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L’inégalité parentale persiste

Busy mother doing simultaneously many tasks cooking cleaning reading working and talking on the phone Photo: Getty Images/iStockphoto

La rentrée est souvent synonyme de course effrénée pour les parents qui travaillent, en particulier pour les mères.

Bien que les femmes aient investi massivement le marché de l’emploi, elles continuent à passer plus d’heures que leur conjoint à effectuer des tâches domestiques, en plus d’assumer la charge mentale de la logistique familiale.

«En quelques décennies, la structure familiale traditionnelle, dans laquelle on retrouvait une mère au foyer et un père pourvoyeur, a été complètement chamboulée», explique Gilles Pronovost, sociologue retraité de l’Université du Québec à Trois-Rivières.

Selon un récent rapport publié par Statistique Canada, le pourcentage de familles canadiennes comptant deux parents actifs sur le marché du travail a en effet presque doublé en 40 ans. «Le problème, c’est que le partage des tâches ménagères et familiales n’a pas évolué au même rythme», poursuit l’ancien professeur, qui est également auteur de l’essai Que faisons-nous de notre temps? Vingt-quatre heures dans la vie des Québécois – Comparaisons internationales.

D’après des données colligées par Gilles Pronovost, en 2010, les mères québécoises consacraient 15,2 heures par semaine aux tâches ménagères, comparativement à 10,5 heures pour les pères québécois. «Cela équivaut à un ratio de deux pour un. Évidemment, on est loin d’avoir atteint l’égalité, mais il y a tout de même du progrès, car, dans les années 1980, le ratio était de trois pour un!» rappelle-t-il.

On observe aussi une nette amélioration dans le partage des soins aux enfants. La même étude révèle que les pères passent 6,6 heures par semaine à s’occuper de leur progéniture. Ils se retrouvent donc presque nez à nez avec les mères, ces dernières consacrant en moyenne 7,1 heures par semaine à prodiguer des soins d’hygiène à leurs enfants ainsi qu’à les éduquer et à jouer avec eux.

«En quelques décennies, la structure familiale traditionnelle du père pourvoyeur et de la mère au foyer a été complètement chamboulée, mais le partage des tâches ménagères et familiales n’a pas évolué au même rythme.» –Gilles Pronovost, sociologue

Malgré ces progrès, les femmes héritent encore bien souvent de la plupart des tâches de gestion et de planification, comme la prise de rendez-vous chez le médecin et l’organisation des fêtes d’anniversaire. «Les mères ont aussi une remarquable capacité à mémoriser une foule d’informations en apparence banales, mais essentielles au bon fonctionnement du foyer, comme la taille des vêtements des différents membres de la famille et l’horaire des activités parascolaires», souligne Gaëlle Picut, journaliste française et fondatrice du blogue En Aparté, qui est consacré à la question de la conciliation travail-famille.

Cette «charge mentale» plus importante n’est pas sans conséquence, notamment pour la vie professionnelle des femmes. «En plus de provoquer beaucoup de stress, devoir tout mener de front est très fatigant. Cela peut donc être un frein à l’ambition de certaines femmes, puisque celles-ci ont moins d’énergie pour réseauter ou prendre des décisions audacieuses au travail», déplore Gaëlle Picut.

La blogueuse reconnaît toutefois que les conséquences de la charge mentale féminine peuvent aussi être positives. «Certaines femmes que j’ai interrogées pour mon site m’ont affirmé que le fait de devoir jongler constamment avec plusieurs tâches leur permet d’accroître leur efficacité et leur polyvalence, tout en renforçant leur capacité d’adaptation. Or, ces trois qualités sont très recherchées par les employeurs.»

Mesures de conciliation encore timides en entreprise
Il n’y a pas qu’au chapitre du partage des tâches domestiques qu’on observe une disparité entre les parents; les inégalités persistent aussi au travail. En 2010, les mères québécoises travaillaient en moyenne 42,2 heures par semaine. Pour les pères, ce chiffre s’élevait à 50,5 heures.

Cet écart s’explique notamment par le fait qu’un plus grand nombre de mères optent pour un emploi à temps partiel. Selon une étude de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques du Québec, les femmes sont aussi 30% plus nombreuses que les hommes à s’absenter du travail pour des raisons personnelles ou familiales.

Si les mères doivent souvent sacrifier ainsi leur carrière – et par conséquent, leur autonomie financière –, c’est entre autres parce que les entreprises rechignent encore à adopter des mesures favorisant la conciliation travail-famille.

«Les employeurs croient souvent que de telles mesures coûtent cher et sont compliquées à mettre en place. Il existe cependant plusieurs solutions simples et très efficaces, comme les horaires flexibles ou compressés, les banques de congés familiaux et le fractionnement des vacances. Et ces initiatives peuvent rapporter gros, car elles favorisent la productivité des employés, en plus d’augmenter le pouvoir d’attraction de l’entreprise et de diminuer le roulement de personnel de même que le taux d’absentéisme», affirme Marianne Roberge, présidente et fondatrice de la firme KOEVÄ, qui offre des services de consultation en conciliation travail-famille.

Les politiques de conciliation travail-famille permettent également de réduire les coûts liés aux réclamations d’invalidité, car elles contribuent à diminuer la fatigue et le stress des employés.

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