elle, soulignant que malgré tout, «il y a plusieurs cas où les enfants sont couverts malgré le statut des parents».

Dans un communiqué, la directrice générale d’Amnistie internationale pour le Canada francophone France-Isabelle Langlois demande à l’État de «mettre fin à l’exclusion basée sur une interprétation erronée de la Loi sur l’assurance maladie du Québec».

«Des changements de politiques et de pratiques doivent avoir lieu», ajoute-t-elle, rappelant que son organisme a déposé, de concert avec Médecins du monde, une pétition de 20 000 signatures sur le sujet au ministre de la Santé et des Services sociaux.

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