Le grand malaise…
Chaque fois que je pars en voyage, j’ai toujours la même crainte : que l’actualité me tire quelque chose de gros dans les jambes tout juste après que j’ai livré (en avance, pour une rare fois…) mon billet hebdomadaire. Et c’est exactement ce qui m’est arrivé la semaine dernière. Je venais à peine de mettre les pieds dans le sable cubain qu’éclatait «l’affaire» Jutra.
C’est donc de loin – mais absolument pas au même rythme que vous, vu la lenteur de l’ordi de l’hôtel – que j’ai pris connaissance de l’horreur. Et c’est uniquement à mon retour que j’ai pu entreprendre l’écoute et la lecture de tout ce qui s’était dit ou écrit au cours de la semaine sur le sujet. Mission ratée : l’ampleur et l’intensité de la chose ont eu raison de moi. Avec le résultat que je me suis tapé une overdose avant même de me rendre à la moitié de mes nobles intentions. Un gars a beau vouloir…
Pour le moment, ce que je retiens de «l’affaire» Jutra, c’est le malaise. Une montagne de malaise. À commencer par celui ressenti par ses proches qui, totalement dépassés par la nouvelle, se sont mis les pieds dans les plats en y allant de déclarations maladroites et prématurées. Ajoutez le malaise de ceux qui avaient des doutes depuis des décennies, mais qui, pour diverses raisons, n’ont pas pu – ou voulu –- comprendre le sérieux de la chose. Ainsi que le malaise éprouvé par ceux qui, en toute innocence, appréciaient l’œuvre de l’artiste sans connaître personnellement l’homme, et encore moins ses zones d’ombre. J’en suis, vous en êtes.
Et que dire du malaise buriné par les actes comme tels? Dans le cyclone, on en vient presque à sous-estimer la douleur des vraies victimes qui ont pris des années avant d’en parler librement et publiquement, qu’elles soient maintenant connues ou toujours planquées dans l’anonymat. Des dizaines d’années de souffrance.
Cette braise de malaise qui, en période de grandes secousses, rallume le feu de la grande chasse aux sorcières chaque fois qu’une nouvelle du genre nous pète en pleine face. Avec ses «en tout cas, ça a l’air qu’untel a fait encore pire…». Ce doute qui nous garantit qu’il y aura un prochain épisode.
Combien reste-t-il de squelettes cachés dans le placard qui attendent d’en sortir pour mieux nous surprendre?
***
Sur une note plus légère, en guise de souvenirs, je vous ai rapporté deux perles, cultivées chez nous, entendues à Cayo Largo.
Au bar, en plein 5 à 7, un monsieur un peu pompette :
– «Faudrait ben que j’le fasse faire, mon arbre nécrologique…».
Et l’autre, au buffet. Deux dames en robe soleil qui croisent un minou :
– «Hon, r’garde le chat. J’sais pas si y comprend le français?»
– «D’après moi, oui, sont habitués aux touristes…»
Des poèmes…