Benoit McGinnis dans la peau d’Hedwig
Le comédien Benoit McGinnis enfile la flamboyante perruque de la rockeuse Hedwig dans l’adaptation québécoise de la comédie musicale Hedwig and the Angry Inch. Après un délai de trois ans, Hedwig et le Pouce en furie prendra d’assaut le Studio TD dès le 26 janvier.
En 2014, à New York, le comédien assiste à ce spectacle sur Broadway, ignorant alors tout de cette œuvre écrite et jouée originellement en 1998 par John Cameron Mitchell, qui a repris son rôle dans le film homonyme culte sorti en 2001, en plus de le réaliser.
Benoit McGinnis a été happé par l’histoire de cette fougueuse chanteuse glam rock, ni trans ni drag-queen. Par l’entremise d’un concert avec son groupe, Le Pouce en furie, elle relate sa vie houleuse. Sa jeunesse à Berlin Est, son mariage avec un soldat américain, son opération génitale ratée qui lui a laissé pour pénis un résidu de chair auquel fait référence le nom du band, ses amours tumultueuses aux États-Unis, ses abandons… Hedwig se dévoile avec humour et émotion tout au long du show.
« En entendant les gens chanter les paroles, j’ai vu qu’il se passait quelque chose avec cette pièce », se remémore-t-il, en entrevue avec Métro lors d’une répétition, la semaine dernière, où les médias étaient conviés. Si l’interprète n’arborait pas le rouge à lèvres vif de son personnage, il n’avait pas manqué l’occasion de chausser ses bottes chatoyantes à talons hauts.
Rêver de jouer Hedwig
Allumé par le cran, l’irrévérence et les transformations physiques d’Hedwig, il a eu envie de l’interpréter à son tour, ébruitant ce désir autour de lui jusqu’à ce qu’un ami lui dise en 2018 : « Coudouc, attends-tu d’avoir 70 ans avant de le proposer? », raconte l’acteur.
Il a alors sondé l’intérêt de René Richard Cyr, avec qui il avait déjà beaucoup travaillé. La vie étant bien faite, le metteur en scène avait beaucoup aimé le film, et le projet s’est mis en branle.
« C’est une partition formidable pour un acteur », souligne en entrevue René Richard Cyr, qui a traduit en français le spectacle de Broadway.
Elle est intense, mais elle n’est pas juste trash. Elle raconte sa vie, donc elle passe par plein d’émotions, mais elle est vraiment drôle. Et touchante. Ça m’intéresse de ne pas jouer la même affaire tout au long du show.
Benoit McGinnis au sujet de son personnage d’Hedwig
À Montréal comme partout au Québec, Hedwig saluera la ville qui l’accueillera, comme si elle était en véritable tournée mondiale, accompagnée sur scène de quatre musiciens dirigés par André Papanicolaou. À leurs côtés, on retrouvera Elisabeth Gauthier Pelletier, qui incarne le mari et choriste d’Hedwig, Yitzhak — rôle tenu de tout temps par une femme afin d’accentuer l’aspect non genré du récit.
Si René Richard Cyr se garde bien de trop en révéler, il assure que ce sera « un show rock, punk et irrévérencieux, où Hedwig finit par nous toucher ».
Quant à Benoît McGinnis, il aura l’occasion, pour la première fois en des années de carrière sur scène, d’abattre le quatrième mur. À l’instar des humoristes ou des drag-queens, Hedwig parle et badine avec le public. « Je peux bien monter sur les accoudoirs si je le veux », illustre l’acteur. « Si un soir, personne ne m’écoute, je peux lancer : “hey, êtes-vous là?” », dit-il en rigolant.
« Ouvrir des yeux »
Benoit McGinnis, qui a fait tant du théâtre plus niché que des séries grand public et des émissions de variétés, voit également en Hedwig et le Pouce en furie la possibilité de faire découvrir à une certaine frange de son public une œuvre certes excentrique, mais au propos résolument actuel : l’acceptation de soi.
C’est une pièce sur un personnage queer, non genré, qui cherche l’amour. C’est ça, la ligne du show. Hedwig raconte qu’elle veut juste trouver sa bonne moitié pour compléter son tout. Peu importe qui elle est. Même elle, elle ne sait plus qui elle est. Elle cherche quelqu’un qui va l’accepter. On est tellement là-dedans en ce moment, accepter les autres sans jugement.
Benoit McGinnis
Sa partenaire de scène, Elisabeth Gauthier Pelletier, abonde dans son sens : « On aura peut-être un public qui ne serait jamais allé chez Mado, par exemple. Comment va-t-il réagir à des jokes un peu trash ou sexuelles? J’espère qu’on va le gagner et peut-être ouvrir des yeux. Des gens vont pouvoir se mettre dans la peau d’Hedwig ou de quelqu’un qui n’est pas sûr de son identité. C’est pour ça que je trouve que c’est vraiment d’actualité. »
Ultimement, Hedwig et le Pouce en furie constitue une ode à la liberté et au vivre-ensemble, selon Benoit McGinnis. « S’il y a plein de choses que je n’ai pas saisies durant le show à New York à cause de la langue, j’ai senti la communauté, le rassemblement, le sentiment d’avancer ensemble. Ça fait du bien. J’ose espérer que les gens vont se dire : “Hedwig, elle veut juste être bien.” »
Hedwig et le pouce en furie
Du 26 janvier au 4 février 2023
Studio TD
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