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L’humour abracadabrant des Pic-Bois

Maxime Gervais et Dominic Massicotte, du duo comique Les Pic-Bois. Photo: Josie Desmarais\Métro

Ces dernières années, ils ont été Frite et Moule, Pierre Hart et Jacques Prescott, «deux imbéciles aux sourcils improbables» en après-ski jazz, Dracula Jr. et son ami Le fantôme, Passe-Partout et Passe-Montagne… La semaine prochaine, ils seront Dany Presto (alias le magicien pervers) et son pauvre cobaye. Dans les paragraphes qui suivent, ils sont simplement eux-mêmes : Maxime Gervais et Dominic Massicotte, du duo comique Les Pic-Bois.

Une complicité hors du commun unit Maxime Gervais et Dom Massi. On le constate avant même de leur parler, alors qu’ils se blottissent tout naturellement l’un contre l’autre pour la séance photo. En entrevue, tel un vieux couple, ils complètent intuitivement leurs phrases. Il faut dire que les deux amis originaires de Valleyfield se connaissent depuis plus de 20 ans.

Vendredi prochain, ils dérideront le public du festival Dr. Mobilo Aquafest avec Le Magicien Pervers des Pic-Bois, qui promet une «soirée bien lubrifiée». Ce magicien olé olé, c’est Dany Presto, personnifié par Maxime Gervais.

Son interprète précise que ce sera l’occasion de découvrir la genèse de ce personnage hyper confiant à la sexualité dégourdie. «Le show explique même pourquoi on fait ce personnage. Oui, à la base, c’est juste un magicien qui vit sa sexualité, mais il y a quand même de quoi…»

«… sur la liberté d’expression», complète Dominic, précisant que ce personnage est sorti de leur imagination débordante quelques mois avant qu’éclate le scandale #MoiAussi.

Les allégations visant Éric Salvail et Gilbert Rozon ont secoué tout le Québec, et particulièrement le milieu de l’humour, qui a fait un véritable examen de conscience.

«C’était vraiment un gros défi d’arriver à faire ce spectacle sans que ce soit douchebag, sans qu’on passe pour des estis d’épais», dit Maxime en échappant un rire.

«On a trouvé la manière de bien le faire», assure son collègue.

Pour que la magie opère, les Pic-Bois ont appliqué le mot d’ordre qu’ils se donnent depuis leurs débuts : ne jamais basculer dans la vulgarité. Ce qui peut sembler surprenant de la part du duo qui a l’habitude, disons, d’aller loin sur scène. «C’est bizarre à dire, parce que j’ai déjà montré mon pénis en show, mais je ne l’ai jamais fait pour choquer, soutient Dom Massi. La nudité n’a pas à être vulgaire, on applique le même principe qu’au théâtre et en danse.»

«On a un côté Jackass qu’on traîne depuis notre adolescence. C’est pour ça qu’un de nos trips est de faire des choses qu’on n’est pas supposés faire sur scène» –Maxime Gervais

Cela étant dit, «c’est fini ce temps-là», laisse tomber le jeune homme. «C’est une autre époque, on évolue», renchérit son collègue, qu’on pourra tout de même voir en sous-vêtements au Théâtre Fairmount. «Au-delà du climat social, on est rendu à 34 ans», affirme-t-il. «J’ai assez donné, Bernatchez aussi», riposte Dominic, parlant en son nom et en celui de leur fidèle complice (Julien de son prénom), qui les accompagne dans toutes leurs folles aventures. De toute façon, «le but dans tout ça n’a jamais été d’être choquant. C’est purement et uniquement niaiseux», reprend Maxime.

Niaiseux, voilà le mot qui colle le mieux à l’humour absurde rempli de curieux personnages des Pic-Bois. Et leurs niaiseries attirent de plus en plus l’attention. Dans la dernière année, le duo auquel on accole l’étiquette de «relève» depuis plus de 10 ans, a fait plusieurs premières parties de spectacles pour Mike Ward et a participé au gala Juste pour rire des Denis Drolet. En juillet prochain, ils se produiront à la Place des Arts dans le cadre de ce même festival.


Photo: Josie Desmarais/Métro

Lorsqu’on leur demande s’ils sentent que la conjoncture leur est favorable, leur réponse est mitigée. C’est que leur succès s’est bâti «brique sur brique», sur plusieurs années, et non du jour au lendemain, avance Dom Massi. Chose certaine, Les Pic-Bois se réjouissent de cet intérêt, eux qui ont vu ces dernières années bon nombre de jeunes humoristes se tailler une place auprès du grand public, dont Phil Roy, Mariana Mazza et Mehdi Bousaidan. Mais pas au point de se dire «Enfin!» Dom y va d’une image empruntée à Plume Latraverse : «Pendant que le paquebot du show-business passe, nous on leur fait des bonjours de notre petite chaloupe.»

Sachant que leur humour qui frise le ridicule est très différent de celui de leurs confrères, jamais ils n’ont ressenti de jalousie à leur égard, assurent-ils.

Mais de l’inquiétude, ça, ils en ont vécu. «Au tournant de la trentaine, j’étais prof comme job alimentaire, tout en faisant de l’humour, et je me sentais pris entre les deux», raconte Maxime.

Depuis deux ans, fini l’enseignement; Les Pic-Bois vivent de leur art. «Modestement», précisent-ils.

On voit mal comment les deux complices pourraient occuper un autre emploi avec leur rythme de travail effréné. Chaque mois, Les Pic-Bois créent un nouveau spectacle, qu’ils présentent notamment au Théâtre Sainte-Catherine à Montréal. Leur prochain sera leur 20e en moins de deux ans.

L’exercice est périlleux. Leur arrive-t-il de manquer d’inspiration? «Le deadline est serré et comme on sait qu’on n’a pas le choix de faire un show à la fin du mois, ça nous motive», répond Dom Massi.

Chaque spectacle – le plus récent était Le Titanic des Pic-Bois – demande trois semaines d’écriture et trois jours de répétitions.

Avec aussi peu de préparation, le résultat a forcément un petit côté brouillon. «J’aime que le résultat final soit dru et rugueux, s’enthousiasme Maxime. À peu près tout ce qu’on se fait offrir – et pas seulement en humour, mais aussi en musique, en cinéma et en télé – est très poli et calculé. Nous, on fait complètement l’inverse.»

La magie des Pic-Bois opère souvent lors d’imprévus qui surviennent sur scène. «C’est un peu ce que notre public veut : que le pied de micro tombe ou que la perruque ne tienne pas», poursuit-il.

Au point où les deux complices s’amusent à se mettre volontairement des bâtons dans les roues lors de leurs représentations. Leur capacité à rebondir à n’importe quel incident inopiné leur a d’ailleurs donné une grande confiance, indiquent-ils.

Autre chose qui leur donne confiance : se glisser dans la peau de personnages extravagants. «C’est weird en criss! lance Maxime Gervais en riant. Dany Presto est un peu comme mon Tyler Derdon, du film Fight Club. Alors qu’en moi-même, sur scène, je ne sais pas qui je suis.»

Cette formule théâtrale leur plaît. «J’ai du fun à faire des shows avec mes amis, renchérit Dominic. Des fois, je nous regarde et je nous trouve privilégiés : je suis sur scène avec mes deux meilleurs amis, je ne veux pas perdre ça.»

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