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La technologie au service des réfugiés et des sinistrés

Humanitas Photo: Josie Desmarais

Lors d’un séjour humanitaire en Haïti en 2010 pour combattre l’épidémie de choléra après le séisme, le Dr Abdo Shabah a constaté à quel point le manque d’accès à l’internet compliquait la gestion de l’information sur le terrain. Les données concernant les patients et leurs besoins étaient enregistrées et transmises sur des papiers imbibés de chlore. Les cartes des lieux transformés par le tremblement de terre et la réorganisation du terrain étaient mises à jour à la main.

«Il était difficile de savoir où et à qui on avait distribué telles ou telles denrées. De combien de litres de soluté, d’antibiotiques et de kits d’accouchement avait-on besoin? Il fallait y aller par estimation. Ça se passe encore souvent comme ça. Pourtant, la gestion des ressources est critique en situation d’urgence», considère le Dr Shabah, qui travaille régulièrement comme délégué de la Croix-Rouge.

Le Dr Shabah et l’équipe de son entreprise HumanITas Solutions sont sur le point de réaliser un projet ambitieux : réunir dans une même application la cueillette et le partage de l’information, la gestion des tâches des travailleurs humanitaires et la cartographie en 3D. Le nom de l’application? HumaniT3D. L’entreprise montréalaise espère exploiter cette technologie pour mieux répondre aux situations de crise dans les camps de réfugiés et sur les lieux de catastrophes naturelles.

Pour remplacer l’internet, son équipe a bâti un système qui connecte les tablettes ou les téléphones intelligents de ceux qui y sont affiliés. «Ça crée un réseau qu’on appelle mesh. Jusqu’à 2km les uns des autres, les appareils se comportent entre eux de la même façon que s’ils étaient sur l’internet», a expliqué le Dr Shabah. Des drones seraient mis à contribution.

Imaginons qu’un violent tremblement de terre ait lieu dans un pays en développement. «La première chose à faire est d’avoir une bonne carte de la situation pour déployer les équipes. On pourrait se baser sur une carte «pré-sinistre», sur laquelle on superposerait des données mises à jour avec les drones, puis celles ajoutées par les intervenants sur le terrain», a affirmé le Dr Shabah.

Dans les jours suivants, les intervenants définiraient une multitude de points d’intérêt: les zones sécuritaires, les endroits où du porte-à-porte a été fait ou les endroits où des gens ont été infectés par une maladie. L’information serait stockée sur les appareils mobiles, qui se synchroniseraient à chaque fois qu’une nouvelle information serait enregistrée.

«Tous les intervenants sur le terrain pourraient l’acquérir et ainsi mieux coordonner leurs efforts», a estimé le Dr Shabah.

Humanitas Dr Shabah

«Est-ce que l’outil aurait été utile dans les campements de réfugiés qui se sont installés depuis le début de la guerre en Syrie? Est-ce qu’il serait utile pour la réponse aux prochaines catastrophes naturelles? Oui! C’est pour cela qu’on travaille dessus.» – Dr Abdo Shabah, fondateur d’HumanITas Solutions

Ce dernier évalue qu’environ 85% du développement de l’application est complété et que celle-ci pourra être utilisée dans moins de trois mois. Il espère qu’elle sera achetée par de grandes organisations comme la Croix-Rouge, de même que par d’autres organisations de sécurité comme les corps de police ou l’armée, et qu’il pourra en faire don aux petites organisations non gouvernementales sur le terrain.

Il reste à son équipe à raffiner la sécurité, les interfaces et la synchronisation avec les drones. La sécurité pourrait d’ailleurs être un élément crucial de sa réussite. Norbert Payne, délégué en informatique et en télécommunications à la Croix-Rouge canadienne (CRC), affirme que la sécurité des données est l’enjeu qui préoccupe le plus son organisation lorsqu’il est question d’acquérir de nouvelles technologies. Carl Boisvert, agent de communication à la CRC, a pour sa part souligné que son organisme prenait de plus en plus un virage numérique dans ses opérations sur le terrain.

Pour le développement de son application, HumanITas a collaboré avec des universités. Il est financé par des dons philanthropiques et par une bourse de Grand Challenges Canada.

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