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Henry: un court autoproduit qui débarque aux Oscar

Photo: YouTube

MONTRÉAL – Le Québécois Yan England foulera le tapis rouge des Oscar avec un court métrage autoproduit qui a bénéficié du travail bénévole de tous ses artisans.

Que ce soit les comédiens Gérard Poirier ou Marie Tifo, le directeur photo ou l’ensemble des techniciens, il a s’agit dans tous ces cas d’un «concours gracieux» — pour reprendre l’expression de M. Poirier — d’artisans qui ont cru dans le projet.

Et Yan England a investi son propre argent, disant avoir «cassé sa tirelire à plusieurs reprises» pour tourner «Henry».

Mais cela est tout à fait «normal», selon le principal intéressé, qui a fait le choix personnel de ne pas soumettre de demandes auprès d’institutions, croyant que le moment de dire «action!» ne pouvait attendre.

«J’étais impatient de tourner le film, explique-t-il. J’avais une courte période propice pour tourner. J’étais un peu impatient par rapport au temps de soumission et de réponse normal. Peu de projets sont sélectionnés de toute façon, surtout dans le court métrage. C’est normal, c’est une loterie. C’est la même chose pour tout le monde.»

Sans préciser le budget total, il parle de «plusieurs milliers de dollars» pour ce film d’une vingtaine de minutes qu’il a produit, écrit et réalisé.

Il a pu compter sur la participation de 50 et 60 personnes sur un an de production — en excluant une cinquantaine de figurants pour une scène particulière.

Yan England a réussi à convaincre des acteurs et artisans d’expérience.

Pour l’acteur Gérard Poirier, qui interprète le rôle principal, c’est la personnalité de Yan England et le thème de l’Alzheimer qui le touchait particulièrement qui ont fait pencher la balance.

«Ce n’était qu’un nom pour moi. Je ne le connaissais pas», dit d’emblée M. Poirier à propos de Yan England, comédien à la télévision dans «Watatatow», puis dans «Yamaska», et animateur à la radio. «Il m’a parlé de son film, de son grand-père. J’ai aimé sa personnalité, et il m’a semblé très structuré.»

L’acteur d’expérience a souligné que les mêmes conditions prévalaient pour les sept ou huit autres courts métrages auxquels il a pris part sur trois décennies.

M. Poirier a aussi dit y voir le seul moyen pour ces jeunes de se faire connaître, voyant dans la présence de «Henry» aux Oscar une «carte de visite prestigieuse» pour Yan England qui devrait lui «ouvrir grandes les portes» du milieu.

Plus abordable qu’avant

Le professeur de l’UQAM et cinéaste Paul Tana constate une augmentation fulgurante dans les cinq ou dix dernières années de la quantité de jeunes qui veulent faire du cinéma.

Il croit que le financement est relatif en ce qui a trait au court métrage de fiction, faisant valoir que l’équipement est devenu à la portée de tous.

«L’accès aux moyens de production est tout à fait extraordinaire. Avec quelques milliers de dollars, on achète une caméra — un appareil HD coûte 1000 ou 2000 $. Avec cette caméra, on fait un film qui a une allure tout à fait professionnelle», soutient-il.

M. Tana y voit en plus un «passage obligé», estimant qu’un cinéaste en devenir doit payer «un peu de sa personne» pour créer.

«Je me souviens en 1973 d’avoir investi 500 $ de mes poches pour mon premier court métrage, avance-t-il. Alors j’ai l’impression que les choses se répètent, sauf qu’aujourd’hui, il y a une quantité invraisemblable de jeunes cinéastes. Ce qui est tellement formidable. On regarde la qualité, et on constate de grands pas en avant dans les 15 ou 20 dernières années.»

Pour M. Tana, le principal défi à relever pour un jeune cinéaste sera de trouver des collaborateurs à la création — directeur de la photographie, monteur, etc. — en les persuadant de la pertinence de son projet.

«Ils vont vous soutenir parce que vous amenez quelque chose de nouveau», exprime le professeur et cinéaste.

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