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Un jeune de 35 ans ou moins sur les CA des sociétés d’État

Business people having on presentation at office Photo: Métro

Québec forcera finalement les conseils d’administration (CA) des 23 sociétés d’État québécoises à être constitués d’au moins un membre de 35 ans ou moins.

Après plusieurs mois d’attente et de pression auprès du gouvernement pour voir ce changement législatif se concrétiser, les organismes jeunesse, les ailes jeunesse des partis politiques et les partis de l’opposition se réjouissent de cette nouvelle.

C’est d’ailleurs sous un tonnerre d’applaudissements venant de tous les élus de l’Assemblée nationale que le plus jeune député du salon bleu, Jean Habel, député libéral de Sainte-Rose âgé de 28 ans, a déposé son projet de loi vendredi, au cours de cette dernière journée de la session parlementaire.

Le projet de loi vient modifier la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État en y ajoutant la nécessité que chaque CA des 23 sociétés d’État – dont Investissement Québec, la Régie de l’assurance maladie du Québec, Hydro-Québec ou encore la Caisse de dépôt et placement du Québec – doit être constitué d’au moins un membre âgé de 35 ans ou moins au moment de sa nomination. Cette loi impose déjà la parité entre les hommes et les femmes au sein de ces CA.

Chaque société d’État disposera d’un délai de cinq ans pour se conformer à cette disposition à partir de la date d’adoption du projet de loi, selon l’ébauche actuelle.

L’étau se resserrait autour du gouvernement dans la dernière année, alors que les commissions jeunesse du Parti libéral du Québec et du Parti Québécois avaient pris position en faveur de ce poste dédié aux jeunes sur ces CA. Le Parti Québécois et la Coalition Avenir Québec étaient également en faveur. Les membres du Parti libéral du Québec, réunis en congrès dans les dernières semaines, avaient également voté en faveur d’un tel changement.

«Je crois sincèrement que les jeunes sur les CA des sociétés d’État peuvent apporter un nouveau souffle, peuvent améliorer le point de vue et enrichir les débats et les échanges sur ces CA grâce à leurs compétences diversifiées, a fait valoir M. Habel qui a lui-même siégé sur plusieurs conseils d’administration d’organismes à but non lucratif. On envoie un message d’équité intergénérationnel très fort», a-t-il ajouté.

Le député Habel confirme qu’il a obtenu l’appui du gouvernement avant de présenter ce projet de loi ce qui lui donne de bonnes chances d’être adopté avec l’appui de l’opposition. «Je pense que c’est un projet de loi qui fait consensus et je suis sûr que je vais avoir la collaboration des partis d’opposition pour pouvoir faire avancer le projet de loi», dit-il.

«Notre aile jeunesse est résolue à suivre le travail de M. Habel et les dossiers reliés à la représentativité des jeunes Québécoises et Québécois dans les lieux décisionnels. Elle souhaite ainsi s’assurer que la future Stratégie d’action jeunesse, qui sera présentée l’automne prochain,reflète la capacité citoyenne des jeunes et leur volonté de contribuer à bâtir une société québécoise juste et équitable.» – Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec (PLQ)

L’idée d’un poste dédié aux jeunes sur les CA des sociétés d’État est notamment portée depuis plusieurs années par l’organisme Force jeunesse qui, en 2013, a réalisé un sondage auprès des administrateurs de ces CA. Il a constaté avec regret que seulement 0,07% de tous les administrateurs avaient moins de 35 ans. La Régie des rentes du Québec est l’une des rares sociétés d’État ayant un administrateur de moins de 35 ans. L’âge moyen d’entrée sur ces CA était de 51 ans, au moment du sondage.

L’organisme qui milite pour la défense et l’amélioration des perspectives d’emploi des jeunes s’est réjoui vendredi que son message ait été entendu. «C’est la démonstration que quand un groupe de la société civile fait cheminer ses revendications avec des éléments tangibles, on peut faire infléchir les politiques publiques», a affirmé Nolywé Delannon, présidente de Force Jeunesse, avec un soupir de soulagement et un élan de satisfaction.

Constatant l’absence des jeunes sur les CA, il devient nécessaire pour Mme Delannon de «forcer la porte» et d’employer un moyen coercitif afin de représenter toutes les composantes de la société dans les lieux décisionnels, dont les jeunes. «On a fait des changements législatifs pour les femmes. Aujourd’hui, nous disons que c’est pareil pour les jeunes», soutient la présidente.

«C’est une avancée majeure alors que le manque de relève sur les instances décisionnelles n’est plus à démontrer.» – Rose Crevier-Dagenais, présidente de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ)

Une idée que partage Léo Bureau-Blouin, ex-député du Parti québécois et adjoint parlementaire à la jeunesse. «C’est dommage qu’on soit obligé de prendre des mesures fortes, mais à un moment donné c’est ça que ça prend pour apporter un changement de mentalité et permettre aux sociétés d’État d’être plus représentatives. S’il n’y a pas d’incitatifs forts, il n’y aura pas de changement de culture», observe l’ancien militant pour la jeunesse.

Il regrette que les membres des CA des sociétés d’État ne représentent souvent qu’une seule tranche de la société. «C’est souvent très masculin, entre 50 et 65 ans. Si on prend en exemple la question de la sécurité, les jeunes sont surreprésentés dans les accidents de travail ou encore dans les décès sur la route. [Mais pourtant à la Société de l’assurance automobile du Québec], c’est comme si c’était une autre tranche de la société qui parlait au nom des jeunes et qui élaboraient des politiques pour eux», regrette Léo Bureau-Blouin.

Mais surtout, Mme Delannon insiste sur l’importance de préparer la relève d’administrateurs. «On ne peut pas attendre qu’un jour les sièges deviennent vides – parce que c’est ce qui va se passer – et que des jeunes se retrouvent à occuper massivement ces sièges sans avoir été préparés, sans avoir bénéficié de l’expertise et de l’expérience de personnes plus âgées», fait valoir la présidente de Force Jeunesse qui espère que cette mesure influencera également le milieu privé.

M. Bureau-Blouin croit également que ces changements au sein des sociétés d’État peuvent avoir un effet domino sur plusieurs autres organisations et les inciter elles aussi à faire plus de place aux jeunes. «Ce projet de loi est symbolique parce que quand il y a des grands changements dans la société, ça part souvent de l’État. C’est l’État qui donne l’exemple, que ce soit sur la question de l’équité salariale, sur la place des femmes, sur la place des minorités ethniques», donne-t-il en exemple.

Processus de sélection

Bien que Force Jeunesse attend avec impatience l’adoption de ce projet de loi, l’organisme peut déjà affirmer que la prochaine phase du travail sera de s’assurer que le processus de sélection de ces jeunes sur les CA soit le plus équitable possible. «Il va falloir assurer une vigilance pour que les processus de sélection et de formation des jeunes permettent une vraie ouverture», insiste Nolywé Delannon. Elle compte faire un travail auprès de ses membres associatifs, dont plusieurs représentent des jeunes du milieu étudiant, de la fonction publique ou de la relève agricole, «pour savoir quels sont les meilleurs moyens à mettre en place pour s’assurer que les 23 jeunes qui  seront sur ces CA soient très représentatifs de la jeunesse du Québec».

Léo Bureau-Blouin croit également que des questions devront être posées pendant l’étude du projet de loi pour s’assurer que le processus soit «ouvert et transparent». «Un processus qui permettra à tous les jeunes qui sont intéressés de se manifester, et non pas seulement un petit groupe très banché sur les partis politiques», illustre-t-il.

Jean Habel insiste quant à lui pour dire que «l’ensemble des 1,9 million de personnes qui ont moins de 35 ans sont éligible évidemment pour postuler. Le processus de nomination va suivre son cours comme pour n’importe quel processus de nomination pour un membre d’un CA des sociétés d’État».

Liste des 23 sociétés d’État au Québec

  • Caisse de dépôt et placement du Québec
  • Conseil des arts et des lettres
  • Hydro-Québec
  • Investissement Québec
  • La Financière agricole du Québec
  • Régie de l’assurance maladie du Québec
  • Régie des installations olympiques
  • Régie des rentes du Québec
  • Société d’habitation du Québec
  • Société de développement des entreprises culturelles
  • Société de l’assurance automobile du Québec
  • Société de la Place des arts de Montréal
  • Société de télédiffusion du Québec
  • Société des alcools du Québec
  • Société des établissements de plein air du Québec
  • Société des loteries du Québec
  • Société des traversiers du Québec
  • Société du Centre des congrès de Québec
  • Société du Grand Théâtre de Québec
  • Société du Palais des congrès de Montréal
  • Société générale de financement du Québec
  • Société immobilière Québec
  • Société québécoise de récupération et de recyclage

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