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Crise dans les CHSLD: un «changement de culture» à prendre en compte

CHSLD Yvon-Brunet
Le CHSLD Yvon-Brunet, dans le Sud-Ouest de Montréal Photo: Josie Desmarais/Métro

Au lendemain de la publication d’un rapport des Forces armées canadiennes sur la situation «exceptionnellement difficile» dans les CHSLD, des experts appellent à prendre en compte le changement de culture qui a été imposé aux employés du réseau de la santé, pour mieux comprendre les bouleversements liés à la crise qui s’y produisent.

«On ne le dit pas assez. Les préposés n’étaient pas des gens habitués à porter le masque, à pratiquer la distanciation. C’est très difficile pour eux d’adopter tous ces changements de pratiques, en passant d’une zone chaude à une zone froide constamment. Il faut aussi le prendre en compte», explique la spécialiste en santé publique de l’UdeM, Roxane Borgès Da Silva.

Pour l’experte, il importe de ne pas «chercher de coupables» actuellement, un message qu’ont répété à maintes reprises les autorités de santé publique dans les dernières semaines.

«C’est une situation très complexe, et il faudrait plutôt mettre l’emphase sur le manque de formation des préposés. On devra éventuellement penser à la formation continue, comme c’est le cas pour les infirmières.» -Roxane Borgès Da Silva, de l’UdeM

À quand une vraie réforme?

Selon elle, le réseau de la santé a besoin d’une profonde réforme organisationnelle. «Investir 1,5 G$ dans des nouvelles maisons des aînés, ce n’est pas une réponse adéquate à la pénurie de main-d’œuvre qu’on vit actuellement. Rester dans les structures ne réglera pas les problèmes. Il faut retaper les processus», envisage-t-elle.

L’idée d’une commission d’enquête, dans ce contexte, pourrait être pertinente, dit Mme Borgès Da Silva. «Plusieurs grands penseurs le disent. L’Ontario est tout de suite sorti pour le faire. Ce serait nécessaire pour au moins réfléchir à des solutions», illustre-t-elle.

Plus tôt cette semaine, le Protecteur du citoyen a annoncé qu’il enquêtera sur la crise dans les CHSLD, promettant une enquête «systémique» pour faire la lumière sur «les améliorations requises dans les milieux de vie». Quelques jours auparavant, le premier ministre François Legault s’était dit ouvert à la tenue d’une commission d’enquête, sans toutefois s’avancer davantage.

Des mesures adaptées

Pour le professeur en sciences biologiques de l’UQAM, Benoit Barbeau, c’est surtout l’adaptation des mesures dans les établissements de santé qui devra préoccuper le gouvernement au cours des prochaines semaines.

«Oui, il faut tout faire pour éviter que de tels événements ne se reproduisent plus, mais il faut aussi comprendre les besoins des résidents. Si on prend des mesures préventives plus raisonnables et posées, elles seront plus applicables, et les gens seront plus réceptifs. Il faut éviter de mettre les patients en silo, sinon c’est presque une prison pour eux», tranche-t-il.

«Il y aura toujours des agents infectieux […], mais en bout de ligne, on reviendra à une norme plus habituelle, où la distanciation ne se fera pas partout.» -Benoît Barbeau, de l’UQAM

Après tout, les patients ont «droit à des contacts humains», dit l’expert, misant surtout sur le lavage des mains, la désinfection des surfaces et la minimisation des risques. «Ça passe entre autres par la fin des transferts de personnel, réitère-t-il. La Colombie-Britannique l’a fait très rapidement, et les autorités ont réussi à limiter les dégâts que l’on voit actuellement au Québec.»


Legault blâme ses prédécesseurs

Le premier ministre, François Legault, a avoué hier qu’il n’avait «pas vraiment appris de nouvelles informations» dans le rapport des Forces armées canadiennes (FAC). Il a de nouveau soutenu que la crise dans les CHSLD était le résultat de «plusieurs années» de négligence.

Combler le manque de main-d’œuvre, par exemple, aurait dû être fait «bien avant», a dit le chef de la CAQ, écorchant au passage l’ancien gouvernement libéral pour les coupes dans le réseau qu’il a effectuées dans les dernières années.

«Depuis 10 ans, il nous manque 10 000 personnes dans les CHSLD. Ça, c’est gênant», a-t-il indiqué, alors qu’il était questionné sur la présence des soldats.

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