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An: un délice signé Naomi Kawase

Photo: collaboration spéciale

On pourrait faire notre «tough» et mettre l’immense émotion qui nous a envahie en voyant An sur le compte du décalage horaire. Mais ce serait malhonnête. Car ce nouveau film de la Japonaise Naomi Kawase, qui a ouvert la section Un certain regard jeudi, est d’une sensibilité, d’une précision et d’une délicatesse exemplaires.

Pourtant, l’histoire de ce long métrage fin et intelligent, tirée du roman de Durian Sukegawa, paraît toute simple. Tout tourne autour du «dorayaki», ce dessert traditionnel du pays du Soleil levant fait de deux petites crêpes farcies de pâte aux haricots rouges. Mmm. Dans sa miniature boutique tokyoïte, un homme solitaire fabrique et vend ces sucreries. Il excelle dans la confection des crêpes, mais achète, pas super, sa purée de haricots en gros. Un jour, une dame vient lui proposer son aide dans la cuisine, assurant faire LA meilleure pâte à dorayaki. «Vous avez quel âge?» lui demande-t-il. «75 ans», répond-elle en chantonnant. Il refuse de l’embaucher. Elle insiste. Il refuse. Elle insiste. Il accepte enfin.

«À travers cette pâtisserie japonaise dont on est très fiers, je voulais parler de discrimination, a expliqué Naomi Kawase. Et je pense que la pâtisserie rend peut-être ce sujet plus accessible.»

Car il y a effectivement plusieurs formes de discrimination abordées dans cette histoire, qui parle de maladie, d’alcoolisme. Mais aussi de tradition, de transmission. Une histoire magnifiquement portée par la septuagénaire Kirin Kiki et par le quadragénaire Masatoshi Nagase, qui en 1998 tenait l’affiche du Mystery Train de Jim Jarmusch.

D’ailleurs, comme il a été noté lors de la conférence, Naomi Kawase, habituée à diriger des acteurs non professionnels, a travaillé ici avec des interprètes plus que confirmés. Détail qui n’a «absolument pas changé sa façon de travailler». «Ce qui est le plus important pour moi, c’est qu’il y ait du réalisme dans le jeu», a-t-elle remarqué.

Ainsi, Masatoshi Nagase a noté avoir trouvé ce tournage «difficile». «D’habitude, je prépare mon jeu d’acteur d’avance, et une fois sur le plateau, c’est comme si j’en faisais la démonstration. Ici, il a fallu que je travaille mon jeu tous les jours. J’ai même vécu durant toute la durée du tournage dans un petit appartement sans salle de bain. Comme le personnage!»

Avec politesse, mais sans détour, Kirin Kiki a confirmé les dires de son collègue, ajoutant toutefois une pensée étonnante, qui a fait bien rigoler (poliment toujours) l’assemblée. «C’est vrai que le tournage de Naomi était étonnant et difficile. C’est pour ça que je recommande aux jeunes de travailler avec elle. Mais moi, en tout cas, c’était la dernière fois!»

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