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Instaurer un prix unique pour les livres?

Photo: Métro

Alors que l’ombre d’une commission parlementaire sur la pertinence d’une loi sur le prix unique du livre plane à l’Assemblée nationale, l’Institut économique de Montréal (IEDM) relance le débat avec une note économique publiée jeudi.

L’industrie du livre et les libraires québécois ont été nombreux, depuis les dernières années, à réclamer un contrôle sur le prix des livres, craignant que les magasins à grande surface n’enfoncent le clou dans le cercueil des librairies indépendantes, qui ne peuvent concurrencer avec des prix aussi bas.

La première ministre Pauline Marois avait promis, dans son discours inaugural, de s’attaquer à la question. À quelques jours de la reprise des travaux à l’Assemblée nationale, Marc-André de Blois, l’attaché du ministre de la Culture Maka Kotto, a confirmé mercredi à Métro que le Parti québécois déposera dans les prochaines semaines un avis de motion pour la tenue d’une commission parlementaire.

Cette loi interdirait aux détaillants de faire des rabais de plus de 10% sur le prix suggéré des nouveaux livres, et ce, pendant une durée de neuf mois. Ce genre de politique est déjà en vigueur dans 16 pays, dont la France et l’Allemagne.

L’IEDM questionne les bienfaits d’une telle loi, puisqu’elle aurait pour effet de réduire les ventes de livres de 14% au Québec, affirment deux économistes dans la note publiée jeudi. Et pour les titres québécois, cette baisse passerait à 17%, puisque les nouveautés sont proportionnellement plus nombreuses que les livres étrangers. «Essentiellement, il faut comprendre qu’un prix unique du livre, c’est d’abord une interdiction de faire des rabais importants sur le prix suggéré, affirme Youri Chassin, co-auteur de la note. Donc, on a évalué l’impact que cela aurait sur les ventes à partir des données des marchés de la France, de la Scandinavie, de l’Allemagne et des États-Unis.»

Pourtant, des exemples contraires ont été observés en France, en Allemagne et en Grande-Bretagne, relève le président de l’Association des distributeurs exclusifs de livres en langue française (ADELF), Pascal Chamaillard.

En France et en Allemagne, par exemple, l’inflation aurait été moindre sur les livres que sur les autres biens de consommation entre 1995 et 2007, souligne-t-il. «Donc, contrairement aux théories économiques classiques, dans le domaine très particulier du livre, une réglementation des prix est finalement bénéfique pour le consommateur», conclut M. Chamaillard.

Ce dernier s’inquiète également de la diversité des livres, qui s’amoindrirait si tous les libraires devaient fermer. Puisque les magasins à grande surface vendent essentiellement des titres à succès, les auteurs émergents que les libraires aident à faire connaître n’auraient plus leur place.

«Si on n’a plus nos libraires, c’est vraiment tout un pan de notre société qui va être mis à mal, parce que l’édition et la littérature sont des éléments identitaires d’une importance capitale dans une société», clame M. Chamaillard.

Youri Chassin croit pour sa part que les librairies ne disparaîtront jamais, puisqu’elles ont leur propre créneau. Il observe qu’en Grande-Bretagne, après que la politique sur le prix unique ait été abolie, davantage de titres sont parus qu’en Allemagne, où une telle politique était toujours en vigueur. «Donc au contraire, la diversité est bien servie par une plus grande concurrence et une plus grande innovation dans le marché du livre», croit l’économiste.

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