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COVID-19: un changement de doctrine est encore plus nécessaire (partie II)

corps de médecins qui travaillent pour lutter contre la covid-19
Photo: Istock/NanoStockk
Cyril Stein - B.A.A., M.B.A., gestionnaire d’opérations humanitaires d’urgence

LETTRE OUVERTE – Une vieille expression dit que «Gouverner, c’est prévoir». Un changement de doctrine est non seulement nécessaire pour faire face à la crise actuelle et aux différents scénarios possibles, mais aussi pour se préparer à une possible future pandémie. Pourtant, rien n’a été fait pour changer de doctrine pour accroitre la capacité de gérer plus de patients simultanément. Pour sortir de ce cercle vicieux et être mieux préparé à de possibles augmentations futures du

nombre de cas, il est aujourd’hui encore plus nécessaire de passer de « pourvu que les vaccins fonctionnent et que le nombre de cas n’augmente pas » à un véritable renforcement proactif de la capacité de gestion médicale du flux de patients COVID en parallèle de la vaccination.

Le système hospitalier n’est pas conçu pour absorber une pandémie en tout temps, et cela n’aurait pas de sens qu’il soit en perpétuelle surcapacité au cas où une pandémie surviendrait. Cependant, lorsqu’une pandémie survient, le système doit être redessiné en conséquence, bien au-delà des procédures, des standards et des capacités habituelles, ceci le temps d’absorber le choc hospitalier de la pandémie. Or, la capacité additionnelle requise lors d’une pandémie ne peut pas être construite en dépouillant gravement le système de santé existant.

Autrement dit, il ne s’agit pas de mettre en place une stratégie de vases communicants (couper des lits existants pour des pathologies existantes afin de les transformer en lits COVID), mais plutôt de créer une capacité additionnelle temporaire en parallèle du système de santé existant. Et, même lorsque le nombre de cas retombera, il sera essentiel de garder cette capacité additionnelle (structure, lits, équipements, consommables) pendant plusieurs mois en veille, prête à être réactivée très rapidement au besoin pour faire face à une nouvelle flambée du nombre de cas. C’est d’ailleurs cette stratégie qui a été mise en œuvre avec succès à l’étranger lors de flambées de cas de choléra.

La pénurie de personnel médical est une réalité qui a eu pour effet d’exercer une pression et un stress importants sur celui-ci, détériorant significativement le climat de travail dans plusieurs hôpitaux du Québec. Cela a poussé de nombreux travailleurs à quitter le système de santé public. Et plusieurs départements hospitaliers sont même proches de la rupture de service. C’est pour cela qu’il est d’autant plus important de maximiser l’efficacité de la gestion du personnel médical. Ainsi, une stratégie plus efficace pour gérer cette pandémie serait la mise en place de centres de traitement régionaux dédiés à la COVID d’une capacité ambitieuse et modulable de plusieurs centaines de lits chacun, à l’extérieur des hôpitaux existants. Ils pourraient être gérés par les forces armées canadiennes (médicales et non médicales) avec l’appui du personnel médical civil des secteurs public et privé. D’ailleurs, une proportion significative d’entre eux devrait être formée pro-activement à gérer des patients COVID, dans des fonctions correspondant à leurs compétences professionnelles. Ainsi, si cela devenait nécessaire, ils représenteraient une force de frappe, déjà opérationnelle, pour prêter main forte au personnel médical en première ligne dans les centres de traitement régionaux COVID. Ces centres de traitement régionaux COVID permettraient de gérer les ressources humaines médicales de manière plus efficace que dans les 47 départements COVID répartis à travers le Québec qui n’accueillent actuellement pour la plupart que de 0 à 4 patients. Le fait de rassembler les patients, et donc les ressources humaines et matérielles dans ces centres de traitement régionaux, entraînerait probablement aussi une baisse du stress du personnel

médical et des contaminations dans les hôpitaux. Et cela rassurerait les citoyens, car nombre d’entre eux ont peur de se rendre à l’hôpital, avec les conséquences invisibles mais bien réelles à venir sur leur santé et possiblement sur leur vie. Il est d’ailleurs écrit dans le rapport du Ministère de la Santé et des Services Sociaux sur la baisse des diagnostics de cancers qu’une « inquiétude demeure pour les patients non diagnostiqués. Le délai pour obtenir un diagnostic pourrait avoir des conséquences sur l’évolution de la maladie (…). Un stade plus avancé pourrait influencer le pronostic, les traitements, la qualité de vie et, à terme, la survie des personnes. » 

Enfin, ces centres de traitement régionaux COVID donneraient une marge de manœuvre au gouvernement pour :

  • – Être moins dépendant des fluctuations du nombre de cas et des hospitalisations ;
  • – Offrir à pleine capacité et sans interruption le diagnostic des cancers à la population ;
  • – Supprimer durablement les restrictions de liberté et d’activité économique ;
  • – Améliorer en temps réel la stratégie et les tactiques pour gérer des flambées de cas de COVID ;
  • – Être mieux préparé à affronter des variants plus agressifs et une possible nouvelle pandémie.

Cyril Stein
B.A.A., M.B.A., gestionnaire d’opérations humanitaires d’urgence

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