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«Le virus et la proie»: charge impétueuse contre les injustices

Les interprètes Tania Kontoyanni, Ève Pressault et Alexis Martin prononcent dans la pièce « Le virus et la proie », présentée jusqu’à samedi au Théâtre d’Aujourd’hui, un réquisitoire contre les injustices sociales.
Les interprètes Tania Kontoyanni, Ève Pressault et Alexis Martin prononcent dans la pièce axée sur la parole « Le virus et la proie », présentée jusqu’à vendredi au Théâtre d’Aujourd’hui, un réquisitoire contre les injustices sociales. Photo: Marlène Gélineau-Payette

Forte de son succès au Festival TransAmériques et au Carrefour international de théâtre de Québec en mai et juin derniers, la pièce Le virus et la proie reprend du service au Théâtre d’Aujourd’hui jusqu’à vendredi seulement. 

La scène, noire, est épurée à souhait. Seules quelques chaises tiennent lieu d’accessoires — nulle place aux fioritures ici (hormis celles du texte), l’espace étant entièrement réservé aux paroles viscérales débitées par le quatuor l’occupant. 

L’auteur de la pièce, l’écrivain et intellectuel Pierre Lefebvre, livre une charge contre les injustices sociales et la violence de l’autorité par l’entremise de quatre êtres, interprétés par Tania Kontoyanni, Alexis Martin, Ève Pressault et Madani Tall.  

« Le virus et la proie »
Dans Le virus et la proie, le personnage d’Ève Pressault (au premier plan) évoque notamment les préjudices que porte la société à l’environnement. Photo : Marlène Gélineau-Payette

Dénonciation et véhémence 

Les quatre personnages s’adressent, avec aplomb et émotion, à « Monsieur », figure représentant le pouvoir. 

Impuissance, mésestime, dégoût, mépris, haine et servilité font partie des paroles qu’ils transmettent à cette figure d’autorité dont ils peinent à discerner l’humanité. Le politique leur assène des coups violents, exposent-ils. 

« Votre usage de la langue se rapproche du vandalisme », dit le personnage de Tania Kontoyanni, reprochant à « Monsieur » de proférer des mots vidés de leur sens. 

Ce réquisitoire contre les inégalités sociales en est intrinsèquement un contre le capitalisme prônant la croissance à tout prix, les personnages décriant l’obligation du fonctionnement à plein régime et celui d’Alexis Martin soulignant les crédits fiscaux offerts aux entreprises qui affament le Trésor public. 

Sera évoquée l’outrageante démesure de la valeur boursière en milliers de milliards des Google, Apple, Microsoft et Amazon, mais aussi, plus localement, celle — qui semble bien moindre en comparaison, mais néanmoins astronomique parce qu’en milliards — de Couche-Tard, des épiceries Metro et de Dollarama. 

Au premier plan, « Le virus et la proie ». Photo : Marlène Gélineau-Payette
Dans Le virus et la proie, la scène est épurée à souhait, l’espace étant entièrement occupé par les paroles viscérales des personnages. Photo : Marlène Gélineau-Payette

Aucune piste de solution 

Or, Le virus et la proie ne fait pas partie des œuvres dénonciatrices qui tentent d’apporter des pistes de solution.  

Hormis le portrait explicite que dresse le personnage d’Alexis Martin de la chambre de CHSLD où croupit sa mère, le texte, aussi incisif soit-il, se campe davantage dans les généralités, survolant toutes les affres sociales d’ici et d’ailleurs. Le personnage de Tania Kontoyanni rappelle qu’une société riche doit son opulence à l’indigence d’autres sociétés, telle une balance déséquilibrée.  

Quant à l’aspect plus stylistique du texte, par la structure syntaxique des phrases et le choix sémantique, Le virus et la proie verse dans le poétique, les partitions semblant presque emphatiques par moments. 

Dans la bouche d’Ève Pressault et d’Alexis Martin, les mots coulent de source, tout naturellement, sans dissonance entre la joliesse des partitions (égale à l’impétuosité des propos) et l’interprétation, disons, plus réaliste, plus décontractée que requiert une pièce aussi actuelle.  

Ces interprètes ne tombent jamais dans le piège de l’élocution trop théâtrale, que des vocables fort recherchés et une syntaxe aussi soignée pourraient induire. Écueil contre lequel se bute toutefois le plus jeune interprète, Madani Tall, qui gagnerait à détendre son articulation afin qu’elle se conjugue à la contemporanéité de la pièce. Cela rendrait aussi justice à ses expressions faciales et corporelles qui, elles, ravissent. 

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